Pesticides : le Sénat supprime l’interdiction des rabais et promotions

Pesticides : le Sénat supprime l’interdiction des rabais et promotions

Lors de l’examen du projet de loi agriculture et alimentation, les sénateurs ont supprimé l’interdiction des ristournes sur les pesticides. Un vote qui, pour le sénateur écologiste, Joël Labbé, est le résultat de l’influence des lobbies.
Public Sénat

Par Simon Barbarit et François Vignal

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

« Ça faisait partie des claires avancées de l’Assemblée nationale » a regretté le sénateur écologiste, Joël Labbé. En début d’après-midi, le Sénat a voté la suppression de l’article 14 de la loi agriculture et alimentation. L’article interdisait « remises, rabais, et ristournes » pour la vente de « produits phytopharmaceutiques », pesticides et autres désherbants.

Joël Labbé y voit la main des lobbies

L’article avait été supprimé en commission qui a estimé notamment qu’un tel dispositif « se traduirait par une augmentation considérable des charges des agriculteurs » comme l’a expliqué sa vice-présidente centriste, Anne-Catherine Loisier.

Malgré plusieurs amendements de réintroduction de l’article 14 dans la loi, présentés par le gouvernement, les communistes, les socialistes, ou encore du sénateur écolo Joël Labbé, le Sénat a voté sa suppression.

Sur ce sujet sensible, le ton est monté entre les élus, lorsque le sénateur Labbé a affirmé qu’il sentait dans cette suppression « l’influence des groupes de pression pour faire en sorte qu’on continue avec ce système ».

« C’est très blessant et ça ne donne pas l’image d’une assemblée comme la notre »

Loi alimentation: Sophie Primas (LR) réfute toute influence des lobbies
01:23

Une allusion qu’a peu goûtée, la présidente LR de la commission des affaires économiques, Sophie Primas. « Je voudrais qu’on évite les accusations. Pardon Joël (Labbé), mais ce que tu dis est très accusatoire (…) c’est très blessant et ça ne donne pas l’image d’une assemblée comme la notre, qui tu le sais, est une assemblée qui travaille sur le fond (…) Il y a des lobbies qui existent et ces lobbies nous n’en sommes pas sensibles » a-t-elle assuré avant « d’appeler au calme » dans l’hémicycle.

« Nos jardiniers du Jardin du Luxembourg utilisent des préparations à base d’ail et de purin de plantes »

Joël Labbé, toujours très actif sur ce texte, a ensuite défendu les produits de substitutions aux pesticides. Il a défendu le retour au texte de l’Assemblée, qui permet d’autoriser facilement les substances bio issues des « parties consommables de plantes ». Les sénateurs ont eux introduit une autorisation « selon une procédure et une évaluation simplifiées ». Un frein à leur utilisation, selon le sénateur du Morbihan, épaulé sur le sujet par le sénateur de Guadeloupe Dominique Théophile, membre du groupe LREM. « Ces alternatives aux produits phytopharmaceutiques restent insuffisamment développées du fait d’une lourdeur et d’une complexité administrative » souligne l’élu d’Outre-mer.

Joël Labbé défend les produits de substitution aux pesticides : « Nos jardiniers du Jardin du Luxembourg utilisent des préparations à base d’ail et de purin de plantes »
01:24

Le sénateur écologiste du groupe RDSE a trouvé le parfait exemple pour tenter de convaincre ses collègues (voir la vidéo ci-dessus) : « Si ces plantes peuvent être consommées pour l’alimentation humaine, elles n’ont pas de risque particulier. Ces solutions sont largement utilisées sur le terrain, jusque dans le Jardin du Luxembourg, propriété du Sénat… » Il brandit alors une feuille :

« Je vous ai apporté un document qui est une facture du Jardin du Luxembourg, qui montre que nos jardiniers utilisent des préparations à base d’ail et de purin de plantes, donc des PNPP (préparations naturelles peu préoccupantes, ndlr). Comment justifier de continuer à interdire ce qui est utilisé jusque sous nos fenêtres ? »

« Certaines parties de plantes sont toxiques »

« Il n’est absolument pas question d’interdire quoi que ce soit. La commission a maintenu la liste des 148 plantes déjà utilisées » a répondu la sénatrice UDI Côte-d'Or Anne-Catherine Loisier, corapportrice du texte. Mais « ce n’est parce que la plante est comestible que l’utilisation à forte dose ne pose pas de problème ». Ce qui justifie, à ses yeux, une évaluation de l’Anses, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail.

Le ministre Stéphane Travert abonde en son sens : « Certaines parties de plantes sont toxiques. Il y a la perte des cheveux avec l’ingestion trop importante de courge par exemple. Sur la rhubarbe, vous avez une partie consommable, mais une partie qui ne l’est pas, avec une toxicité sur les feuilles. Il est même impossible de les mettre dans le composteur ».

Le ministre et la rapporteure ont cependant soutenu un amendement de la commission du développement durable permettant que les produits issus des parties consommables des plantes fassent « l'objet d'une procédure adaptée, en vue de faciliter leur utilisation, sans les soustraire à toute évaluation préalable ».

Dans la même thématique

PARIS: MEDEF, Audition des principales tetes de liste aux prochaines elections europeennes
7min

Politique

Sondages sur les européennes : Bardella caracole en tête, Glucksmann talonne Hayer

A un peu plus d’un mois des élections européennes, le dernier sondage réalisé par l’institut Harris-Interactive et Toluna pour M6, Challenges et RTL, confirme les tendances de ces dernières semaines. Loin devant, la liste du Rassemblement National (31%) écrase la concurrence, plus du double devant la majorité présidentielle (15%), qui voit son avance sur la liste socialiste (14%), fondre comme neige au soleil.

Le

Au sein de la droite sénatoriale, de plus en plus de sénateurs tentés par le parti Horizons
8min

Politique

Au sein de la droite sénatoriale, de plus en plus de sénateurs tentés par le parti Horizons

Le président de la commission de l’aménagement du territoire, Jean-François Longeot, rejoint Horizons, tout en restant dans son groupe de l’Union centriste. Pour les membres du parti d’Edouard Philippe, il ne fait aucun doute que d’autres l’imiteront après les européennes. Des membres du groupe LR confirment que certains collègues « se posent des questions ».

Le

Pesticides : le Sénat supprime l’interdiction des rabais et promotions
6min

Politique

Européennes 2024 : quelles sont les principales mesures du programme de Valérie Hayer ?

Valérie Hayer présentait, ce lundi, 48 propositions de son programme pour que « l’Europe ne meure pas ». Parmi les mesures mises en évidence, un « Plan Europe 2030 », destiné à compléter le Pacte vert, un investissement 100 milliards pour le réarmement de l’UE, l’inscription du droit à l’IVG dans la Charte des droits fondamentaux ou encore une hausse des moyens de Frontex.

Le