Porno: quand une sénatrice prouve à l’Arcom que des contenus illicites sont accessibles à tous

Porno: quand une sénatrice prouve à l’Arcom que des contenus illicites sont accessibles à tous

La délégation aux droits des femmes du Sénat prépare un rapport d’information sur les dérives de l’industrie pornographique. Auditionnée, ce jeudi, Carole Bienaimé Besse a expliqué le rôle de l’Arcom qui est en charge depuis 2020, de restreindre l’accès aux mineurs des contenus pornographiques.
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Après le choc de l’audition des associations féministes la semaine dernière, les membres de la délégation aux droits des femmes attendaient des réponses de la part de l’Arcom concernant l’accès des mineurs à la pornographie.

Lire notre article: Porno : « C’est du proxénétisme à l’échelle industrielle », dénoncent les associations féministes auditionnées au Sénat

En effet, depuis la loi 30 juillet 2020, les sites pornographiques doivent mettre en place un contrôle de l’âge de leurs visiteurs. L’Arcom (ex CSA) a la charge d’adresser une injonction de mise en conformité aux sites frauduleux. A défaut, l’Arcom peut saisir le président du tribunal judiciaire de Paris afin qu’il ordonne aux fournisseurs d’accès à Internet le blocage de ces sites depuis la France. Dès 2020, plusieurs associations de protection de l’enfance avaient fait pression sur le CSA pour qu’il agisse, mais faute de décret d’application, arrivé tardivement le 7 octobre 2021, ce n’est qu’en décembre dernier, que plusieurs sites pornographiques (Pornhub, Tukif, Xhamster, Xvideos, et Xnxx, Jackie et Michel…) ont reçu l’injonction de se mettre en conformité.

« Il faut s’appuyer sur des constats d’huissiers solides »

Et pourtant, un mois plus tard rien n’a changé dans les pratiques de ces sites. Carole Bienaimé Besse, membre de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) auditionnée, ce jeudi, a dû faire face à l’incompréhension des élus. « Pour pouvoir saisir le tribunal judiciaire de Paris aux fins d’ordonner un blocage, il faut s’appuyer sur des constats d’huissiers solides » […] « Nous avons fait des constats d’huissiers. Certains sites ont considéré qu’ils avaient mis en place des outils. Mais c’est à nous de nous assurer que ces outils sont efficaces. Par ailleurs, dans le cadre de la loi, l’Arcom peut proposer des lignes directrices. Elles sont interprétatives et sans forces coercitives », explique Carole Bienaimé Besse qui met aussi l’accent sur les « sites miroirs ». « On sait très bien que si le juge décide de faire bloquer un site, on peut le voir renaître sous une autre adresse en quelques heures ».

Lire notre article: Vers un blocage des sites pornos aux mineurs : « Une première mondiale » se félicite la sénatrice à l’origine de la loi

De quoi presque décourager la délégation aux droits des femmes qui prépare un rapport d’information sur les dérives de l’industrie pornographique après les révélations de l’affaire du « porno français » où une cinquantaine de victimes sont déjà identifiées. Huit producteurs et acteurs sont mis en examen pour viols en réunion, traite d’êtres humains et proxénétisme.

La rapporteure communiste de la mission d’information, Laurence Cohen pointe « un décalage ». « On a lu et vu des reportages. On a reçu des associations. On est face à de la prostitution, de l’esclavage, des choses abominables […] donc je ne comprends pas cette histoire de mise en conformité ».

« Il faut s’adresser aux tribunaux »

« Nous sommes compétents sur les contenus audiovisuels et numériques. Nous ne sommes pas compétents sur la chaîne de fabrication de ces contenus (..) Il faut s’adresser aux tribunaux […] La mission de l’Arcom s’est de s’assurer que les sites pornographiques ne sont pas accessibles aux mineurs », répond la membre de l’Arcom qui regrette « un malentendu ».

« C’est vrai que votre travail, c’est de faire que ces sites ne soient pas accessibles aux mineurs mais déjà pour cette mission, on a l’impression qu’elle n’est pas remplie », note Annick Billon, la présidente de la délégation aux Droits des femmes.

La sénatrice centriste, Dominique Vérien veut comprendre le rôle de l’Arcom au-delà de la protection des mineurs lorsque des contenus « sont explicitement un viol » ou « un appel au racisme ». « Qu’on soit adulte ou mineurs, on n’a pas à voir ça ou à le mettre en ligne car sinon on est en train d’accepter de visionner un crime ».

« J’ai mis viol sur Google et on me propose une vidéo porno gratuite »

« Pour ces contenus illicites, c’est simple, ils sont supprimés. Il y a la plateforme Pharos qui lutte contre les contenus que vous décrivez […] D’ailleurs, on a passé en revue les conditions générales d’utilisation de ces plateformes. Elles disent qu’elles suppriment ces contenus parce qu’ils ne sont pas en conformité avec la loi », répond Carole Bienaimé Besse avant d’être démentie dans les minutes suivantes.

Dominique Vérien sort son portable et fait la démonstration. « J’ai mis viol, film, sexuel sur Google et immédiatement on me propose : viol, film complet, vidéo porno, sexe, HD gratuit. Et je pense que je n’ai pas besoin d’avoir 18 ans pour y accéder ».

Diplomate, Annick Billon met un terme à l’audition. « La conclusion, c’est que nous ne sommes pas dotés d’outils pour lutter contre la pornographie criminelle de grande ampleur qui est une industrie ».

 

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