Pour le communicant Vincent Dujardin, « l’exécutif joue l’opinion publique contre les cheminots pour les isoler au maximum »
Le bras de fer entre les syndicats et le gouvernement sur la réforme de la SNCF pose de nombreuses questions de communication… Quel jeu a joué l’exécutif dans ces négociations annoncées dès février ? Et quels messages envoient le Président Macron et son Premier ministre ?

Pour le communicant Vincent Dujardin, « l’exécutif joue l’opinion publique contre les cheminots pour les isoler au maximum »

Le bras de fer entre les syndicats et le gouvernement sur la réforme de la SNCF pose de nombreuses questions de communication… Quel jeu a joué l’exécutif dans ces négociations annoncées dès février ? Et quels messages envoient le Président Macron et son Premier ministre ?
Public Sénat

Par Prescillia Michel

Temps de lecture :

3 min

Publié le

Mis à jour le

Les cheminots versus l’opinion publique

Avant même l’annonce du Premier ministre le 26 février dernier, le Président Macron portait déjà haut et fort son désir de réformer la SNCF lors de sa rencontre avec des cheminots en juillet dernier ou au Salon de l’Agriculture où il est interpellé sur le statut des cheminots dans les allées des halls d’exposition.

2_macron_tgv_juillet_2.jpg
AFP

Pour Elsa Freyssenet, journaliste au service Enquêtes des Échos, « dans ces deux moments, le président de la République fait deux déclarations qui « ulcèrent les syndicats » : lier leur statut à la dette de la SNCF et les traiter de « privilégiés », comparé notamment aux agriculteurs.

De plus, ces deux moments symbolisent une communication présidentielle comme l’explique Vincent Dujardin, communicant et directeur général d’Alquier Communication : « Dans un premier temps, Emmanuel Macron s’adresse aux cheminots, à ceux qui sont directement concernés par ce sujet, on est dans un discours pédagogue ».

1_macron_tgv_juillet.jpg
AFP

En revanche, « au Salon de l’Agriculture, il ne va plus s’adresser aux cheminots mais à l’opinion publique ».

4_macron_salon_agri_2.jpg
AFP

Pour le communicant, le président : 

« joue désormais l’opinion contre les cheminots et entre dans une stratégie de communication extrêmement clivante en isolant au maximum ces derniers »

Ainsi, pour Elsa Freyssenet, « les cheminots se sentent très stigmatisés » tandis que « la stratégie est de mettre en scène une volonté réformatrice du gouvernement contre ce qu’il appelle les blocages syndicaux ».

Un Premier ministre « droit dans ses bottes »

À partir du mois de février, Édouard Philippe poursuit cette stratégie de communication du gouvernement en étant « droit dans ses bottes et en sachant où il veut aller » analyse Nathalie Barreau, médiatrice en entreprise et fondatrice du cabinet Entre-liens.

« Il a donc une position haute sur le cadre, ce qui laisse entendre qu’il a également une position haute sur le fond ».

17_philippe_borne_26_fevrier.jpg
AFP

Le Premier ministre pose donc les limites de cette réforme :

« Il fait un distinguo très clair entre le fait que le gouvernement ne négociera pas les principes en eux-mêmes mais il négociera à l’intérieur »

Pour Vincent Dujardin, l’annonce témoigne qu’Édouard Philippe « est très flou sur le cadre existant de la négociation ». Son objectif est alors de « pouvoir sortir par là-haut de ce bras de fer avec les syndicats, pour pouvoir dire on a gagné, on a réussi à faire la réforme et donc on a pu avancer ».

Un gouvernement qui souhaite réformer vite et beaucoup tout en tentant de faire passer un message d’ouverture. Celui-ci trouve son illustration en mai, quand le Premier ministre reçoit les syndicats à Matignon.

ajout_photo_phil_syndicats.jpg
Crédit : France 2

Une main tendue qui traduit pour Elsa Freyssenet « une ouverture sur la forme, pour l’opinion car le gouvernement montre qu’il n’est pas sectaire ». Cependant « sur le fond, Édouard Philippe apparaît raidi en affirmant que la fin du statut des cheminots au 1er janvier 2020 n’est pas négociable ».

Mais au regard de l’enlisement du conflit social, le gouvernement parviendra-t-il à sortir victorieux et à s’offrir le « scalp » des syndicats comme le souligne Elsa Freyssenet ? En tout cas, chacun des deux camps n’est pas prêt à lâcher du lest sur les principes de cette réforme…

 

Retrouvez l’intégralité de l’émission Déshabillons-Les, Les rails de la réforme, samedi 26 mai à 15h sur Public Sénat.

Partager cet article

Dans la même thématique

General policy speech by Prime Minister at Senate
10min

Politique

Budget : comment le Sénat va réduire l’effort demandé aux collectivités de 4,6 à 2 milliards d’euros

La majorité sénatoriale veut revenir sur l’effort demandé par le gouvernement aux collectivités. Le premier ministre a déjà fait des gestes devant les régions et les départements. « Un premier pas », reconnaît le sénateur LR Stéphane Sautarel, mais insuffisant. Pour compenser l’allègement de l’effort sur les collectivités, la majorité sénatoriale entend renforcer les économies sur d’autres ministères, notamment sur la « jeunesse, la recherche ou la culture ».

Le

7min

Politique

Insécurité dans les territoires d’Outre-mer : « Nous, les maires, nous sommes en première ligne pour lutter, mais on n’a pas de moyens pour le faire »

A la veille de l’ouverture du 107e congrès des maires à Paris, des élus des Outre-mer se sont retrouvés à Issy-les-Moulineaux ce lundi 17 novembre. Alors qu’ils font face à une criminalité et une délinquance grandissantes, dans des territoires en proie au narcotrafic, les maires, aux côtés de la délégation sénatoriale aux Outre-mer, ont plaidé pour un « choc régalien ».

Le

Paris : session of questions to the government at the French National Assembly
6min

Politique

Budget 2026 : quels scénarios dans un calendrier de plus en plus contraint ?

Avec encore plus de 1 500 amendements restant à examiner en une semaine à l’Assemblée sur la partie recettes du projet de loi de finances, le calendrier budgétaire est de plus en plus contraint. Dans une assemblée divisée et avec le renoncement du gouvernement de recourir au 49.3, la possibilité d’une adoption des deux lois de finances avant le 31 décembre 2025 relève presque de la politique-fiction.

Le

Paris: Salon europeen de l Education
4min

Politique

Budget 2026 : Un rapport du Sénat dénonce « un coup dur porté à la jeunesse », avec une réduction de l’enveloppe dédiée au service civique

Comme en 2025, la mission sport, jeunesse et vie associative subie une sérieuse coupe dans le budget. Le service civique voit son enveloppe budgétaire réduite de 20 %, soit 114,4 millions d’euros par rapport à l’année dernière. « Se priver d’un dispositif qui fonctionne au moment où on a besoin de faire du lien social, c’est incompréhensible », regrette le rapporteur des crédits, Éric Jeansannetas (PS).

Le