Quand les députés activent leurs réseaux… sociaux

Quand les députés activent leurs réseaux… sociaux

Des "topos", des tweets en pagaille, voire des chaînes YouTube: les députés s'emparent de plus en plus des réseaux sociaux pour...
Public Sénat

Par Charlotte HILL

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Des "topos", des tweets en pagaille, voire des chaînes YouTube: les députés s'emparent de plus en plus des réseaux sociaux pour communiquer sans filtre, et parfois sans filets.

"Cela fait un moment que les députés ont intégré Twitter, Facebook, etc. dans leur communication politique. Ils ont compris que c'était essentiel pour toucher la population", explique à l'AFP l'historien des médias Alexis Lévrier.

Mais dans la nouvelle Assemblée, très renouvelée et rajeunie, le phénomène s'est encore amplifié. L'hémicycle prend parfois des airs de "cour de récréation", avec des élus se faisant photographier à chaque intervention, selon Philippe Gosselin (LR).

Les élus encore absents des réseaux "seront obligés d'y venir", et "ceux qui ne les voient que comme une contrainte se privent de moyens", même si "le risque est moindre quand ils sont déjà identifiés", observe Alexis Lévrier.

Aujourd'hui, "on existe peu sans les réseaux sociaux", façon de dire "je suis là, je suis là", renchérit le psychanalyste Jean-Pierre Friedman, spécialiste des relations de pouvoir.

Malgré d'éventuelles "grosses bévues", c'est un moyen de se faire connaître "peu coûteux et qu'on peut contrôler", abonde Thierry Vedel, chercheur CNRS au CEVIPOF.

Depuis juin, outre les débuts hésitants d'élus moqués par des internautes, certains néophytes, par "souci louable de s'adresser à leurs administrés, ont utilisé les réseaux pour raconter leur vie", relève Alexis Lévrier.

Mireille Robert (LREM) a raconté sa rentrée en évoquant dans une vidéo "des cocktails et des cocktails et des cocktails"... Claire O’Petit (LREM) a aussi été critiquée, comme pour ses propos polémiques sur les APL.

Ces maladresses viennent de députés qui "découvrent les réseaux sociaux", pas de la génération qui sait qu'"internet a une mémoire", juge l'historien de la presse, pour lequel c'est "conjoncturel".

- LFI "a mis le paquet" -

Chez les Insoumis, des "talents" ont vite émergé, aidés par cette "caisse de résonance", observe Alexis Lévrier.

Ugo Bernalicis, qui n'a pas hésité mardi à promouvoir une vidéo sur sa chaîne YouTube pendant les questions au gouvernement, défend auprès de l'AFP une "stratégie délibérée pour que "ce qui se passe à l'Assemblée ne reste pas à l'Assemblée".

"On a mis le paquet là-dessus" pendant la campagne présidentielle et "on a une base qui nous suit", affirme l'élu nordiste, qui propose "le topo d'Ugo", petites pastilles face caméra, et revendique 3 à 4.000 vues pour les interventions LFI.

Mais un élu LREM reproche aux Insoumis, pour faire du buzz selon lui, de chercher à provoquer des incidents et "faire apparaître comme méprisante" la majorité.

Certains jeunes avec "pourtant des histoires à raconter" préfèrent aussi Twitter et Facebook, entre autres "parce qu'ils n'ont pas confiance" dans les médias classiques, selon une source LREM. Et, "avec une vidéo d'une ou deux minutes, on peut faire émerger des députés talentueux, avec une expertise, qui auraient moins accès aux médias nationaux", juge un "marcheur", assurant que l'objectif est de "compléter, pas contourner, l'offre médiatique".

Mais ils parviennent jusqu'alors moins à émerger, car leur "communication lisse" est "le reflet du côté très vertical de la gouvernance Macron", estime Alexis Lévrier.

Pour LREM comme pour LFI, Thierry Vedel note aussi un "souci stratégique de mieux contrôler la parole publique et ne pas passer par l'intervention des journalistes", "vieux fantasme de la politique", selon ce chercheur.

Les réseaux "ont un côté rassurant parce qu'on a la maîtrise de ce qu'on publie", confirme Ugo Bernalicis. Mais cela vient "en complément des passages médias, pas en remplacement".

A l'heure où chaque élu sera sous peu équipé de tablettes pour tendre vers le "zéro papier", Philippe Gosselin estime qu'"il y a peut être des règles nouvelles à apporter".

L'élu, qui lui-même "tweete, Facebooke, et communique beaucoup", souhaite néanmoins, via les groupes sur la réforme de l'Assemblée, alerter sur le "danger" que les élus ne soient "pris pour des clowns".

Dans la même thématique

Paris : Speech of Emmanuel Macron at La Sorbonne
7min

Politique

Partage de la dissuasion nucléaire : « Une nouvelle fois, le Président Macron improvise, au détriment de notre crédibilité »

Après un discours particulièrement scruté à la Sorbonne, Emmanuel Macron a répété sa volonté « d’ouvrir le débat » sur la mutualisation des armes nucléaires françaises avec les autres Etats de l’Union européenne. Si le président de la République est resté flou sur ses propositions, ces déclarations ont suscité un rejet quasi unanime au sein de la classe politique française.

Le

Paris : QAG au Senat
5min

Politique

Narcotrafic : « Le garde des Sceaux semble avoir suivi de près nos auditions », note le rapporteur de la commission d’enquête sénatoriale

Nouveau statut de repenti, nouveau parquet national anticriminalité organisée (PNACO), nouveau crime « d’association de malfaiteurs en bande organisée »… Le garde des Sceaux a annoncé plusieurs pistes pour lutter contre le « haut du spectre » du narcotrafic. Des annonces qui s’inspirent largement des travaux de la commission d’enquête sénatoriale qui remettra son rapport le 14 mai.

Le

Nimes: CRS 8 deployed to combat drug trafficking in the Pissevin district
4min

Politique

Narcotrafic : comment fonctionne le statut de repenti en France ?

Le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti a annoncé ce week-end une évolution du statut de repenti afin de lutter contre le « haut du spectre » du narcotrafic. Ce statut existe en France depuis la loi Perben de 2004, mais n’a été que très peu utilisé. Explications.

Le

Quand les députés activent leurs réseaux… sociaux
3min

Politique

Convocation de Mathilde Panot pour apologie du terrorisme : « Il y a une volonté de faire taire, de la part du pouvoir en place », s’insurge Manuel Bompard

Invité de la matinale de Public Sénat, le coordinateur de la France Insoumise est largement revenu sur les accusations qui touchent son parti. La cheffe de file des députés insoumis, Mathilde Panot doit être auditionnée, demain, pour apologie du terrorisme tandis que Jean-Luc Mélenchon est visé par une plainte du gouvernement pour injures publiques. 

Le