Que penser des nouveaux visages de l’Union européenne?
Après les nominations aux postes clefs de l’Union européennes, Jean Bizet (LR) salue un « équilibre assez délicat à trouver », André Gattolin (LREM) « une victoire française » et pour Emmanuel Macron. « Rien de nouveau sous le soleil », selon Marie-Noëlle Lienemann (GRS). « On place des amis » regrette Hélène Conway-Mouret (PS).

Que penser des nouveaux visages de l’Union européenne?

Après les nominations aux postes clefs de l’Union européennes, Jean Bizet (LR) salue un « équilibre assez délicat à trouver », André Gattolin (LREM) « une victoire française » et pour Emmanuel Macron. « Rien de nouveau sous le soleil », selon Marie-Noëlle Lienemann (GRS). « On place des amis » regrette Hélène Conway-Mouret (PS).
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Après des heures d’échanges et de tractations, les chefs d’Etat et de gouvernements européens ont réussi mardi à trouver un accord sur les noms pour les principaux postes des institutions européennes. Une formule non pas magique mais où les équilibres sont savamment dosés.

L’allemande Ursula von der Leyen sera présidente de la commission européenne. Ministre de la Défense en Allemagne, elle est membre de l'Union chrétienne-démocrate (CDU) et proche de la chancelière Angela Merkel. La française Christine Lagarde occupera la présidence de la Banque centrale européenne (BCE). L’ancienne ministre de l’Economie de Nicolas Sarkozy était à la tête du Fonds monétaire international, l’une des grandes instances de l’économie planétaire. C’est le socialiste espagnol Josep Borrell qui sera le Haut représentant aux Affaires étrangères de l’Union. Il était déjà ministre espagnol des Affaires étrangères. Pour le poste de président du Conseil, les 28 se sont entendus sur le Premier ministre belge, Charles Michel, un libéral.

Ce mercredi, les eurodéputés ont de leur côté élu le nouveau président du Parlement européen. C’est l’italien David Sassoli, du Parti démocrate, qui a été élu au second tour par 345 voix. Il est élu pour deux ans et demi. L’élection de cet ancien journaliste pourrait faciliter l'approbation du choix de l'Allemande Ursula von der Leyen.

Au Sénat français, ces nominations à ces postes clefs sont plus ou moins bien reçues et perçues.

Jean Bizet (LR) : « C’était un équilibre assez délicat à trouver »

Pour le président LR de commission des affaires européennes du Sénat, le casting européen est satisfaisant. « Je porte un regard plutôt positif pour plusieurs raisons : on a mis au centre le couple franco-allemand. Sur les deux postes essentiels, il y a une Allemande et une Française ; le PPE (la droite européenne) se sort bien de cette affaire et ce n’était pas évident. On se concentre sur le noyau dur de l’Union européenne, avec l’aval des pays du groupe de Visegrád (les pays d’Europe centrale, Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovaquie). C’était un équilibre assez délicat à trouver ». Regardez (images de Marie Bremeau) :

Nominations des postes clefs au sein de l'Union européenne : « C’était un équilibre assez délicat à trouver » selon Jean Bizet, sénateur LR
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Le sénateur de la Manche salue aussi « l’arrivée de Joseph Borrell, car il a été particulièrement courageux dans la crise catalane. C’est un message subliminal envoyé à d’autres Etats ». Si Jean Bizet est « ravi pour Christine Lagarde », il « regrette l’absence de Michel Barnier, en raison de son expertise et de son rôle central pour le Brexit ».

Marie-Noëlle Lienemann (GRS) : « On change les têtes mais on n’a aucun changement d’orientation politique de l’Union européenne »

C’est peu dire que Marie-Noëlle Lienemann n’apprécie pas vraiment le résultat des négociations entre chefs d’Etats européens. « On change les têtes mais on n’a absolument aucun signe de changement d’orientation politique de l’Union européenne. Et on peut même s’inquiéter des signes politiques avec la nomination de la présidente de la commission européenne. Ça renforce l’Allemagne dans le dispositif ». Principal grief, selon la sénatrice GRS (Gauche républicaine et socialiste) : « C’est une personnalité très pro Etats-Unis, très atlantiste, très anti-Russe, ce qui présage mal du rôle qu’on attend de l’Europe, d’être acteur de l’équilibre entre Est et Ouest ».

Autre constat de Marie-Noëlle Lienemann : « On recycle des personnalités qui sont contestées dans leur pays. Ursula von der Leyen était considérée comme la moins bonne ministre du gouvernement Merkel. Et Charles Michel a non seulement fait alliance avec l’extrême droite mais vient d’être désavoué par les citoyens belges ». Seul l’espagnol Joseph Borrell a grâce à ses yeux, « un homme très respectable, homme de gauche. Mais le représentant de la diplomatie n’a pas un poids considérable ». Elle salue tout juste une grande « féminité » dans les postes, mais au fonds, « rien de nouveau sous le soleil. Ou plutôt la pluie. C’est l’état général de l’Europe ».

André Gattolin (LREM) : « C’est une victoire française et pour Emmanuel Macron, un vrai succès qui n’était pas gagné d’avance »

Fervent défenseur de l’Europe, le sénateur LREM André Gattolin apprécie la feuille de match de l’équipe européenne. D’autant que c’était loin d’être gagné, après des « négociations compliquées lundi » qui ont suscité « l’agacement du Président » français.

Au final, « il en ressort la fin des Spitzenkandidaten (têtes de liste), ce qui n’est ni démocratique, à défaut d’être transparent ». « Le Président a dit que cela amène à repenser le système de désignation. Là, on a fait de l’intergouvernemental. Mais on manque d’un point d’équilibre qui est de donner de la légitimité préalable aux personnes retenues. Il faudra trouver un système de désignation beaucoup plus démocratique », explique André Gattolin, qui était en lien avec l’Elysée ces derniers jours, lors des discussions, en transmettant des avis, en bon connaisseur de l’Union européenne.

Il salue la nomination de Ursula von der Leyen, « totalement francophone et moins à droite que Manfred Weber », qui était le candidat du PPE, et estime qu’« on est dans quelque chose de beaucoup moins germano allemand centré ». Quant à la française Christine Lagarde, « elle s’inscrit dans la continuité des orientations de la BCE sous Trichet et Draghi, c’est-à-dire de savoir injecter des liquidités pour éviter la crise de la zone euro. Le candidat allemand était un rigoriste. Il voit enfin dans l’arrivée de Charles Michel un élément « très positif, il est connu pour être un négociateur hors pair et il est capable de trouver des compromis de dernière minute ».

Globalement, André Gattolin souligne que « la France acquiert un poste important. Et sur le plan politique, c’est une victoire française et pour Emmanuel Macron, un vrai succès qui n’était pas gagné d’avance ».

Hélène Conway-Mouret (PS) : « On place des amis. L’Europe mérite mieux »

La socialiste Hélène Conway-Mouret, sénatrice des Français de l’étranger, est « ravie de voir qu’un gros effort a été fait pour que des femmes puissent accéder aux plus hauts postes ». Mais elle dénonce un gros point noir : le mode de nomination.

« Les citoyens viennent de voter en Europe. Même si les négociations devaient continuer à se passer dans des couloirs, il serait légitime que les groupes politiques soient impliqués et que ce ne soit pas le fait simplement de deux leaders, ce qui agace l’ensemble de nos partenaires. C’est l’idée que la France et l’Allemagne décident et que les autres doivent suivre. Ça va à l’encontre de davantage de démocratie » regrette la sénatrice socialiste.

Selon l’ex-ministre chargée des Français de l'étranger, « deux leaders européens imposent les candidats qui leur conviennent à eux. On sait que Christine Lagarde a été pendant longtemps très positive sur la politique menée par la France. Quant à Ursula von der Leyen, elle est très impopulaire dans son pays et a commis des erreurs. Au final, on place des amis. L’Europe mérite mieux ».

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