Reconfinement dans trois nouveaux départements : pour les sénateurs, « sans davantage de vaccins, ça ne sert à rien »

Reconfinement dans trois nouveaux départements : pour les sénateurs, « sans davantage de vaccins, ça ne sert à rien »

Le Rhône, l’Aube et la Nièvre. Trois nouveaux départements viennent de s’ajouter à la liste des 16 départements qui subissent des « mesures de freinage renforcées » depuis déjà une semaine. De nouvelles restrictions que les sénateurs des départements concernés n’approuvent pas complètement. Ils demandent surtout une accélération de la vaccination et la mise en place pour certains d’un confinement national beaucoup plus strict pendant les vacances de Pâques.
Public Sénat

Par Antoine Comte

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Olivier Véran, le ministre des Solidarités et de la Santé vient de le confirmer lors de son point presse hebdomadaire : le Rhône, l’Aube et la Nièvre font désormais partie de la liste des 19 départements concernés par « des mesures de freinage renforcées » de la propagation du virus pour les quatre prochaines semaines au moins. Dès demain vendredi minuit, les habitants de ces trois départements devront désormais respecter, sauf motifs impérieux, un rayon de 10 kilomètres pour se déplacer, les commerces non-essentiels seront fermés, les déplacements inter-régions seront interdits, et les lycées passeront en demi-jauges. Le couvre-feu de 19 à 6 heures du matin est également maintenu comme sur l’ensemble du territoire.

De nouvelles mesures gouvernementales qualifiées « d’indispensables » par la plupart des sénateurs élus dans ces trois départements, mais aussi jugées « insuffisantes » et « trop tardives » pour plusieurs d’entre eux.

« Un reconfinement national pendant les vacances de Pâques »

« Attendre la conférence de presse du ministre chaque semaine pour savoir à quelle sauce nous allons être mangés, est devenu invivable. Pour les habitants mais aussi pour les commerçants qui ne savent pas d’une semaine à l’autre s’ils vont pouvoir ou non rester ouverts ». La sénatrice écologiste du Rhône Raymonde Poncet est plus que perplexe quant au nouveau confinement de son département.

« Je comprends qu’il faille prendre de nouvelles mesures de restrictions, mais allons vraiment au bout des choses avant que le virus soit totalement incontrôlable. Je propose, et je ne suis pas la seule à le faire, de confiner toute la France durant les trois semaines des vacances de Pâques, toutes zones confondues, et en fermant les écoles. Cela permettra d’envoyer un message clair au moins aux Français et cela sera surtout beaucoup plus efficace que ce que nous propose le gouvernement », préconise l’élue lyonnaise.

« Une décorrélation entre la vaccination et ces nouvelles mesures »

Pour le maire PS de Villeurbanne, deuxième ville du Rhône, « c’est la décorrélation beaucoup trop forte entre la vaccination et les mesures de restrictions qui est très inquiétante ». Alors que selon lui, seulement 600 à 800 personnes sont vaccinées chaque semaine dans cette commune de plus de 100 000 habitants, Cédric Van Styvendael craint que « ces nouvelles mesures de restrictions de libertés seront de plus en plus difficiles à être acceptées, s’il n’y a pas de perspective sur la vaccination et dans le même temps sur une reprise d’activités pour la culture ou encore les restaurateurs ».

« Pourquoi les cliniques privées ne sont pas réquisitionnées ? »

Toujours dans le Rhône où le taux d’incidence a atteint les 386 cas pour 100 000 personnes et que 97 % des lits en réanimation sont désormais occupés malgré une offre hospitalière conséquente notamment dans la ville de Lyon, le sénateur LR Etienne Blanc dit « ne plus faire confiance au gouvernement ». « A Lyon, vous avez l’hôpital militaire Desgenettes qui dispose de 25 à 30 lits qui pourraient être mobilisés, mais ce n’est pas le cas. De même pour les cliniques privées qui ne sont pas réquisitionnées, pourquoi ? », râle le leader de la droite lyonnaise au conseil municipal.

La saturation des lits de réanimation (75 %), c’est également ce qui explique que la Nièvre, un département beaucoup plus rural que le Rhône et l’agglomération lyonnaise, soit également concerné par ces nouvelles mesures.

« Le système de santé ne peut pas reposer sur la vocation des soignants »

« Nous sommes dans un département où il y a très peu de lits de réanimation. Nous avions manifesté pour garder nos lits de réanimation, mais cela n’a pas suffi. Aujourd’hui, nous ne sommes pas en situation de faire face à des crises importantes comme cette épidémie », dénonce la sénatrice Nadia Sollogoub. Avant d’ajouter : « Les infirmiers sont tellement sous pression qu’ils se reconvertissent en moyenne au bout de 9 ans, et là avec cette crise sans précédent, je ne vous raconte même pas ceux qui ont abandonné, c’est affolant. Le système de santé ne peut pas se reposer que sur la seule vocation des soignants ».

Dans l’Aube, troisième département à basculer ce soir en zone confinée, la saturation hospitalière est également la cause principale du nouveau statut du département. « On a déjà pu évacuer une personne de Troyes jusqu’à Colmar hier, donc je ne vois pas comment on pouvait se passer d’un reconfinement du département », explique la sénatrice Vanina Paoli-Gagin, qui préfère quant à elle l’option choisie par le gouvernement « plutôt qu’un confinement national qui n’est pas du tout la panacée », pour elle.

« Une alchimie de facteurs dans l’Aube »

Mais du côté de la région troyenne qui a enregistré un taux d’incidence de 445 pour 100 000 habitants, c’est « une alchimie de plusieurs facteurs » qui expliquerait également le choix du gouvernement. « Nous faisons partie de la région Grand Est funestement touchée par l’épidémie, et puis nous ne sommes pas loin non plus des Hauts de France très impactés aussi. Donc, géographiquement, notre département n’est pas idéalement situé face à cette épidémie. C’est aussi un département avec beaucoup de passages, une grande zone de rapatriements de télétravailleurs parisiens qui sont seulement à 1h30 de chez nous », regrette la sénatrice.

A noter que d’autres départements dans les régions Auvergne Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche Comté ou encore en Provence-Alpes-Côte-d’Azur font l’objet d’une surveillance renforcée mais ne sont pour le moment pas concernés par les mesures imposées dans les 19 départements.

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