Réduction du nombre des parlementaires : le casse-tête du Sénat

Réduction du nombre des parlementaires : le casse-tête du Sénat

Emmanuel Macron a annoncé, dans son discours devant le Parlement réunit en Congrès à Versailles, sa volonté de réduire d’un tiers le nombre des parlementaires. Même si le projet de loi est adopté rapidement, il n’est pas certain que celui-ci puisse s’appliquer durant le quinquennat.
Public Sénat

Par Yann Quercia, images et interview : Quentin Calmet et Samia Dechir

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Il l’avait souhaité durant la campagne présidentielle, le Président de la République envisage la réduction d’un tiers du nombre de députés et sénateurs. « Un Parlement moins nombreux, mais renforcé dans ses moyens, c'est un Parlement où le travail devient plus fluide, où les parlementaires peuvent s'entourer de collaborateurs mieux formés et plus nombreux. C'est un Parlement qui travaille mieux. » Si Emmanuel Macron appliquait réellement cette règle à la lettre, l’Assemblée passerait de 577 députés à 385. Le Sénat passerait lui de 348 membres à 232.

 

Emmanuel Macron veut « un Parlement moins nombreux mais renforcé dans ses moyens »
06:14

« Je recourrai au vote de nos concitoyens par voie de référendum. »

Pour mettre en œuvre cette réforme, il y a 2 possibilités. Une loi organique pourrait suffire pour baisser le nombre des parlementaires. Selon l'article 25 de la constitution : « Une loi organique fixe la durée des pouvoirs de chaque assemblée, le nombre de ses membres, leur indemnité, les conditions d'éligibilité, le régime des inéligibilités et des incompatibilités.» Une révision constitutionnelle aurait été nécessaire si le nombre des parlementaires devait être augmenté car le plafond maximum est aujourd'hui atteint.

Emmanuel Macron dispose aujourd’hui d’une majorité confortable pour envisager cette loi sans passer par un référendum. Néanmoins il n’est pas encore certain que les parlementaires soient favorables à une réduction de leur nombre. Il pourrait alors avoir recours à l’article 11 de la Constitution qui permet au président de la République de soumettre à référendum tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics. La réduction du nombre des parlementaires entre dans ce cadre. Le Président n’a d’ailleurs pas exclu le recours au référendum pendant son discours à Versailles. « Ces réformes seront soumises au vote du Parlement mais si cela est nécessaire, je recourrai au vote de nos concitoyens par voie de référendum. »

La problématique du Sénat

L’opération pourrait toutefois s’avérer assez compliquée. En effet il existe un ratio entre le nombre de sénateurs et celui de députés qui permet de respecter un équilibre lors des votes du Congrès. Une diminution du nombre de sénateurs avant celle du nombre de députés pourrait remettre en cause la majorité des trois cinquièmes nécessaires à une révision constitutionnelle par le Congrès. Si la réforme des institutions est adoptée d’ici un an, il faudra donc trouver une solution pour les élections sénatoriales de 2020.

De plus, le Sénat étant renouvelé par moitié tous les 3 ans, la réduction du nombre de parlementaires entraînerait un déséquilibre de représentativité. En effet elle ne concernerait que la moitié renouvelable en 2020. Pour le constitutionnaliste Jean-Philippe Derosier, deux solutions sont possibles : « D’un point de vue législatif, un renouvellement intégral du Sénat en 2020 est tout à fait possible. » Problème, les sénateurs élus en 2017 verraient donc leurs mandats réduits de 6 à 3 ans. Pour éviter cet obstacle « le gouvernement pourrait plutôt adopter  une solution transitoire comme en 2004. Nous aurions une réduction en 2020 qui se fera de manière progressive pour aller aux élections de 2023. »

"Un casse-tête de calcul"

Si cette dernière solution était choisie, sur les 178 sénateurs renouvelables en 2020, 58 sièges ne seraient pas remplacés dans les zones rurales. Pour le sénateur André Gattolin, le Sénat se retrouverait face un problème de représentativité et les votes dans l’hémicycle deviendraient compliqués. "C'est un casse-tête de calcul. Le risque serait d'avoir un Sénat qui sera pour sa moitié surreprésenté. Il faudrait alors envisager des votes par pondération avec tous les problèmes techniques cela entraînerait. La meilleure solution serait une élection en une seule fois avec des électeurs élus par tirage au sort pour 6 ans et d'autres pour 3 ans." André Gattolin rappelle que "c'est la solution qui a été choisie en 2004 dans la réforme des mandats qui passaient de 9 à 6 ans."

 

André Gattolin s'exprime sur la réduction des parlementaires : " Un casse-tête de calcul"
02:27

Dans la même thématique

Paris SNCF : Le trafic des TGV tres perturbe après une attaque massive informatique, 800.000 voyageurs concernes
7min

Politique

Attaque du réseau TGV : « De cette manière coordonnée, c’est inédit »

A quelques heures de la cérémonie d’ouverture des JO, le réseau TGV a fait l’objet d’une « attaque massive » avec 3 incendies coordonnés qui ont touché les LGV Atlantique, Nord et Est. Plus largement, quels sont les risques qui pèsent sur les Jeux ? Interview avec l’expert en sécurité Driss Aït Youssef.

Le

PARIS: Soiree electorale des elections europeennes avec Francois-Xavier Bellamy au siege de Les Republicains
3min

Politique

Parlement européen : François-Xavier Bellamy porte plainte contre Rima Hassan

François-Xavier Bellamy porte plainte contre Rima Hassan pour des menaces qu’elle aurait proférées à son égard. Cette plainte fait suite au blocage par le député européen de la candidature de Rima Hassan à la vice-présidence de la sous-commission des droits de l’Homme. L’élection du poste de vice-présidente que briguait la députée européenne a été reportée en septembre.

Le

Paris: Designation Bureau Assemblee Nationale
6min

Politique

Ingérences étrangères : quelles sont les règles qui s’appliquent aux élus ?

Les élus sont souvent une cible privilégiée pour les ingérences étrangères. Si les atteintes à la probité existent, les formes d’influences sont diverses et se renouvellent. Après l’adoption de la loi sur les ingérences étrangères le 5 juin dernier, retour sur les règles s’appliquant aux élus pour prévenir les ingérences.

Le