Réforme de la justice des mineurs : Dupond-Moretti répond au « courroux » du Sénat

Réforme de la justice des mineurs : Dupond-Moretti répond au « courroux » du Sénat

Le garde des Sceaux était auditionné ce 13 janvier par la commission des lois du Sénat, en amont de l’examen du texte ratifiant l’ordonnance sur la réforme de la justice pénale des mineurs. Il a répondu au tollé qu’a provoqué son courrier adressé aux juridictions sur la nouvelle procédure pénale, avant même la lecture au Sénat.
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Il est des débuts d’audition plus agréables pour les ministres. Celle du garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti, consacrée à la vaste et sensible réforme de la justice des mineurs, a dû débuter par une série de mises au point au sujet de plusieurs brouilles avec le Sénat, ce 13 janvier. Dès le début, le président de la commission, François-Noël Buffet (LR), a rappelé que la méthode, choisie par l’équipe précédente autour de Nicole Belloubet place Vendôme, avait fait grincer des dents au Sénat. Le fonctionnement de la justice des mineurs, codifié en 1945 avant d’être modifié une quarantaine de fois, n’a pas été abordé dans la grande réforme de la justice adoptée début 2019, mais par voie d’ordonnance. C’est en effet un projet de loi ratifiant l’ordonnance, prise le 11 septembre 2019, que le Sénat, après l’Assemblée nationale, s’apprête à examiner en séance fin janvier. « Nous n’avions pas été contents de cette façon de faire », a déploré le sénateur LR du Rhône.

Un peu gêné, Éric Dupond-Moretti n’a pas eu d’autre choix que de préciser qu’il avait été placé devant le fait accompli. « Je ne suis en rien responsable de la façon dont ce texte arrive ici au Sénat, je ne veux pas être le réceptacle de votre courroux », s’est-il défendu. Après avoir insisté sur les nombreuses concertations ayant précédé la rédaction de l’ordonnance, Il a ajouté que le débat démocratique avait « été totalement intégré », avec « un demi-millier » d’amendements à l’Assemblée nationale.

« On m’a dit que c’était une circulaire Canada Dry […] vous aviez raison »

L’opération déminage ne s’est pas arrêtée là, puisqu’un autre accrochage s’est produit ces derniers jours avec la chambre haute, sous la responsabilité du nouveau ministre cette fois. Il s’agit d’un courrier adressé aux juridictions pour présenter les grands changements attendus de la réforme, après la lecture à l’Assemblée nationale. La méthode avait provoqué des crispations au Sénat, et notamment à la présidence de la commission des lois, qui s’est estimée court-circuitée.

Le garde des Sceaux a assuré qu’il ne s’agissait en aucun cas d’une attitude condescendante à l’égard de la haute assemblée. « On m’a dit que c’était une circulaire Canada Dry, je vous ai dit, Monsieur le président que vous aviez raison, elle a vocation à prévenir les professionnels qu’un texte va arriver. Il sera évidemment amodié, transformé, vous ferez le travail législatif que vous avez à faire. Je l’ai écrit dans cette circulaire : je dis que ce n’est pas terminé », s’est-il expliqué. Signe du trouble créé par cette circulaire dite Canada Dry – « ce n’est pas de l’alcool mais ça y ressemble un peu », traduit avec sourire l’ancien ténor du barreau – Éric Dupond-Moretti a tenu à revenir sur le sujet, en cours d’audition. « Vous ne vous interdirez pas, je ne crois pas une seule seconde, pas un seul instant, de déposer les amendements que vous jugerez utiles », a-t-il assuré.

Pour lui, le sens de ce document vise à préparer l’arrivée de la réforme dans les meilleures conditions possibles. « L’une des préoccupations que j’ai entendues à l’Assemblée nationale, que j’entendrais certainement ici au Sénat, c’est : est-ce que les juridictions sont prêtes, au fond ? » Alors que beaucoup de sénateurs doutent du calendrier très bref d’installation de la réforme au 31 mars – vu la profondeur des changements attendus – le garde des Sceaux est convaincu du contraire. « J’affirme que les juridictions sont prêtes à recevoir et appliquer cette réforme ».

La réforme modifie en profondeur la procédure pénale applicable aux mineurs, avec l’introduction d’une césure du procès, c’est-à-dire une procédure en deux temps. L’introduction d’une première dans un délai bref « ne signifie pas la mise en place de la justice expéditive », a martelé le ministre, qui croit que « l’éducatif » est, au contraire, « au cœur de cette réforme ». L’intervention du juge des libertés et de la détention, au détriment du juge des enfants, interpelle aussi la rapporteure du texte au Sénat, Agnès Canayer (LR).

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