Retraites : peut-on avoir recours à un référendum comme l’a évoqué Emmanuel Macron ?
Lundi soir, Emmanuel Macron « n’a pas exclu » le recours au référendum pour « quelque réforme que ce soit », y compris celle des retraites. Souvent évoqué, le référendum législatif tel que prévu à l’article 11, n’a pourtant jamais été utilisé pour une réforme d’ampleur. Explications

Retraites : peut-on avoir recours à un référendum comme l’a évoqué Emmanuel Macron ?

Lundi soir, Emmanuel Macron « n’a pas exclu » le recours au référendum pour « quelque réforme que ce soit », y compris celle des retraites. Souvent évoqué, le référendum législatif tel que prévu à l’article 11, n’a pourtant jamais été utilisé pour une réforme d’ampleur. Explications
Public Sénat

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Emmanuel Macron a fait mine de lâcher du lest sur sa réforme qui est un épouvantail pour la gauche : le recul de l’âge légal à la retraite à 65 ans. Sur BFM TV lundi soir, le président sortant s’est dit prêt à « bouger » sur la réforme des retraites et à « ouvrir la porte" à un report de l’âge de départ à 64 ans, plutôt qu’à 65 ans, « s’il y a trop de tensions » pour « bâtir un consensus ». Interrogé sur l’opportunité du recours au référendum, il déclare ne pas l’exclure « sur quelque réforme que ce soit », y compris celle des retraites.

Comment un tel référendum pourrait-il se mettre en place ? Deux types de référendums sont prévus par la Constitution : le référendum constituant (article 89) et le référendum législatif (article 11). Le premier a été utilisé en octobre 2000 pour la réforme du quinquennat. Le deuxième a été utilisé par exemple en 2005, pour la ratification du traité établissant une Constitution pour l’Europe qui a vu le non l’emporter.

« Souvent utilisé comme argument politique, rarement comme outil juridique »

Le référendum de l’article 11 pourrait, en théorie, être utilisé pour soumettre au peuple un projet de loi portant sur l’âge de départ à la retraite puisqu’il permet au président de la République, « sur proposition du gouvernement ou proposition conjointe des deux assemblées, de soumettre au peuple un projet de loi qui peut porter sur différents sujets ».

A l’origine, les sujets soumis à référendum portaient sur l’organisation des pouvoirs publics, l’autorisation de ratifier un traité international. La révision constitutionnelle de 1995 a élargi le champ aux réformes affectant la politique économique, sociale ou environnementale de la Nation et les services publics y concourant ».

« Le référendum législatif a souvent été utilisé comme argument politique mais rarement comme outil juridique », relève le constitutionnaliste, Jean-Philippe Derosier.

Il comporte, effectivement de nombreux désavantages pour le pouvoir en place. « Le gouvernement se prive du débat parlementaire et des possibilités d’amendements. Le référendum nécessite une campagne assez coûteuse, qui mobilise des fonds publics. Et puis si le gouvernement peut contrôler le débat parlementaire, avec un référendum, il se confronte au risque de rejet de la population, conjugué au risque d’une faible participation. Soit c’est le désert, soit c’est un séisme politique », énumère Jean-Philippe Derosier.

L’article 11 détourné par le général de Gaulle

Par le passé l’article 11 a été utilisé pour ratifier des traités. En 1988, il a été utilisé pour l’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie, en 1961 et 1962 sur l’autodétermination de l’Algérie. En 1962, le général de Gaulle l’avait détourné de son objet pour permettre l’élection du président de la République au suffrage universel direct. A l’époque, le Conseil constitutionnel s’était déclaré incompétent pour contrôler le décret de convocation des électeurs. Ce n’est plus le cas depuis une décision de 2005. (lire notre article)

Marine Le Pen qui propose un projet de loi référendaire sur l’immigration, pourrait donc être confrontée à l’obstacle du Conseil constitutionnel car il implique une modification des premiers articles de la Constitution. Le référendum constituant de l’article 89 nécessite au préalable d’être adopté par les deux chambres en termes identiques. (lire notre article)

 

 

Partager cet article

Dans la même thématique

Retraites : peut-on avoir recours à un référendum comme l’a évoqué Emmanuel Macron ?
2min

Politique

Education nationale : « Je suis malheureux de l’instabilité ministérielle », déclare Jean-Michel Blanquer

Invité de la matinale de Public Sénat, l’ancien ministre de l’Education nationale et auteur de « Civilisation française » (aux éditions Albin Michel) s’est exprimé sur la valse de ministres à l’Education nationale depuis la réélection d’Emmanuel Macron en 2022. Selon lui, « il y aurait dû avoir un ou une ministre après moi, pendant 5 ans ».

Le

General policy speech by Prime Minister at Senate
10min

Politique

Budget : comment le Sénat va réduire l’effort demandé aux collectivités de 4,6 à 2 milliards d’euros

La majorité sénatoriale veut revenir sur l’effort demandé par le gouvernement aux collectivités. Le premier ministre a déjà fait des gestes devant les régions et les départements. « Un premier pas », reconnaît le sénateur LR Stéphane Sautarel, mais insuffisant. Pour compenser l’allègement de l’effort sur les collectivités, la majorité sénatoriale entend renforcer les économies sur d’autres ministères, notamment sur la « jeunesse, la recherche ou la culture ».

Le

7min

Politique

Insécurité dans les territoires d’Outre-mer : « Nous, les maires, nous sommes en première ligne pour lutter, mais on n’a pas de moyens pour le faire »

A la veille de l’ouverture du 107e congrès des maires à Paris, des élus des Outre-mer se sont retrouvés à Issy-les-Moulineaux ce lundi 17 novembre. Alors qu’ils font face à une criminalité et une délinquance grandissantes, dans des territoires en proie au narcotrafic, les maires, aux côtés de la délégation sénatoriale aux Outre-mer, ont plaidé pour un « choc régalien ».

Le

Paris : session of questions to the government at the French National Assembly
6min

Politique

Budget 2026 : quels scénarios dans un calendrier de plus en plus contraint ?

Avec encore plus de 1 500 amendements restant à examiner en une semaine à l’Assemblée sur la partie recettes du projet de loi de finances, le calendrier budgétaire est de plus en plus contraint. Dans une assemblée divisée et avec le renoncement du gouvernement de recourir au 49.3, la possibilité d’une adoption des deux lois de finances avant le 31 décembre 2025 relève presque de la politique-fiction.

Le