Rodéos motorisés : « La loi existe, il suffit de la faire appliquer »

Rodéos motorisés : « La loi existe, il suffit de la faire appliquer »

Alors que deux enfants ont été fauchés à Pontoise à la suite d’un rodéo urbain, les sénateurs Vincent Delahaye (UC) et Jacqueline Eustache-Brinio (LR) jugent les mesures du ministre de l’Intérieur tardives et pas assez ambitieuses.
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Les rodéos motorisés, éternel et terrible sujet de tensions estival, refont leur entrée médiatique après que deux enfants ont été fauchés à Pontoise (Val d’Oise), vendredi 5 août, à la suite de l’une de ces parades mécanisées. Un individu de 18 ans s’est rendu à la justice lundi. Il a été mis en examen et écroué.

Un incident qui a poussé le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, à réagir en annonçant 10 000 opérations de contrôle à venir. Il est aussi demandé que ces inspections ciblent « les axes les plus exposés » selon « les dates et créneaux horaires ».
L’intensification de ces contrôles doit aussi permettre de « procéder à la saisie systématique des engins utilisés » en s’appuyant sur l’usage de vidéoprotection afin « d’identifier les lieux de stockage » des motos ou des quads, en lien avec les bailleurs sociaux et les polices municipales.

Une loi de 2018 a renforcé la lutte contre les rodéos motorisés les faisant évoluer d’une simple infraction au Code de la route à un délit passible de cinq ans de prison et 75 000 euros d’amendes. Insuffisant selon le ministre qui se dit « favorable à l’aggravation des moyens pénaux ».

Interviews croisées du sénateur centriste d’Essonne, Vincent Delahaye, qui fut rapporteur de la loi en 2018, et de la sénatrice Les Républicains du Val d’Oise, Jacqueline Eustache-Brinio, autrice d’un rapport sur le sujet.

Que pensez-vous des instructions annoncées par Gérald Darmanin ?

Vincent Delahaye : Je suis un peu surpris qu’on attende qu’il y ait des accidents très graves pour qu’on réagisse. Cela fait longtemps que ces instructions auraient dû être données.

Jacqueline Eustache-Brinio : Monsieur Darmanin a dit qu’il ferait 10 000 contrôles routiers, très bien. Mais la conséquence va être qu’ils ne vont pas sortir les motos pendant quelques jours et c’est tout. Il faut aller plus loin.
 

La loi de 2018 a fait des rodéos motorisés un délit puni par la loi et a renforcé les peines et amendes, est-ce suffisant ?

V.D : Lorsqu’en 2018, nous avions fait une proposition de loi, qui a été en partie reprise dans le texte de loi, nous avions dit que ce n’est pas un seul texte de loi qui réglerait le problème. La loi existe, il n’y a pas besoin de légiférer davantage, mais seulement de la faire appliquer en donnant des moyens supplémentaires. Il faut accroître la prévention, le contrôle et la répression.

J. E-U : C’est bien d’avoir une loi avec des outils pour pouvoir officiellement utiliser les caméras pour essayer de repérer les gens et de saisir leurs véhicules. Mais on voit bien qu’au bout de 4 ans ça n’a pas fonctionné, il n’y a qu’à voir le nombre d’accidents. Le seul moyen, c’est de saisir les véhicules lors des rodéos.

 

Vous souhaiteriez que les policiers puissent poursuivre directement les auteurs des rodéos, c’est cela ?

J.E-U : Oui, aujourd’hui les policiers respectent une note de service interne de la direction générale de la police qui date de 1999, et qui est reconfirmée par les services de l’Etat régulièrement. Il faut absolument repenser les méthodes autorisées par la police. Est-ce qu’on veut assumer jusqu’au bout et faire comprendre aux délinquants qu’ils mettent leur vie et la vie des autres en danger ? Après il faut en assumer les conséquences, s’ils tombent tant pis. On ne peut pas faire prendre des risques aux autres et pas à soi-même. Ces gens-là pourrissent la vie des habitants par leur comportement et par la pollution sonore. Il faut également donner des directives claires aux policiers afin qu’ils soient protégés lors de ces interventions qui peuvent être plus musclées.

V.D : Lors d’une intervention il n’y a pas forcément besoin d’avoir recours à une course-poursuite, mais il ne faut pas laisser les individus qui jouent ce jeu très dangereux continuer avec ce sentiment d’impunité trop répandu. Et s’il y avait des brigades motorisées qui peuvent les interpeller en flagrant délit, ces délinquants seront plus prudents. Il faut une volonté nationale conjointe entre l’Etat et les municipalités pour informer des sanctions encourues par les délinquants.

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