Sécurité globale : les sénateurs commencent l’examen du texte controversé
Après les députés, les sénateurs examinent pendant trois jours la proposition de loi. De nombreuses mesures font polémique. Outre l’article 24, réécrit par les sénateurs, le texte autorise l’utilisation des drones en de nombreuses circonstances. Il permet à la police de transmettre aux médias ses vidéos tournées lors des manifestations. Il renforce aussi les pouvoirs de la police municipale.

Sécurité globale : les sénateurs commencent l’examen du texte controversé

Après les députés, les sénateurs examinent pendant trois jours la proposition de loi. De nombreuses mesures font polémique. Outre l’article 24, réécrit par les sénateurs, le texte autorise l’utilisation des drones en de nombreuses circonstances. Il permet à la police de transmettre aux médias ses vidéos tournées lors des manifestations. Il renforce aussi les pouvoirs de la police municipale.
Public Sénat

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Les Français ont les yeux rivés sur la crise sanitaire. Mais la proposition de loi (PPL) sur la sécurité globale, qui avait déchaîné les passions à l’automne dernier, n’a pas terminé son parcours législatif. La PPL des députés Jean-Michel Fauvergue et Alice Thourot est examinée par le Sénat en séance, à partir de ce mardi, et pour trois jours. 368 amendements seront à examiner.

Si elle est moins médiatique, la mobilisation contre le texte ne s’est en réalité jamais arrêtée. La coordination « stop sécurité globale » a entrepris une action symbolique, ce mardi matin, Place de la République, à Paris. Une action filmée par l’association Attac, qui était présente. Une manifestation est prévue devant le Sénat cet après-midi.

Réécriture de l’article 24

Les sénateurs, qui entendent équilibrer le texte en faveur des libertés publiques, vont commencer par la discussion générale cet après-midi, à partir de 14h30, avant d’enchaîner sur l’article 1 qui crée une expérimentation renforçant les pouvoirs de la police municipale. Les sénateurs relèvent de 3 à 5 ans la durée de l’expérimentation et le seuil nécessaire à une commune pour intégrer l’expérimentation est abaissé de 22 à 15 agents municipaux. Ils ont aussi supprimé la possibilité pour les policiers municipaux de procéder à des saisies. La liste des infractions qu’ils seraient autorisés à constater est aussi réduite.

Tout le monde se souvient de l’article 24, qui avait concentré les critiques. L’ambition des rapporteurs Marc-Philippe Daubresse (LR) et Loïc Hervé (UDI) a été de faire redescendre la pression, en trouvant une nouvelle écriture qui assure la sécurité des policiers – l’objectif de l’article – sans mettre à mal la presse. Exit donc toute référence à la loi sur la liberté de la presse de 1881. Les sénateurs ont créé un nouveau délit de « provocation à l’identification ». Une nouvelle écriture sur laquelle pourrait s’appuyer le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin.

Jusqu’où autoriser l’usage des drones ?

L’article 22 est tout aussi important, si ce n’est plus. Il donne un cadre à l’utilisation des drones par les forces de police. Leur utilisation se faisait jusqu’ici hors de tout cadre légal… C’est pourquoi la préfecture de police de Paris s’est vue, à deux reprises, intimer l’ordre de laisser ses drones au sol, sur décision du Conseil d’Etat. La PPL vise à donner ce cadre manquant. Il est large. Le gouvernement veut permettre l’utilisation des drones lors des manifestations, pour surveiller les littoraux, les frontières, la prévention d’acte terroriste, la protection des bâtiments, mais aussi pour réguler les flux de transports et pour « le constat des infractions et la poursuite de leurs auteurs par la collecte de preuves ». Un dernier cas qui englobe potentiellement de nombreuses situations et ouvre la porte à une large utilisation des drones sur la voie publique.

Lors de l’examen en commission, les sénateurs ont visé plutôt les « crimes ou délits punis d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale à cinq ans », et ont écarté les enregistrements sonores, la reconnaissance faciale et l’interconnexion des drones. Leur utilisation ne pourra s’effectuer que « lorsque les circonstances font craindre des troubles à l’ordre public d’une particulière gravité ». Les rapporteurs ont également fait adopter un régime d’autorisation préalable par le préfet ou le procureur, avant toute utilisation.

Les sénateurs ne veulent pas de « guerre des images »

L’article 21, qui permet aux forces de l’ordre de filmer lors des manifestations par les caméras-piétons, puis de transmettre aux médias ces vidéos, a lui carrément été supprimé par les sénateurs. Les sénateurs craignent une « guerre des images », où le ministère de l’Intérieur deviendrait en quelque sorte une agence de presse, pourvoyeuses d’images officielles.

L’article 23 devait mettre fin au bénéfice des crédits de réduction de peine aux détenus coupables d’infractions sur les forces de sécurité intérieure. Les sénateurs l’ont modifié et recentré sur les infractions les plus graves (meurtre, tortures, actes de barbaries) et ont étendu le champ de la circonstance aggravante aux magistrats, douaniers, gardiens de prison, pompiers ou « toute autre personne dépositaire de l’autorité publique ».

L’article 25 fera aussi débat. Il permet à un policier ou à un gendarme hors service d’entrer avec son arme dans les établissements recevant du public (ERP), comme une salle de concert ou un festival. Le monde de la culture est vent debout contre cette disposition. Si la mesure a été conservée en commission, le président UDI de la commission de l’éducation et de la culture, Laurent Lafon, a déposé un amendement de suppression pour la séance.

Partager cet article

Dans la même thématique

Municipales 2026 : pourquoi le prochain mandat des maires pourrait durer sept ans, au lieu de six
4min

Politique

Municipales 2026 : pourquoi le prochain mandat des maires pourrait durer sept ans, au lieu de six

La question d’un report des élections municipales de 2032 est à l’étude au ministère de l’Intérieur, en raison de la proximité d’un trop grand nombre de scrutins, notamment la présidentielle. Si le calendrier devait être révisé, et avec lui la durée du mandat des maires élus l’an prochain, cela nécessiterait une loi. Ce serait loin d’être une première sous la Ve République.

Le

French L1 football match between Olympique Lyonnais (OL) and Le Havre AC
8min

Politique

Salaires exorbitants, conflits d’intérêts, droits TV : retour sur la commission d’enquête qui a mis un carton rouge au Foot business

Série- Les enquêtes du Sénat. C’est une commission d’enquête qui a connu de nombreux soubresauts. Alors que le football professionnel traversait une crise majeure liée aux revenus des droits TV, les sénateurs Laurent Lafon et Michel Savin ont lancé une commission d’enquête pour encadrer le sport professionnel. Entre auditions, visite du siège de la Ligue de football et révélations de Complément d’enquête, retour sur les préconisations de la commission d’enquête pour stopper le Foot business.

Le

Le Mans Manifestation des maires de la Sarthe
4min

Politique

Elections municipales : il n’y a jamais eu autant de maires démissionnaires depuis 2020

Le nombre d’édiles qui renoncent à poursuivre leur mandat n’a jamais été aussi élevé, selon une étude de l'Observatoire de la démocratie de proximité AMF-Cevipof/SciencesPo. Les démissions ont été multipliées par quatre depuis 2020 par rapport à la période 2008-2014. Les tensions au sein des Conseils municipaux sont invoquées comme première cause de renoncement.

Le

capture La bomba
3min

Politique

Les « films de l’été » 5/8 : « La bombe atomique a modifié à jamais le monde dans lequel nous vivons »

Pour les Américains, la bombe atomique était LA solution nécessaire pour gagner la Seconde Guerre mondiale. Elle est devenue par la suite un problème environnemental, politique et moral. Comment vivre avec une invention capable de détruire la planète ? Étayé d'images et de vidéos déclassifiées, mais aussi d'archives poignantes consacrées aux victimes d'Hiroshima et de Nagasaki, « La bombe », du cinéaste américain Rushmore DeNooyer, diffusé cet été sur Public Sénat, convoque également les témoignages d'anciens hommes politiques, d'ingénieurs du projet Manhattan et d'historiens pour raconter cette histoire scientifique, politique et culturelle.

Le