« Si une seule personne devait être privée de ses droits à cause de la numérisation, ce serait un échec » prévient Jacques Toubon
Jacques Toubon, Défenseur des droits, était entendu par la commission des affaires sociales du Sénat, dans le cadre de son rapport sur la dématérialisation des services publics.

« Si une seule personne devait être privée de ses droits à cause de la numérisation, ce serait un échec » prévient Jacques Toubon

Jacques Toubon, Défenseur des droits, était entendu par la commission des affaires sociales du Sénat, dans le cadre de son rapport sur la dématérialisation des services publics.
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Par Marion D'Hondt

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Selon le Défenseur des droits, la dématérialisation est à la fois « un levier extraordinaire », mais aussi « un risque de rupture d’égalité » face aux services publics. Ce risque de rupture est important pour les personnes en difficulté et celles en situation de handicap.

Jacques Toubon constate que la numérisation favorise « la lutte contre le non-recours ». Mais, pour ce faire, elle nécessite une connexion internet et des équipements informatiques. Le Défenseur des droits rappelle que 0,7% des Français n’ont pas accès à internet et que 19% des Français n’ont pas d’ordinateur. Sans parler de la situation des Outre-mer, qui constitue « une discrimination fondée sur le lieu de résidence ».

Sur l’accompagnement des personnes en difficulté, il rappelle qu’ « un tiers des Français se déclare peu ou pas compétent pour utiliser un ordinateur ». Pour le Défenseur des droits, les Maisons de services au public sont « une réponse insuffisante », car elles accueillent mais n’accompagnent pas. Ainsi, un système de vidéoconférence pourrait être utile pour avoir un agent face à soi.

Quand les services publics sont défaillants, parfois, ils sont repris par le privé, qui offre les mêmes prestations mais payantes. Contre ces opérateurs, « l’interdiction n’est pas la solution […] la solution c’est que les services publics fassent leur boulot ». D’autant plus que, dans le privé, le « risque de discrimination » existe et a été constaté, chez les télésecrétariat médicaux par exemple.

Jacques Toubon ne se prononce pas sur la responsabilité budgétaire de l’accompagnement. L’essentiel étant de « ne pas rajouter des inégalités entre les territoires ». Il propose également la mise en place d’un « identifiant unique », pour suivre l’usager dans toutes ses démarches. Il poursuit : « La vraie réponse est de partir de l’usager. Savoir si l’usager le plus en difficulté sera en mesure d’accomplir la tâche. »

Pour les personnes en situation de handicap, que le Défenseur des droits qualifie de « laissées pour compte » des services publics, tout est à revoir. Sévère, il estime que « la plupart des sites internet des services publics ne sont pas aux normes ». Les sites ne prennent pas non plus en compte les majeurs protégés, avec un accès unique aux comptes qui « nie » leur existence.

Ainsi, la numérisation permet « un accès aux services publics pour tous », mais ne doit pas pallier leur disparition. Elle ne doit pas non plus se faire « à marche forcée ». Pour Jacques Toubon, « si une seule personne devait être privée de ses droits à cause de la numérisation, ce serait un échec », ce serait même « un recul du service public et du respect des droits et libertés ».

Il conclut, s’adressant aux sénateurs : « C’est votre mission de législateur que la République soit la même pour tous. »

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