Simone Veil, pour la première fois ses archives personnelles parlent
Pour la plupart ils ne sont pas connus, n’ont jamais été vus. Et pourtant les documents issus des archives privées de Simone Veil racontent de manière inédite l’histoire de celle que les Français connaissent avant tout comme celle qui a autorisé l’interruption de grossesse en France. Réunis pour la première fois dans le documentaire « Simone Veil, mémoire d’une immortelle » ils nous font entrer dans le récit d’une vie exceptionnelle.
Le carton d’archives ressemble à tous les autres. Gris résistant à l’eau, et ignifugé. Constance de Vergnette l’ouvre avec soin. De l’intérieur la conservateur en patrimoine, sort les premières archives. Nous sommes en 1960 et Simone Veil est magistrate. Inconnue du grand public. Le document est maintenant étalé sur la table. Il s’agit d’un procès-verbal, comme des centaines rédigés chaque jour dans l’administration.
Ce jour-là, la jeune Simone Veil tient le stylo. C’est elle qui préside la réunion. Il y est question des conditions de détention des prisonniers, et particulièrement celles des détenus mis à l’écart. Dans la France de l‘après-guerre le sujet n’est pas prioritaire. Et pourtant les conditions de détention sont désastreuses, inhumaines, « dignes du Moyen Âge » comme Simone Veil le dira dans ses mémoires*. À la page sept du procès-verbal, après avoir évoqué la nécessité de porter à une heure les promenades pour les prisonniers, une autre recommandation interpelle. « Si la cellule, dit-elle n’est pas chauffée, le puni doit pouvoir garder à sa disposition durant la journée un nombre suffisant de couvertures (…) ». Comment ne pas y lire une attention particulière, de la jeune magistrate, portée au sort des condamnés, à ceux qui punis et privés de liberté doivent néanmoins garder une part de dignité si on veut pouvoir un jour espérer qu’ils se reconstruisent ?
Simone Veil : les hommes « en général ont une plus grande indulgence inconsciente à l’égard des « bourgeois déchus ».
Simone Veil déportée en 1944 avec sa mère, et sa sœur Madeleine, d’abord à Auschwitz puis à Bergen-Belsen a connu les humiliations, a vu les corps amaigris et nus, les dénigrements systématiques, et la négation de l’humanité de chacun. Un sentiment insupportable qui la pousse à son retour en France à entamer des études de droit et à choisir l’administration pénitentiaire pour son premier poste : « Décidée depuis mon adolescence à être avocat (…) l’expérience de la déportation n’a fait que confirmer cette intention espérant pouvoir faire quelque chose pour les condamnés ou ancien condamnés victimes de leur passé, de leur milieu, et de leur misère » raconte-t-elle dans un document inédit trouvé dans ses archives, un questionnaire dix pages dactylographiées, dans lesquelles la future ministre de Valéry Giscard d’Estaing consigne ses engagements.
Extrait du documentaire : « Simone Veil, Mémoire d'une immortelle »
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Justice, égalité homme femmes tout y est dit. « Les femmes sont-elles plus influençables que les hommes pour rendre la justice ? » demande l’administration ? Simone Veil répond : « Les hommes sont très influencés par la morale bourgeoise classique, autorité paternelle et maritale, respect des enfants et de la femme pour l’homme (…) on reproche souvent aux femmes d’être sensibles, sentimentales et facilement influencées c’est pourtant ce que je reproche aux hommes au comité des libérations conditionnelles (…) enfin sensibilité beaucoup plus grande et en général plus grande indulgence inconsciente à l’égard des « bourgeois déchus ».
Réponse de Simone Veil au questionnaire relatif à l’exercice de la magistrature, décembre 1960
Attenante aux quais de déchargement, dans la salle des versements, Constance de Vergnette trie avec application et curiosité les nouveaux documents arrivés la veille. Des ultimes pièces que l’ancienne ministre de la Santé avait gardées jusqu’au dernier moment chez elle : comme par exemple le texte qu’elle prononcera à la tribune de l’Assemblée nationale en novembre 1974, pour défendre son texte sur l’interruption volontaire de grossesse, ou encore les notes prises au stylo bic rouge pendant les débats sur un banal petit bloc-notes. Des remarques manuscrites qui sonnent parfois comme des flèches… lancées aux hommes. Comme ce 24 décembre 1974, lors du Conseil des ministres. Le président Valéry Giscard d’Estaing élu six mois plus tôt se lance devant ses ministres dans un bilan de son action notamment à l’égard des femmes : « Un grand succès (…) on a donné l’impression qu’on était en avance en ce domaine » une phrase rapportée à côté de laquelle Simone Veil s’empresse d’ajouter un cinglant, « ce n’est pas vrai il suffit de voir ces misogynes autour de la table ».
Simone Veil en 1974 « Ce n’est pas vrai, il suffit de voir ces misogynes autour de la table » à propos du Conseil des ministres.
La conservatrice du patrimoine Constance de Vergnette dans l'exploration du fonds Simone Veil
Pierre Bonte-Joseph
Preuve de son lien unique avec les Français, elle avait aussi conservé des centaines de lettres reçues en 1974. Des témoignages d’anonymes qui la félicitent pour le texte tout juste voté. Et parmi elles celle de l’évêque auxiliaire de Paris à l’époque, Daniel Pezeril, qui la remercie « d’avoir accepté un amendement qui préserve la liberté de conscience de directeurs d’établissement privés » de pratiquer l’IVG, avant d'ajouter « j’imagine sans peine ce que ces jours représentent pour vous, soyez assurée que les grands débats sont aussi ceux où se noue une profonde estime pour les personnes qui les assument avec toute leur humanité ».
Au total ce sont près de 80 mètres linéaires de cartons d’archives « privées » qui sont conservés sur le site des Archives nationales à Pierrefitte. Des notes écrites de la main de Simone Veil, des coupures de presses, des courriers qu’elle a reçus. Des bribes qui rassemblées racontent l’histoire d’une femme au destin exceptionnel. « Quand on a reçu les archives de la famille on a été étonné de voir à quel point tout était déjà rangé avec soin. Thème par thème. Simone Veil, classait ses documents, on peut dire qu’elle souhaitait transmettre sa mémoire. Toutes les époques sont renseignées. Si parfois dans les archives qui nous arrivent ici certaines sont lacunaires, Simone Veil a documenté toute sa vie » raconte Françoise Banat Berger la directrice des archives nationales.
Une attention qui montre le soin que Simone Veil aura eu de transmettre sa mémoire, celle d’une femme capable de se relever et de ne pas désespérer de l’humanité. Si les cendres du couple seront bientôt accueillies au Panthéon, sa mémoire et son héritage sont eux conservés dans les archives de la nation à Pierrefitte.
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Un documentaire réalisé par Pierre Bonte-Joseph, à voir sur Public Sénat le samedi 30 juin à 21h30 ; ou le dimanche 1er juillet à 12h30, jour de la panthéonisation de Simone Veil.
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