« Soixante-quinze feuillets et autres manuscrits inédits », la genèse d’« A la recherche du temps perdu »

« Soixante-quinze feuillets et autres manuscrits inédits », la genèse d’« A la recherche du temps perdu »

À l’occasion de la publication de textes inédits de Marcel Proust, Guillaume Erner reçoit deux spécialistes de l’écrivain cette semaine dans Livres et vous, Antoine Compagnon, professeur de littérature spécialiste de l’œuvre de Proust et Jocelyne Sauvard, écrivaine dont le livre sur la relation entre le célèbre auteur et sa gouvernante vient de paraître aux éditions du Rocher.
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Par Nils Buchsbaum

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« Lorsque j’ai appris l’existence de ces cahiers, j’étais très étonnée et impatiente… » En bonne passionnée de l’œuvre de Marcel Proust, Jocelyne Sauvard a lu avec beaucoup de bonheur et d’intérêt les « Soixante-quinze feuillets et autres manuscrits inédits » publiés récemment aux éditions Gallimard. Elle raconte à Guillaume Erner cette expérience littéraire : « Quand je les ai eues en main, j’ai été très touchée par le fait qu’il donne des précisions que l’on n’avait pas sur sa famille. Il emploie par exemple le vrai prénom de sa grand-mère, qui rappelle celle de l’œuvre « Du côté de chez Swann ». Il fait tout un relevé des expressions de cette grand-mère qui m’ont énormément plu, alors que plus tard il prend la distance d’un écrivain, qui n’écrit pas une autobiographie ».


« Dans les « Soixante-quinze feuillets », on voit la matrice et les embryons de l’œuvre « A la recherche du temps perdu »

Antoine Compagnon a lui aussi redécouvert ces feuillets, même si leur existence était connue. « Ces écrits datent de la fin de l’année 1907, début 1908 et sont un premier embryon de « A la recherche du temps perdu », précise-t-il.
Dans ces textes à caractère très autobiographique, on en apprend aussi beaucoup sur le style Proust et sur ses techniques d’écriture. En effet, à l’époque des « Soixante-quinze feuillets », Marcel Proust écrit encore sur des feuilles, il y a une bascule quelques mois plus tard quand il se met à écrire dans des cahiers. Antoine Compagnon y voit « une rupture essentielle dans l’atelier de Proust puisque toute l’œuvre « A la recherche du temps perdu » est écrit sur des cahiers d’écolier ». Proust écrit de manière fragmentaire et ensuite il monte les fragments. Ainsi, « dans les « Soixante-quinze feuillets » on voit ces différents embryons qui correspondent à différents moments, l’écrivain ne sait pas alors comment il va les monter. Ils sont une matrice, une sorte de noyau et ensuite Proust fait des scénarios pour monter ces morceaux ».


Céleste, un personnage central dans la vie de Marcel Proust

Jocelyne Savard s’est aussi délectée des références à Céleste, la gouvernante de Proust, elle qui en a fait le sujet de son livre « Céleste et Marcel, un amour de Proust ».
« Céleste est un personnage central dans la vie de Marcel Proust. Elle vient de Lozère, son mari est le chauffeur de l’auteur. Il présente sa jeune femme qui s’ennuie de sa région, de sa mère à Marcel Proust, quand La guerre éclate son mari part au Front et Céleste vient vivre boulevard Haussmann. La vie se poursuit alors entre Céleste est Marcel Proust pendant huit ans, de 1914 à 1922 ».
Céleste et Marcel Proust nouent une relation singulière pendant ces nombreuses années, « elle voit la vie et le travail de forçat de cet homme étrange. Elle l’assiste au quotidien, écoute le récit de ses nuits de fête et lui apporte du café lors de ses nuits d’écriture ».

Retrouvez l’intégralité de l’émission ici.

« Céleste et Marcel, un amour de Proust » de Jocelyne Sauvard – Ed. du Rocher.
« Un été avec Proust » d’Antoine Compagnon – Ed. Equateurs Parallèles

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