Soupçons de détournements de fonds au Sénat : l’ex-ministre Henri de Raincourt mis en examen

Soupçons de détournements de fonds au Sénat : l’ex-ministre Henri de Raincourt mis en examen

Le sénateur LR Henri de Raincourt a été mis en examen jeudi dans l’enquête qui porte notamment sur les fonds qu’il a perçus des caisses de l’ex-groupe UMP au Sénat, en plus de sa rémunération, y compris lorsqu’il était ministre sous Nicolas Sarkozy. Le sénateur LR Jean-Claude Carle, ancien trésorier du groupe UMP de la […]
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Par Public Sénat (avec AFP)

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Le sénateur LR Henri de Raincourt a été mis en examen jeudi dans l'enquête qui porte notamment sur les fonds qu'il a perçus des caisses de l’ex-groupe UMP au Sénat, en plus de sa rémunération, y compris lorsqu'il était ministre sous Nicolas Sarkozy.

Le sénateur LR Jean-Claude Carle, ancien trésorier du groupe UMP de la Haute assemblée, a aussi été mis en examen dans cette enquête, a-t-on appris mercredi, confirmant une information du Dauphiné Libéré.

4.000 euros par mois

Depuis novembre 2013, des juges financiers enquêtent sur des soupçons de détournements de fonds publics au Sénat au profit d'élus de droite. Convoqué devant un magistrat du pôle financier de Paris, le sénateur Les Républicains a été mis en examen pour « recel de détournements de fonds publics », a annoncé à l'AFP son avocat Antoine Beauquier.

Cette mise en examen ne nécessite pas la levée de l’immunité parlementaire. « L'engagement de poursuites contre un parlementaire n'est soumis à aucune autorisation particulière, dès lors que ces poursuites ne comportent pas de mesure privative ou restrictive de liberté » précise le site du Sénat. Autrement dit, si l’enquête nécessitait une garde-à-vue, il serait alors nécessaire de lever l’immunité parlementaire.

Le site d'information Mediapart avait révélé que le sénateur de l'Yonne avait touché, en plus de sa rémunération, quelque 4.000 euros par mois de 2008 à 2011 du groupe de l'ex-UMP au Sénat. Des versements qui ont perduré après son départ du Sénat lorsqu'il est entré au gouvernement de François Fillon, à partir de juillet 2009, d'abord comme ministre des Relations avec le Parlement, puis de la Coopération de novembre 2010 à mai 2012.

Henri de Raincourt conteste tout détournement

Henri de Raincourt conteste tout détournement. Pour son avocat, « il s'agit de fonds qui lui ont été versés en contrepartie de sommes qui lui étaient dues par le groupe auquel il appartenait au titre de remboursement de crédits d'assistant et d'indemnités de président de groupe ».

« Cette affaire met en cause une pratique ancienne, autorisée par le bureau du Sénat depuis 1988, qui consiste pour un sénateur à déléguer à son groupe une partie de ses crédits d'assistants qu'il n'utilise pas », a estimé l'avocat, soulignant l'autonomie financière des groupes parlementaires.

« Les groupes politiques s’administrent librement »

Interrogé en 2014 par Public Sénat lors de la révélation de l’affaire, Henri de Raincourt avait apporté une explication similaire. Il évoquait des crédits d’assistant non-utilisés et le financement d’une ancienne famille politique de la droite, celle des Républicains indépendants, fusionnée avec les autres chapelles lors de la création de l’UMP.

« Il faut prendre en compte qu’en 2003, lorsque l’UMP s’est créée, elle s’est constituée à partir d’un certain nombre de familles politiques, qui chacune auparavant avaient une existence propre et institutionnelle dans le cadre de groupes politiques. Après la création de l’UMP, ces familles politiques ont conservé une vie associative à l’intérieur d’une nouvelle institution qui était le groupe UMP. Le financement de ces associations est assuré, comme la Constitution le prévoit expressément, car elle dit que les groupes politiques s’administrent librement. Il est donc parfaitement à loisir à un groupe politique d’accorder une subvention à une association composée par des sénateurs, pour que ceux-ci aient une action politique », expliquait Henri de Raincourt.

« Le bureau du Senat a parfaitement délibéré et fixé les conditions dans lesquelles les sénateurs peuvent demander la restitution de crédits pour la rémunération d’assistants non-utilisé au groupe politique auquel ils appartiennent. C’est une mécanique qui est classique et totalement transparente. S’il y a un problème et si ça devait être illégal, il faut nous le dire. (…) Soyons calme et serein, c’est un non-événement », ajoutait le sénateur. Regardez la vidéo :

Affaire du groupe UMP du Sénat : les explications de Henri de Raincourt
07:19

« Doutes sérieux »

En février 2015, l'élu avait admis avoir perçu ces fonds au titre de « remboursements » et affirmait que les sommes reçues lorsqu'il était ministre correspondaient à son activité antérieure en tant que sénateur.

De son côté, la Haute Autorité pour la transparence de la vie politique avait décidé de transmettre son cas à la justice en juillet dernier, au vu de « doutes sérieux » sur ses déclarations qui ne mentionnaient pas ces versements mensuels. Entendu également par le juge sur ces « faits d'omission de déclaration de patrimoine à la Haute Autorité et de blanchiment de ces sommes », le sénateur a finalement été placé sous le statut plus favorable de témoin assisté dans cet autre volet, selon Me Beauquier.

URS et Crespi

Les investigations sur des soupçons de détournements de fonds au Sénat avaient démarré en juillet 2012 après un signalement de la cellule antiblanchiment de Bercy, Tracfin. Après une enquête préliminaire, le parquet de Paris avait ouvert une information judiciaire pour abus de confiance et blanchiment, avant d'élargir l'instruction aux soupçons de détournements de fonds publics.

Les enquêteurs s'intéressent à des versements remis à des sénateurs, en plus de leur rémunération, depuis deux comptes du groupe UMP à la chambre haute, et par le biais de deux associations, l'Union républicaine du Sénat (URS) et le Cercle de réflexion et d'études sur les problèmes internationaux (Crespi). Toutes deux alimentées par des fonds du groupe sénatorial, et notamment pour l'URS, à hauteur de 400.000 euros entre 2009 et 2012, leur réelle utilité pose question aux yeux des enquêteurs.

L'ancien secrétaire général de l'URS François Thual avait été le premier mis en examen, en juillet 2015. Il avait témoigné dans Le Monde sur l'existence d'un système de financement en cascade, un récit qu'il a confirmé à l'AFP : « J'avais pour habitude de tirer entre 5.000 et 6.000 euros par mois sur l'un des deux comptes de l'URS, que j'allais chercher à la banque et que je remettais ensuite au collaborateur de M. Carle ».

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