Transports : « L’Etat doit s’engager à compenser » les pertes financières liées au covid-19, demandent les régions

Transports : « L’Etat doit s’engager à compenser » les pertes financières liées au covid-19, demandent les régions

Le premier ministre a reçu les présidents de région, ce lundi, à Matignon. Ils alertent sur les centaines de millions d’euros de pertes dans les transports, suite à l’épidémie. Du côté de Matignon, on veut miser sur la formation des chômeurs. Les régions ont « reçu l’engagement qu’elles seront associées au plan d’investissement France 2030 », explique Carole Delga, présidente de Régions de France.
Public Sénat

Temps de lecture :

7 min

Publié le

Mis à jour le

A croire qu’ils ne se quittent plus, ou presque. Xavier Bertrand et Valérie Pécresse, quasi côte à côte, derrière les tables d’un café parisien, près de Matignon. Nouvelle image partagée, après un dîner, la semaine dernière pour la rentrée des députés LR. « Entre Valérie et moi, c’est La Réunion ! » lance avec le sourire le président des Hauts-de-France. Il parle d’Huguette Bello, présidente de la région de l’île de La Réunion, longtemps membre du Parti communiste réunionnais.

Explication de ces nouvelles retrouvailles : les présidents de régions ont été reçus ce lundi, en fin d’après-midi, par le premier ministre. L’association des Régions de France, présidée par la socialiste Carole Delga, tient une conférence de presse quelques minutes après la rencontre. Excepté ce clin d’œil à la course élyséenne à droite, c’est plutôt de décentralisation, de compétence, de formation et de transports dont on parle.

« Reconversion » de la filière automobile

Un sujet central a été évoqué : celui de l’emploi. En annonçant à la presse la rencontre la semaine dernière, Jean Castex avait insisté sur la question de la formation professionnelle et la volonté de « renforcer la formation » des demandeurs, alors que 300.000 emplois sont non pourvus. Du côté des régions, on insiste sur la nécessité de ne pas oublier les filières locales. On entend être dans la boucle des discussions. Point qui semble en partie entendue, du moins sur le principe.

xb_2_regions_de_france.jpg

« On a reçu l’engagement que les régions seront associées au plan d’investissement France 2030, avec un volet aéronautique » et pour « la filière automobile », avec la question de la « reconversion », explique Carole Delga, qui préside la région Occitanie. Elle attend « un plan d’une plus grande ampleur ». Des concertations, pilotées par le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, et les régions, vont s’engager sur ce point.

Le gouvernement va présenter fin septembre « un plan » sur les compétences

La présidente de l’association a profité de la réunion pour rappeler une demande des régions, qui n’est pas nouvelle : « Avoir la coordination du service public de l’emploi pour la région, avec la question de la formation ». Carole Delga compte sur « la loi 3DS », dont les députés vont s’emparer avant la fin de l’année, après les sénateurs, pour répondre aux attentes des régions. Pour François Bonneau, président PS du Centre Val-de Loire, elles ne peuvent pas « avoir la responsabilité d’une partie de l’orientation, du développement économique et ne pas être dans ce carrefour essentiel » de la politique de l’apprentissage.

Le gouvernement entend bien investir sur le volet des compétences et de la formation. Du côté de Matignon, on explique que « le premier ministre a annoncé des fonds supplémentaires, dès 2021, mais aussi pour 2022 et 2023 ». La ministre du Travail, Elisabeth Borne, va « creuser les différentes pistes. Un plan dans les compétences sera annoncé dès la fin du mois », précise-t-on à Matignon.

Les régions veulent « un renflouement de toutes les lignes de transports »

Autre sujet, en haut la pile des demandes des régions : les pertes financières liées à la gestion des transports, en raison des conséquences de l’épidémie de covid-19. Plusieurs régions sont concernées, à commencer par l’Ile-de-France. « Pour nous, il ne peut pas y avoir de sortie de la crise covid sans compensation des pertes pour les autorités organisatrices des mobilités. C’est ce qui a été fait dans tous les pays. On ne peut pas dire quoi qu’il en coûte et laisser de côté la question des mobilités, qui ont été extrêmement impactées par les confinements et le télétravail », alerte Valérie Pécresse, qui attend « un renflouement de toutes les lignes de transports, […] à hauteur de 50 % de subvention et 50 % en prêts et avances remboursables. Cette compensation est une exigence et une exigence morale, l’Etat doit s’engager à cette compensation ».

Pour la présidente de l’Ile-de-France, « on ne peut pas parler de France 2030 sans parler de l’investissement en infrastructure de transports. […] Le sujet des transports ne peut pas être exclu. Aujourd’hui, l’Etat nous dit, on est prêt à contractualiser avec vous tout, sauf le transport. Ce n’est pas acceptable ». Le sujet « ne concerne pas que l’Ile-de-France », ajoute le centriste Hervé Morin, qui préside la Normandie. « Pour certaines régions, le déficit observé est de 50 % de ce que nous payons annuellement, pour faire fonctionner nos trains. C’est absolument hors de portée pour nos régions », alerte à son tour François Bonneau.

Île-de-France Mobilités, présidé par Valérie Pécresse, a demandé fin juillet à l’État une subvention de 1,3 milliard d’euros pour compenser les pertes anticipées pour 2021. Hors Ile-de-France, la perte de recettes s’élève à 650 millions d’euros pour 2020. Les régions attendent des réponses sur cette question de la perte des recettes tarifaires, lors de leur congrès du 30 septembre. Mais on avoue ne « pas être trop optimiste… »

Le gouvernement veut donner la « priorité » à l’investissement

A raison. « La priorité a été donnée, pour la mobilité et le travail, à l’investissement », explique-t-on à Matignon, où on prévient qu’« il ne faut pas donner l’impression que la période est propice à ce qu’il ait une demande, et qu’on y réponde en dégageant des crédits ». Si le Premier ministre a annoncé la semaine dernière 400 millions d’euros pour les transports, lors du congrès de France urbaine, il s’agit de « redéploiement de crédits du plan de relance », en raison de la sous-utilisation de certaines lignes budgétaires. « Le gouvernement est plus sur une ligne de soutien à l’investissement. C’est là-dessus qu’on va travailler avec les régions », précise-t-on. Comprendre, pas sur le reste. Le quoi qu’il en coûte, c’est fini, petit à petit. Il n’y aura pas forcément de cadeau, malgré « la période préélectorale présidentielle, avec des amoncellements de promesses faits par le gouvernement, mais sans engagement concret », pointe Valérie Pécresse.

La présidente de l’Ile-de-France et celui des Hauts-de-France, qui visent une autre présidence, sont cependant eux aussi en campagne. On leur demande s’ils seront capables de mener cette dernière, tout en assurant leur fonction à la tête des régions. Xavier Bertrand, qui semble avoir déjà prévu sa réponse, répond du tac au tac : « Posez la question à Emmanuel Macron comment il va faire ». « Comment il fait déjà », ajoute Valérie Pécresse. La conférence de presse à peine terminée, le président des Hauts-de-France, qui n’a pas pris la parole sur les sujets du jour, file. Il est attendu sur une chaîne info. Mais semble déjà ailleurs.

Dans la même thématique

Blois: Olivier Faure arrives at PS summer universities
7min

Politique

Après la nomination de Michel Barnier, les secousses continuent au PS

Depuis la nomination de Michel Barnier à Matignon, la ligne du Parti socialiste opposée à Olivier Faure multiplie les prises de parole tenant sa direction pour responsable dans l’échec de la nomination de Bernard Cazeneuve. Une accusation dont elle se défend, alors que le parti à la rose souhaite peser davantage à gauche.

Le

Paris : Michel Barnier a l hopital Necker
12min

Politique

Quels ministres au gouvernement ? Michel Barnier face au « casse-tête » des nominations

Le nouveau locataire de Matignon consulte en vue de la nomination de son gouvernement. Côté LR, le nom du patron des sénateurs de droite, Bruno Retailleau, revient avec insistance. « Une hypothèse plus que possible », avance un sénateur LR, selon qui « on lui a demandé ». Mais rien n’est encore fait. Si des macronistes seront de la partie, les choses semblent bouchées à gauche.

Le

14th day of action against pension reform
5min

Politique

Réforme des retraites : face aux demandes d’abrogation, Michel Barnier joue la carte de l’« amélioration »

Cela pourrait être le premier obstacle du gouvernement Barnier, avant même l’adoption du budget 2025 d’ici la fin de l’année. Les députés du Rassemblement national ont confirmé qu’ils entendaient déposer, dans le cadre de leur niche parlementaire prévue le 31 octobre, un texte d’abrogation de la réforme des retraites. Du côté du Nouveau Front populaire, qui proposait le retour de la retraite à 60 ans dans son programme, l’idée de devancer le RN en mettant une proposition similaire à l’ordre du jour dès l’ouverture de la session ordinaire à l’Assemblée fait aussi son chemin. Rien n’assure toutefois que les deux familles politiques joindraient leurs voix pour faire adopter un tel texte. « Nous ne serons pas condamnés à voter la proposition de loi de ces hypocrites, qui sont responsables du fait qu’aujourd’hui nous avons un partisan de la retraite à 65 ans à Matignon », fustigeait le sénateur communiste Ian Brossat, invité de la matinale de Public Sénat ce 9 septembre. Quelques minutes plus tard, sur le même plateau, le député Rassemblement national Sébastien Chenu rétorquait, accusant la gauche de « sectarisme ». Mathématiquement, la réforme des retraites, adoptée dans la douleur au mois de mars 2023, trouve tout de même une majorité contre elle à l’Assemblée. Face à ce constat, le nouveau Premier ministre Michel Barnier a donc tenté d’arrondir les angles en annonçant le 6 septembre, sur le plateau de TF1, son souhait d’ « ouvrir le débat sur l’amélioration de cette loi pour les personnes les plus fragiles », sans pour autant « tout remettre en cause ». « Il faut rouvrir les discussions, mais pas pour remettre en cause la réforme » Quelles « améliorations » le gouvernement Barnier pourrait-il apporter au texte ? Au sein de la droite et du bloc central, le retour à la retraite à 62 ans semble en tout cas exclu. « Il faut rouvrir les discussions, mais pas pour remettre en cause la réforme. On l’a votée avec beaucoup de difficultés, on garde les acquis », défend un cadre de la majorité sénatoriale. Quelques ajustements du texte ne sont donc pas à exclure, ne serait-ce que pour « répondre », estime-t-il, à l’initiative parlementaire du RN et aux syndicats, qui prévoient une manifestation le 1er octobre. La ligne rouge des 64 ans n’interdit pas, par ailleurs, de rediscuter d’autres points de la réforme. Au Sénat, l’introduction de nouvelles mesures sur l’emploi des seniors semble par exemple faire consensus au sein de la majorité. À l’occasion de l’examen du texte, la chambre haute s’était déjà exprimée en faveur de l’instauration d’un « index seniors », censé pousser les entreprises à davantage de transparence sur l’emploi des salariés en fin de carrière, et sur la création d’un « CDI seniors », nouveau contrat de travail exonéré de certaines cotisations. Les deux amendements avaient finalement été censurés par le Conseil constitutionnel. « Il faut reprendre cet aspect là des choses, pour associer à cette réforme des retraites un véritable changement de politique vis-à-vis de l’emploi des seniors. Il faut sans doute aussi travailler, en lien avec les partenaires sociaux, sur la question de la pénibilité notamment dans les métiers du bâtiment ou de l’aide à la personne », propose la sénatrice centriste Élisabeth Doineau. En revanche, pour la rapporteure générale du budget de la Sécurité sociale, une remise en cause complète de la réforme serait « suicidaire » : « Il faut être lucide face aux réalités budgétaires du pays, pour ne pas entraîner la France vers de nouvelles dépenses qui seraient un naufrage. » « Je ne vois pas sur quoi le débat peut reprendre si on élude la question des 64 ans » Les déclarations de Michel Barnier, qui a indiqué que les « améliorations » qu’il entendait proposer respecteraient « le cadre budgétaire », ont donc de quoi rassurer les défenseurs de la réforme. À gauche, l’accueil de l’annonce du nouveau Premier ministre est évidemment beaucoup plus froid. « Je ne vois pas sur quoi le débat peut reprendre si on élude la question des 64 ans, puisque l’essence même de cette réforme c’est le report de l’âge de départ à la retraite », dénonce la sénatrice Monique Lubin, qui défendait déjà en février dernier une proposition d’abrogation de la réforme. L’élue socialiste doute par ailleurs de la sincérité de l’initiative du nouveau Premier ministre, qui défendait du temps de la primaire des Républicains en 2021 un report de l’âge légal à 65 ans. « Sa déclaration me laisse songeuse. Je pense qu’elle a surtout pour but de donner des gages, de contrebalancer la tendance à droite de ce futur gouvernement, au moment où il cherche des ministres de centre-gauche pour le composer », estime Monique Lubin. Du côté des syndicats, le scepticisme est aussi de mise. Au micro de France Inter le 8 septembre, la secrétaire générale de la CFDT Marylise Léon a réclamé « a minima » une suspension de la réforme, le temps de la réouverture des discussions, pour bloquer l’augmentation progressive de l’âge de départ à la retraite. De son côté, la CGT a fait de l’abrogation de la réforme l’un des mots d’ordre de la journée de mobilisation syndicale du 1er octobre.

Le

Paris: Passation Gabriel Attal et nouveau Premier Ministre Michel Barnier
4min

Politique

Après une journée de flottement, Michel Barnier finalement présent aux journées parlementaires d’Horizons et d’Ensemble pour la République

Alors que se tiennent mardi et mercredi les journées parlementaires des groupes Ensemble pour la République et Horizons, une incertitude planait sur la venue du Nouveau Premier ministre. Le parti d’Edouard Philippe a envoyé une invitation à Michel Barnier. Du côté du groupe Ensemble pour la République dirigé par Gabriel Attal, on semblait vouloir garder ses distances.

Le