Un choix « qui nous arrache le coeur »: en Ariège, des « insoumis » déchirés
Un choix "qui nous arrache le coeur": en Ariège, où Jean-Luc Mélenchon est arrivé largement en tête, des électeurs "insoumis"...

Un choix « qui nous arrache le coeur »: en Ariège, des « insoumis » déchirés

Un choix "qui nous arrache le coeur": en Ariège, où Jean-Luc Mélenchon est arrivé largement en tête, des électeurs "insoumis"...
Public Sénat

Par Anne LEC'HVIEN

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Un choix "qui nous arrache le coeur": en Ariège, où Jean-Luc Mélenchon est arrivé largement en tête, des électeurs "insoumis" sont déchirés à quelques jours du second tour entre voter pour un "ultralibéral", s'abstenir ou voter blanc.

"Je suis comme la majorité des Français: ils n'ont pas envie de ce choix. On nous demande quelque chose qui nous arrache le cœur. On nous demande l'impossible pour des gens qui ont milité pour une autre vision du monde", soupire Martine Crespo, derrière le comptoir de bois de sa boutique à Saint-Girons.

Dans ce département rural du sud-ouest, bastion socialiste qui avait gratifié François Hollande de 64,7% au second tour en 2012, le candidat de la France insoumise (LFI) est cette fois arrivé en tête avec 26,7%, plus de cinq points devant Marine Le Pen et 19 points devant Benoît Hamon.

"Mon premier élan du coeur, mon cri de révolte, a été de m'abstenir", raconte Mme Crespo. "Mais ma décision n'est pas complètement arrêtée", précise-t-elle.

"J'hésite à voter blanc, mais aussi à voter Macron! Si je sens que c'est trop tendu, qu'il risque d'y avoir une vraie possibilité pour Marine Le Pen de passer à la présidence, je ne vais pas hésiter une seule seconde", ajoute-t-elle.

Le leader de LFI a mis en garde contre la "terrible erreur" du vote FN, sans toutefois appeler à voter pour M. Macron. Certains sondages montrent un report de voix allant de 10 à 20% vers le FN.

Les militants de La France insoumise ont, quant à eux, opté aux deux tiers pour le vote blanc ou l'abstention, seuls 35% se prononçant pour un vote Macron.

"Je suis très torturée", reconnaît Dominique Antras, une autre militante. En 2002, "on a fait front républicain. On a voté à 80% pour Chirac" mais "qu'ont fait les partis de pouvoirs pour ne plus que ça se reproduise ?" interroge-t-elle.

Pour Guillaume Naud, 40 ans, le choix est clair: "ce sera l'abstention". Il y a une "mascarade, une supercherie dans cette élection", ajoute-t-il, accusant les médias, qui "appartiennent à de grandes fortunes", d'avoir discrédité son candidat.

- "Un déchirement" -

Sur le petit marché du Mas d'Azil, à une vingtaine de kilomètres, le dilemme s'invite aussi entre les étals. "J'étais parti pour ne pas voter et j'ai décidé cette semaine que j'allais voter Macron", retrace Maxence Camelin, 36 ans, "dégoûté" par cette perspective.

"Les gens sont fous!" réplique Régis, commerçant de 49 ans. "J'en suis malheureux, mais je vais voter Macron, parce que j'ai trop peur de l'autoritarisme. Les gens ont oublié l'histoire!"

Manuel Meïer, professeur à Foix et communiste depuis sa jeunesse, avait d'abord pensé voter blanc puis il "a évolué": "Miser sur le fait qu'il va passer juste juste, c'est un peu jouer avec le feu".

Il votera "vraisemblablement" pour le candidat d'En Marche!, mais ce sera "un déchirement, au moins aussi grand que de voter Chirac" en 2002.

A l'est du département, au cœur de la vallée de la Douctouyre, six militants réunis sur la terrasse d'une maison ont tranché: ce sera blanc, nul ou... pas de vote du tout.

"Ça a commencé en 2002, il fallait sauver le +soldat Ryan+, Chirac, puis après ça a continué avec Royal, où le PS a coulé son propre candidat, après Hollande contre Sarkozy, et maintenant, c'est ras-le-bol", lâche Alain Baby, agriculteur retraité, qui votera blanc pour la première fois.

"Pour moi, il n'y a aucun choix possible", estime aussi Gilles Talpach, gérant d'une société coopérative, qui s'abstiendra. "Il n'y a personne qui me représente, et il y a un danger des deux côtés".

Jacques Saint André votera, lui, "Mélenchon" au second tour. "C'est leur politique anti-sociale qui a crée le FN et qui l'alimente. Donc on peut continuer comme ça des années", lance-t-il. "Il y a beaucoup plus à jouer pour moi aux législatives que ce second tour, qui ne m'intéresse plus."

Partager cet article

Dans la même thématique

13-UNIS : la course en hommage aux 10 ans des attentats de novembre 2015
5min

Politique

Commémoration du 13 novembre : 10 ans après les attentats, la menace terroriste « s’accroît »

Alors que la France rend hommage aux victimes des attentats de Paris de 2015, le ministre de l’Intérieur a appelé les préfets à « renforcer les mesures de vigilance ». Le procureur national antiterroriste (Pnat) Olivier Christen, indique même que la menace terroriste, jihadiste, d’ultradroite ou émanant d’Etats étrangers « s’accroît ».

Le

France Paris Shooting
4min

Politique

Attentats du 13 novembre 2015 : dix ans après, comment les lois antiterroristes ont évolué ?

Dix ans après le traumatisme des attentats du 13 novembre 2015, le cadre juridique permettant la prévention et la répression d’actes terroristes a largement évolué. Après les attaques du Bataclan, des terrasses parisiennes et du Stade de France ayant fait 131 morts et plus de 400 blessés, la France avait basculé dans l’état d’urgence, un régime juridique d’exception qui a influencé les évolutions législatives.

Le

Un choix « qui nous arrache le coeur »: en Ariège, des « insoumis » déchirés
4min

Politique

Immigration : Laurent Nunez a « bon espoir que le plan 3 000 places de centres de rétention administrative aboutisse en 2029 »

A l’approche de l’examen du budget, le ministre de l’Intérieur, Laurent Nunez était auditionné par commission des lois du Sénat a présenté des crédits en hausse pour la mission sécurité et immigration de son ministère. Il en a profité pour confirmer que l’objectif 3 000 places en des centres de rétention administrative, initialement prévu pour 2027, ne sera pas tenu, comme l’avait révélé un rapport du Sénat.

Le

5min

Politique

Budget : des sénateurs souhaitent assouplir le droit des successions pour favoriser les dons aux associations

Les sénateurs Bernard Jomier et Grégory Blanc (Place Publique) ont déposé un amendement au projet de loi de finances 2026, visant à élargir la liberté des légataires dans la transmission de leur patrimoine, pour favoriser les donations aux causes d’intérêt général. De quoi permettre un débat « le plus large possible » selon les élus, dans une séquence budgétaire intense.

Le