« Une ex-ministre ne devrait pas dire ça »

« Une ex-ministre ne devrait pas dire ça »

Une quasi-unanimité rare au Palais du Luxembourg. Les propos d’Agnès Buzyn dans Le Monde ce mardi ont provoqué un tollé à droite comme à gauche. Dans un communiqué, l'ancienne ministre de la Santé confirme avoir alerté Édouard Philippe sur le risque d'un report des élections municipales, mais regrette l'utilisation du mot « mascarade ».
Public Sénat

Par Steve Jourdin

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Des propos surprenants

Au départ, ce fut l’étonnement : « J’ai été abasourdi de lire ça. C’est une déclaration détonnante » pour Philippe Dallier, vice-président LR du Sénat. Puis la colère : « Elle était ministre de la Santé, si elle avait des doutes aussi forts lorsqu’elle était en poste, elle n’aurait jamais dû quitter le ministère. » Le sénateur PS Bernard Jomier abonde en ce sens : « C’est atterrant. Une ex-ministre nous dit clairement : je savais tout et je n’ai rien dit. Et tout en étant consciente de la situation, elle choisit ses intérêts personnels et son ambition municipale au détriment de l’intérêt général ».

Outre le fond, le timing de cette sortie interroge. Pour le sénateur PS Rémi Féraud, un responsable politique ne « peut pas s’exprimer comme cela à un tel moment ». Catherine Deroche, sénatrice LR du Maine-et-Loire, se demande quant à elle pourquoi l’ex-ministre de la Santé a tant attendu :

Une manière de se défausser ?

Selon les propos d’Agnès Buzyn rapportés par Le Monde, l’ancienne ministre de la Santé a alerté le directeur de la Santé fin décembre sur le caractère inédit de la crise sanitaire en Chine. Le 11 janvier, elle aurait confié ses craintes par message à Emmanuel Macron. Enfin, le 30 janvier, elle aurait averti Édouard Philippe que les « élections (municipales) ne pourraient sans doute pas se tenir ».

Une chronologie qui indigne certains sénateurs. « En révélant ces faits, elle met clairement en danger le gouvernement et le chef de l’État. Elle dit en creux que l’exécutif n’a pas écouté ses avertissements. Elle accuse son ministère d’inertie en affirmant qu’elle a fait ce qu’elle a pu. Une ex-ministre ne devrait pas dire ça » regrette Bernard Jomier. De fait, la responsabilité de la gestion de la crise au plus haut sommet de l’État semble désormais ouverte :

Pour le sénateur PC Pierre Ouzoulias, les confessions d’Agnès Buzyn interrogent sur le manque de préparation du gouvernement : « A-t-on fait en sorte d’avoir suffisamment de masques et de gel hydroalcoolique, le service public de la santé a-t-il été préparé pour faire face à une telle situation ? ».  

Le maintien des élections municipales dans un contexte de crise est aussi pointé du doigt par les élus. « On a essayé de faire porter le chapeau du non-report au président du Sénat (Gérard Larcher), alors que le gouvernement était parfaitement au fait de la situation. Il s’est entêté. Il aurait pu décider du report jeudi, puis à nouveau samedi soir. Il ne l’a pas fait, on a perdu trois jours » tempête Philippe Dallier.

L’unité nationale d’abord, la politique après

Si les déclarations d’Agnès Buzyn provoquent la colère d’une grande partie des sénateurs, l’heure n’est néanmoins pas aux règlements de compte. Patrick Kanner, chef de file des socialistes au Sénat, ne souhaite pas polémiquer dans le contexte actuel et appelle à l’ « unité nationale » :

Au Sénat, tous semblent en convenir : le parlement devra, une fois l’épidémie jugulée, interroger le gouvernement sur la gestion d’une crise devenue, en quelques semaines, à la fois sanitaire, économique et politique. Dans un communiqué, l'ancienne ministre de la Santé confirme avoir alerté Édouard Philippe sur le risque d'un report des élections municipales, mais regrette l'utilisation du mot « mascarade ».

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