Vaccins : « On a l’impression que toutes les doses ont été consommées par les métropoles », affirme Véronique Guillotin

Vaccins : « On a l’impression que toutes les doses ont été consommées par les métropoles », affirme Véronique Guillotin

Selon les derniers chiffres officiels du ministère des Solidarités et de la Santé, plus de 3 millions de Français ont reçu au moins une dose du vaccin.En Meurthe-et-Moselle, département particulièrement touché par les variants de la maladie, les élus locaux tentent de trouver leur place dans une stratégie vaccinale pilotée depuis Paris. Pour comprendre leur rôle et la réalité de la campagne de vaccination, Cécile Sixou a suivi dans leur quotidien Véronique Guillotin, sénatrice de Meurthe-et-Moselle, et Valérie Beausert-Leick, présidente du conseil départemental de Meurthe-et-Moselle. Un reportage inédit au cœur des territoires pendant la pandémie.
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Par Flora Mansiet

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Une stratégie vaccinale trop lente et inégale…

« Les choses doivent s’accélérer », lâche Véronique Guillotin alors qu’elle tente désespérément de faire vacciner ses parents de 80 et 90 ans. On leur avait promis un rendez-vous pour fin janvier, puis mi-février, mais c’était sans compter sur la pénurie. Après plus de trois semaines d’arrêt, les premières injections de vaccins ont repris en Meurthe-et-Moselle le 22 février dernier. Avant de pouvoir ouvrir de nouveaux créneaux de vaccination aux plus de 75 ans et personnes à risque, 14 000 rendez-vous doivent être reprogrammés après leur annulation, faute de doses suffisantes.

« Les maires nous le disent, ils ont l’impression de vivre dans un monde éloigné, l’impression que toutes les doses ont été consommées par les métropoles comme Nancy. Ça met en colère »

Pourtant la sénatrice avait interpellé le gouvernement, mi-novembre, sur sa stratégie vaccinale, lors de la traditionnelle séance de questions devant le Sénat. Elle s’inquiétait d’un manque d’anticipation et de possibles problèmes logistiques. Trois mois plus tard, le constat est implacable pour Véronique Guillotin : non seulement il y a eu pénurie, mais même quand les doses arrivent, « tout le monde n’est pas logé à la même enseigne, ce qui provoque une grosse incompréhension dans le département ». Neuf centres ont ouvert à Nancy et le ministre de la Santé s’y est rendu pour féliciter le travail mené par les équipes sur place. Oui mais qu’en est-il du reste de la Meurthe-et-Moselle ? « Les maires nous le disent, ils ont l’impression de vivre dans un monde éloigné, l’impression que toutes les doses ont été consommées par les métropoles comme Nancy. Ça met en colère » rapporte l’élue.

Qui laisse peu de place aux élus locaux

Rendre la campagne vaccinale plus efficace par l’intervention plus grande des acteurs locaux ? Pour Valérie Beausert-Leick, présidente du département, c’est là un enjeu majeur : « Dans cette crise sanitaire, il faut plus que jamais que l’Etat fasse confiance aux acteurs locaux. Nous avons prouvé que nous étions en capacité de répondre aux défis de cette crise. Nous sommes des acteurs opérationnels, nous connaissons les besoins des territoires ».

Déterminée à améliorer l’accès aux vaccins aux habitants les plus isolés, l’élue a entrepris d’associer les pompiers à la logistique, eux qui avaient regretté de ne pas avoir été assez sollicités au début de la crise sanitaire. Une façon de faire qui ne répond pas au protocole national et qui demande d’être validée : « Nous avons un Etat qui déploie de façon très centralisée un mode de fonctionnement. Et tout le monde pense qu’on ne peut pas bouger les lignes sans demander l’autorisation. Tant qu’on ne l’a pas on ne peut pas avancer, c’est très infantilisant », regrette Valérie Beausert-Leick.

« Cette pandémie a mis en évidence une faille dans notre mode d’organisation trop centralisé participant à une lenteur dans la prise de décision »

A l’heure où le projet de loi dit « 4D » (décentralisation, différenciation, déconcentration, décomplexification) s’apprête à être présenté au Parlement, le compte n’y est pas. Les élus de terrain semblent trouver difficilement leur place dans une crise gérée depuis Paris.

« Cette pandémie a mis en évidence une faille dans notre mode d’organisation trop centralisé participant à une lenteur dans la prise de décision », explique l’élue. Pour elle comme pour Véronique Guillotin et de nombreux maires de la Meurthe-et-Moselle qui essayent chaque jour de jouer un rôle dans la gestion de la crise, il est plus que temps de laisser aux élus locaux la possibilité de prendre plus d’initiatives et de participer aux prises de décisions nationales.

Revoir le reportage de Cécile Sixou Fracture vaccinale, les élus en première ligne

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