Budget de la Sécu : le Sénat reporte à 2028 la réforme du financement des hôpitaux

Lors de l’examen du budget de la Sécurité sociale, le Sénat a reporté à 2028 la fin du caractère central de la tarification à l’activité, la fameuse T2A, dans le financement des hôpitaux.
Simon Barbarit

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Il s’agissait d’une annonce d’Emmanuel Macron en début d’année lors des vœux aux acteurs de la Santé. Le chef de l’Etat appelait à corriger dès 2024, le système de tarification à l’activité (T2A), dont la « logique exclusive » avait selon lui créé « beaucoup de dysfonctionnements ». Mise en œuvre en 2008, la T2A qui constitue les deux tiers des revenus des établissements de santé a conduit à une course à la rentabilité, et « a contribué à l’épuisement des professionnels et a pu conduire à une transformation de l’offre s’éloignant des objectifs de santé publique », a relevé le rapport de la commission des affaires sociales du Sénat sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024. En effet, la tarification à l’acte peut conduire un hôpital à réaliser le plus d’activités possibles, ou à privilégier les plus rémunératrices.

Le budget de la Sécurité sociale pour 2024 met en œuvre la promesse d’Emmanuel Macron, en mettant fin au caractère central de la T2A pour les activités de médecine, de chirurgie, et l’obstétrique, le cœur du réacteur hospitalier. Les établissements de santé seront financés désormais par trois « compartiments » : le financement à l’activité, les dotations relatives à des objectifs de santé publique et des dotations relatives à des missions spécifiques.

« Le problème n’est pas le schéma, mais sa mise en œuvre »

Ce jeudi, lors de l’examen du texte au Sénat, le président de la commission des affaires sociales, Philipe Mouiller (LR) a d’abord indiqué que la réforme du gouvernement lui convenait en soulignant qu’elle faisait partie des recommandations de la commission d’enquête du Sénat sur l’hôpital de 2022. « Le problème n’est pas le schéma, mais sa mise en œuvre ». Le sénateur s’est interrogé sur les activités qui verraient leurs financements évalués. « Quid de la maternité, de la pédiatrie, de la gériatrie ? Réduire la T2A ne peut être la seule finalité », a-t-il reproché, appelant à voir « activité par activité, le régime fixé ».

Le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau a précisé que la réforme « n’était pas le seul décalque d’une volonté présidentielle ». « On en a très longuement parlé avec les fédérations hospitalières. On a devant nous deux ans d’expérimentation pour une généralisation en 2026. On a des itérations permanentes avec les fédérations pour faire des simulations. Mais, je ne crois pas qu’il existe des modes de tarifications miraculeux […] Ma philosophie, c’est de dire on se donne deux ans et après on corrigera s’il y a des anomalies structurelles ou conjoncturelles […] Mais je suis convaincu de cette philosophie globale qui fait que les établissements de santé n’auront plus peur de financer des activités essentielles, comme par exemple la prise en charge des femmes victimes de violences ».

« Ce que vous nous proposez, c’est de tout changer maintenant en votant la loi, pour encore changer d’ici deux ans si ça ne va pas. Nous, ce qu’on vous propose, c’est de mener les mêmes travaux avec un temps d’analyse pendant 3 ans et quand les choses seront prêtes on passera en application. C’est plus rassurant pour les acteurs », a répondu, Philippe Mouiller.

Raison pour laquelle, la commission a présenté un amendement visant à tester « en vie réelle » à partir de 2025 le nouveau modèle de financement proposé, avant une entrée en vigueur pour 2028. Cet amendement a été adopté par 184 voix contre 138.

« Je n’ai jamais dit que ça se ferait à enveloppe fermée »

A gauche, les élus se sont opposés à ce report. « Quel message on envoie aux hôpitaux ? ils veulent cette évolution et on reporte tout à 2028. Cette réforme sera lourde et là on veut rallonger encore », a regretté le sénateur socialiste, Bernard Jomier.

La sénatrice communiste, Céline Brulin a également regretté le report de la réforme. « En revanche, je suis d’accord avec la commission sur un point. C’est que cette réforme se fait à enveloppe constante ».

« L’Ondam (Objectif national de dépenses d’assurance maladie) hospitalier a progressé de 50 milliards depuis 2019 […] Je n’ai jamais dit que ça se ferait à enveloppe fermée […] Je suis prêt à revoir le sujet des dotations. On fait payer à l’Ondam hospitalier de la prévention. Par exemple, on fait payer aux maternités le Beyfortus. Est-ce que c’est à elles de le payer ? Il y a un chantier qui est devant nous », a voulu rassurer Aurélien Rousseau.

 

 

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