Son audition était « très attendue ». La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a dans le viseur les agences et opérateurs de l’Etat. Ça tombe bien, c’est aussi l’objet d’une commission d’enquête du Sénat, rapportée par la sénatrice LR Christine Lavarde et présidée par le sénateur communiste Pierre Barros.
En annonçant, fin avril, sa volonté de « supprimer un tiers des agences et opérateurs de l’Etat », avec à la clef « 2 à 3 milliards d’euros » d’économies, visant 180.000 postes de fonctionnaires, comme le rappelle le sénateur PCF du Val-d’Oise, Amélie de Montchalin, la ministre a pu surprendre et susciter quelques inquiétudes aussi. Quels opérateurs pourraient être touchés ? Et les économies sont-elles réellement au rendez-vous ? « Nous ne sommes pas certains d’arriver à un milliard d’économies », nous expliquait le lendemain Christine Lavarde, « on parle plutôt en millions d’euros d’économies », estimait la sénatrice LR des Hauts-de-Seine.
Auditionnée ce jeudi par la commission d’enquête du Sénat, la ministre a pu apporter des précisions sur sa méthode et maintenu son objectif de 2 à 3 milliards d’euros d’économies, tout en laissant un peu sur leur faim les sénateurs.
« Je n’ai pas comme projet de me lancer dans un exercice de serpette ou de tronçonneuse, en disant je veux supprimer 10.000 emplois »
D’emblée, Amélie de Montchalin l’a assuré : elle ne veut pas de coup de rabot. « Je n’ai pas comme projet de me lancer dans un exercice de serpette ou de tronçonneuse, en disant je veux supprimer 10.000 emplois », lance la ministre, « nous avons une approche d’efficacité. Les agents sont parfois confrontés à beaucoup de redondance, de lourdeur, de complexité ».
Avec l’idée de limiter à 2 % la hausse de dépenses par an, synonyme de « gain de productivité », et en l’appliquant aux « 64 milliards d’euros » du total des dépenses des opérateurs et agences visés, « ça fait 1,3 milliard par an. Donc à l’horizon de deux ans, deux ans et demi, vous arrivez à 2 ou 3 milliards d’euros », détaille Amélie de Montchalin, qui entend les réaliser sur les budgets 2026 et 2027.
Pour arriver à ce chiffre, la ministre évoque cinq « tamis » de réorganisations possibles. « Il y aura une partie qui sera sur le fonctionnement, une partie de rapprochements et de fusions, ou une reministerialisation des politiques publiques », détaille la ministre, assumant aussi « des suppressions sur des missions qui sont échues. Par exemple, l’institut national de la consommation ». Et enfin « une approche budgétaire » pour « avoir une meilleure gestion » et meilleur pilotage.
« Vous diminuez des interventions aux particuliers, aux collectivités et aux entreprises »
Précisions qui font réagir Christine Lavarde. « Donc les économies prévues, ce n’est pas le fonctionnement. […] On va devoir remettre en cause des politiques publiques. C’est très différent dans le discours, car quand vous venez diminuer des crédits d’intervention, vous diminuez des interventions aux particuliers, aux collectivités et aux entreprises. Je ne dis pas qu’il ne faut pas le faire, je dis qu’il faut, avec honnêteté, l’annoncer, plutôt que laisser croire que c’est les structures et leur réorganisation qui permettent de générer 2 à 3 milliards. […] Il faut le dire honnêtement, car il y aura des conséquences ». Elle insiste : « Avec l’ensemble des documents transmis, on ne voit pas comment vous faites 3 milliards d’économies sur la seule partie du fonctionnement, vous ferez 3 milliards en venant diminuer les enveloppes des crédits d’intervention ».
Amélie de Montchalin n’est pas encore capable de dire précisément quelles agences pourraient disparaître, ou quels opérateurs pourraient se rapprocher en réseau par exemple. Pour plus de détails, la ministre donne rendez-vous aux annonces que fera le premier ministre en juillet sur le prochain budget, puis lors du projet de loi de finances 2026, à l’automne prochain.