Les protéines peuvent-elles être le levier de la transition alimentaire ? C’est la question que se sont posés le sénateur Les Républicains, Arnaud Bazin et le député Démocrate, Philippe Bolo, tous deux membres de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST).
Chaque jour, les Français consomment largement les recommandations de protéines requises. En proportion, cet apport en protéines provient au 2/3 de protéines animales et, au tiers restant, de protéines végétales. Outre les spécificités de chaque type d’aliments, les recommandations internationales optent pour un mix alimentaire de 50/50.
12 % du CO2 mondial lié à l’élevage
La consommation excessive de certaines protéines a des effets délétères sur la santé comme la surconsommation de viande rouge qui est associée aux cancers colorectaux et maladies cardiovasculaires. Mais les effets se font également ressentir au niveau environnemental. L’élevage, qui permet de fournir les protéines animales, est responsable de 12 % des émissions mondiales de gaz à effets de serre et 70 à 75 % des terres agricoles dans le monde sont réservées à la production d’aliments pour animaux.
Au vu de ces données, le rapport de l’Office opte pour un « affinage » de la connaissance de l’impact environnemental des aliments consommés. Le consommateur doit ensuite pouvoir comparer l’apport des protéines alternatives et leur impact environnemental avec les protéines conventionnelles. Il est également encouragé à développer la production de légumineuses. Selon les travaux scientifiques récents, une alimentation totalement végétale peut apporter les protéines en quantité et qualité suffisantes.
Des protéines de laboratoire
Mais l’alimentation en protéine ne réside pas forcément dans le choix binaire animal-végétal. « Ce sont de nouvelles protéines qui ont agité les médias ces dernières années », souligne le sénateur Arnaud Bazin.
Grâce aux progrès de la science et à la découverte de nouvelles technologies, des protéines alternatives ont émergé. C’est le cas de la fermentation de précision qui, via des protéines synthétisées, permet la production d’une protéine cible et non l’ensemble des composants d’un produit d’origine animale. L’impact environnemental est alors considérablement réduit. La culture cellulaire (ou viande de synthèse) quant à elle vise à imiter la protéine animale. Mais cette technologie, encore en développement, requiert un processus de production complexe qui se révèle particulièrement coûteux. L’Office recommande la poursuite des recherches dans ce sens tout en offrant une pédagogie aux consommateurs.
Des insectes et des algues
D’autres formes de protéines pourraient tout aussi bien venir agrémenter notre mix alimentaire, à condition que leur consommation soit démystifiée. Vertueuse sur le plan environnemental et riche en protéines, la consommation d’insectes ne va pas de soi en France à l’inverse des pays africains ou asiatiques. Tout comme les algues, riches en protéines et avec un bilan carbone quasiment irréprochable, leur consommation reste très marginale notamment à cause de l’incertitude sur les débouchés auprès des consommateurs. Ainsi, l’Office insiste tout particulièrement sur la préservation du savoir-faire acquis dans la production de ces nouvelles protéines.
« Un pilier de la gastronomie »
Mais comment remporter la bataille de la transformation des habitudes alimentaires ? Si la végétalisation de l’alimentation progresse dans le pays, elle reste tout de même faible en comparaison à la protéine animale. Seulement 2,4 % des Français déclarent ne pas manger de viande. La consommation de viande a tout de même diminué dans le pays puisqu’elle est passée de 90 à 83 kg par personne et par an entre le début des années 2000 et le début des années 2020. Pour Arnaud Bazin et Philippe Bolo, la mutation vers un régime alimentaire plus soutenable passe par une meilleure communication sur les différents types de protéines et par le soutien accru des offres alimentaires contenant des protéines d’origine variée. L’Office met cependant un point d’honneur à ne pas « diaboliser la consommation de viande » car au-delà des apports en protéines et en micronutriments, elle « reste un pilier de la gastronomie ».