« La réussite des Jeux de Paris va porter les différents acteurs dans la préparation de ceux de 2030 » affirmait Pierre-Antoine Molina, délégué interministériel aux Jeux Olympiques et Paralympiques, le 14 mai. Le lendemain, un projet de loi était déposé au Sénat afin de préparer l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) d’hiver de 2030. Inspiré en grande partie des lois olympiques de Paris 2024, il a été adopté en première lecture par la chambre Haute mardi 24 juin.
L’héritage de 2024
Plusieurs dispositions sont proposées. Comme en 2024, des voies devraient être réservées et aménagées sur certains axes routiers pour les véhicules accrédités. Les déplacements risquent d’être nombreux. Pour la première fois en France, les Jeux ne se dérouleront non pas dans une ville mais dans deux régions : l’Auvergne Rhône Alpes et la Provence-Alpes-Côte d’Azur. Cinq villages olympiques seront construits à Briançon, Nice, Bozel, La Plagne et La Clusaz.
Malgré les critiques suscitées en 2024, l’utilisation de la vidéosurveillance algorithmique est également reconduite. Les images captées par les caméras de surveillance seront analysées par des algorithmes. L’objectif est d’assurer la sécurité des manifestations sportives particulièrement exposées à des risques d’actes de terrorisme. Néanmoins, l’efficacité de ce dispositif n’a jamais été prouvée. Il pourrait même porter atteinte au droit à la vie privée. Pour la sénatrice écologiste Mathilde Ollivier, la surveillance algorithmique est ainsi « dangereuse pour les libertés publiques ».
Des dispositions qui inquiètent à gauche
Le sénateur socialiste Pierre-Alain Roiron s’est, lui, révolté contre « l’interdiction de paraître » dans les grands événements, pour toute personne qui n’a pas fait l’objet d’un contrôle administratif, d’une surveillance et dont il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité publique. « Cette interdiction revient à restreindre la liberté fondamentale de circuler librement sur le territoire national, sur la seule base d’un soupçon administratif », affirme-t-il.
Les mesures pouvant porter atteinte aux libertés publiques ne sont pas les seules à inquiéter. Les écologistes ont particulièrement critiqué l’article 18 bis du projet de loi qui permet aux constructions liées à la préparation, l’organisation et le déroulement des JOP 2030 d’être exemptées du décompte Zéro Artificialisation Nette. L’altération durable de sols naturels, agricoles ou forestiers est donc autorisée. Pour faciliter la construction de logements olympiques, le projet de loi ignore certains enjeux. Le groupe écologiste s’inquiète de « dénis » environnementaux et économiques.
Un coût incertain
Si le 14 mars 2025, le Premier ministre François Bayrou confirmait l’engagement financier de l’Etat dans les Jeux d’hiver, un flou persiste quant au coût du projet qui devrait être plus important que celui des Jeux d’été. Ce dernier s’est élevé à 5.96 milliards d’euros selon un rapport de la Cour des comptes publié ce lundi 23 juin. Un montant deux fois supérieur au chiffrage présenté dans le projet de loi de finance 2025.
Le flou économique de ces JOP 2030 préoccupe donc dans l’hémicycle. Le Sénat a supprimé l’article 5 du projet de loi, qui prévoyait que les régions hôtes apportent une garantie financière en cas de solde déficitaire du Comité d’organisation des JOP. La chambre Haute a jugé l’article « prématuré » en raison de « prévisions de déficit inabouties ». Selon Jean-Michel Arnaud, sénateur Union centriste, « les Jeux olympiques d’hiver ont plus de risques d’être déficitaires que les Jeux olympiques d’été ».
Des précisions devraient sans doute être apportées à l’issue du comité interministériel sur les JOP 2030, qui se réunit ce vendredi 27 juin à Briançon. Le projet de loi devrait être examiné par l’Assemblée Nationale à la rentrée.
Mathilde Salvaing et Maly Chatin