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Aux journées parlementaires des sénateurs PS, un « besoin de se rassembler » malgré les « sensibilités »

Les sénateurs PS se sont retrouvés à Saint-Ouen pour travailler leur « unité », après un scrutin interne qui a divisé le groupe en deux camps. L’occasion aussi d’accueillir les nouveaux élus et de les former à l’examen du budget.
François Vignal

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Ce n’est plus la rentrée des classes. Mais plutôt le séminaire d’entreprise. On se retrouve, pour la cohésion du groupe. Les sénateurs PS tiennent leurs journées parlementaires – les députés s’étaient déjà retrouvés en septembre, en pleine campagne sénatoriale – ce jeudi et vendredi à Saint-Ouen-sur-Seine, en Seine-Saint-Denis, ville conquise en 2020 par le socialiste Karim Bouamrane.

Les sénateurs socialistes ont traversé les élections sénatoriales du 24 septembre dernier sans dommage. Le groupe en ressort stable, avec 64 membres, comme avant. Stable, mais un peu bousculé quand même, lors du vote interne pour la présidence de groupe. Le président sortant Patrick Kanner, réélu sénateur dans le Nord, a vu son poste contesté par Eric Kerrouche, qui faisait figure, même s’il s’en défendait, de candidat de la direction du PS, autrement dit d’Olivier Faure. Résultat, chacun s’est compté. Et Patrick Kanner, qui avait soutenu Nicolas Mayer-Rossignol, le premier opposant interne du premier secrétaire, lors du congrès, a conservé le groupe par 38 voix contre 25.

« Il y a eu deux sensibilités qui ne sont comptées, pas affrontées », souligne Patrick Kanner

Les socialistes sortent aussi, côté parti cette fois, d’un débat et d’un vote sur leur place au sein de la Nupes. Il en ressort un « moratoire », et surtout une sérieuse prise de distance face à Jean-Luc Mélenchon. Encore une raison de s’écharper, ou du moins de débattre. Les socialistes adorent ça.

Autant de raisons de travailler l’unité du groupe. Lors du vote pour la présidence, « il y a eu deux sensibilités qui ne sont comptées, pas affrontées. Et l’unité du groupe est demandée par tous et toutes. Nous sommes le premier groupe d’opposition du Sénat et on doit être unis », sait bien Patrick Kanner. Il continue :

 Le PS est pluriel, comme le groupe qui est divers. Mais nous sommes tous socialistes. 

Patrick Kanner, président du groupe PS

« Le président du groupe doit être le président du groupe, pas de sensibilités », rappelle Eric Kerrouche

Eric Kerrouche fait son arrivée dans la Salle des fêtes Barbara, qui accueille les « camarades » socialistes, juste avant le début des échanges. « Il y a un besoin de se rassembler. C’est ce que je souhaite au groupe », soutient le sénateur PS des Landes. « Je souhaite que le président élu soit le garant de cette unité. Je n’ai pas de raison de douter de lui », affirme Eric Kerrouche, qui précise quand même qu’« on verra avec les actes ».

« Le président du groupe doit être le président du groupe, pas de sensibilités », insiste-t-il. « Et ce qui fait notre force, c’est l’ensemble de nos sensibilités », ajoute le candidat malheureux à la présidence du groupe, qui a vu Patrick Kanner « plusieurs fois » depuis le scrutin interne. Bref, « tout le monde doit être constructif ».

« Point de convivialité lors des repas »

Les journées parlementaires, ce ne sont pas que des ateliers ou des tables rondes. « Le point de convivialité se fait plus lors des repas, qui permettent de tourner la page des désignations internes ou des positions politiques » glisse le sénateur de Paris, Rémi Féraud, qui n’a pas été désigné pour le poste de président de la commission des finances, face au sortant Claude Raynal, pour seulement deux petites voix. Ce proche d’Anne Hidalgo ajoute : « Il y a surtout l’enjeu, après les sénatoriales, de faire travailler ensemble les nouveaux sénateurs avec les anciens du groupe ».

Avec cette journée parlementaire en forme de séminaire, il s’agit en effet d’accueillir les petits nouveaux. Audrey Linkenheld, qui était numéro 2 de la liste de Patrick Kanner dans le Nord, fait partie des néophytes. Jusqu’ici, les choses semblent aller pour la première adjointe de Martine Aubry à la mairie de Lille. « Ça va, j’ai un bureau », sourit Audrey Linkenheld, qui ne débarque pas totalement au Parlement. Elle a déjà été députée de 2012 à 2017. Elle ressent déjà « l’ambiance politique qui est différente, au Sénat. Ce qui est nouveau, c’est que la rentrée se fait par demi-classe ! » Le Sénat est en effet renouvelé par moitié tous les trois ans. Les anciens peuvent ainsi passer le relais. Enfin pas trop vite. A la Haute assemblée, il faut parfois savoir être patient.

« L’enjeu des journées parlementaires, c’est un peu de créer l’unité au regard du fait qu’il y a eu deux candidats », confirme Audrey Linkenheld, « mais aussi par rapport au fait qu’il y a un quart de nouveaux ».

« Le Sénat, le seul lieu où on peut empêcher le gouvernement de faire des conneries, à coup de 49.3 ! »

Des nouveaux qui vont vite devoir se plonger dans le bain parlementaire, avec un lourd programme à venir, entre texte sur l’immigration le 6 novembre, sans oublier bien sûr le budget et budget de la Sécu. Venu en voisin, le maire PS de Saint-Denis, Mathieu Hanotin, compte d’ailleurs sur « le Sénat, le seul lieu où on peut empêcher le gouvernement de faire des conneries, à coup de 49.3 ! », lance-t-il. « Vous allez parler du projet de loi de finances (PLF), on aura des petits trucs à vous faire passer… » sourit le maire socialiste.

Avant d’en arriver là, les sénateurs PS présents – une trentaine, ce jeudi matin, sans compter les collaborateurs parlementaires – ont eu droit à une petite séance de prospective, avec Jérémy Pelletier, de la Fondation Jean Jaurès. Ce dernier leur a présenté les conclusions d’une large étude menée sur plus de 8.000 personnes pour la CFDT, avec Ipsos et Sopra Steria, « sur la société idéale de demain aux yeux des Français », à paraître à la fin du mois. De quoi peut-être donner quelques idées aux socialistes. « Le PS est aujourd’hui dans un moment d’interrogation stratégique », souligne la sénatrice du Val-de-Marne, Laurence Rossignol, « mais la question, c’est à quoi on sert ? » S’appuyant, lors de la table ronde, sur l’étude présentée, l’ancienne ministre des Familles souligne que « les questions féministes sont des questions majeures pour la gauche », mettant en garde contre « l’injonction permanente de répondre aux marges ».

« La cloche sonne. C’est la récré ! »

Des cris d’enfants commencent alors à se faire entendre. Ça chahute. Ce ne sont pas les représentants des « TO », les textes d’orientations socialistes, mais la cour de l’école, à côté. « La cloche sonne. C’est la récré ! » sourit Laurence Rossignol, « mais pas pour nous ». Pas de pause café – de toute façon, il n’y en a plus – les socialistes enchaînent avec du lourd : le projet de loi de finances, version pour les nuls. C’est Claude Raynal, président PS de la commission des finances donc, qui s’y colle. Un petit cours sûrement utile pour ceux qui vont découvrir les joies du PLF et de ses parties recettes et dépenses.

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« L’occasion du PLF n’est pas l’occasion de faire des amendements tout-terrain, mais uniquement sur la loi de finances. On ne peut pas interdire le glyphosate par exemple. C’est irrecevable », illustre le sénateur PS de la Haute-Garonne. Claude Raynal explique aussi l’enjeu du fameux article 40, qui empêche un parlementaire de créer une nouvelle dépense, lors du budget. C’est pourquoi il faut, en présentant un amendement dépensier, « un gage » financier, soit une compensation, que le gouvernement peut lever. Claude Raynal donne au passage un conseil d’ami :

 Sur le gage, il y a quelques parlementaires de régions viticoles qui disent, pas sur l’alcool, donc c’est sur le tabac. 

Claude Raynal, président PS de la commission des finances du Sénat.

Alors que le 49.3 a été dégainé par le gouvernement à l’Assemblée, dès le début de l’examen du budget, coupant court à tout débat, « au Sénat, on n’a pas de 49.3. Donc on aura ce débat sur la première partie, sur les recettes », rappelle Claude Raynal. « C’est le Sénat qui va permettre le travail de fond », ajoute Patrick Kanner, quelques minutes plus tôt.

« Jusqu’à la fin de l’année, ça va être intense »

Pendant que le président de la commission des finances continue son exposé, à coup de PowerPoint, le sénateur du Val-d’Oise, Rachid Temal, arrive, tout guilleret. Le groupe des députés PS et apparenté, à l’Assemblée, vient d’enlever la mention « Nupes » de son intitulé. Une satisfaction pour celui qui considère que « la Nupes est derrière nous ». S’il a bataillé sur le sujet, Rachid Temal invite aujourd’hui « à arrêter ce débat entre nous. Il faut se tourner vers les Français et ne pas être dans l’entre-soi ». L’après-midi, il participe à une table ronde, à huis clos cette fois, sur l’immigration, avec notamment Boris Vallaud, président du groupe PS de l’Assemblée. Comme dit Patrick Kanner, « j’ai une thérapie pour reconstruire les choses, quand elles sont sensibles. C’est le travail. Et jusqu’à la fin de l’année, ça va être intense ».

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