Budget de la Sécurité sociale : le Sénat ouvre la voie à une nouvelle lecture au Parlement

Les sénateurs ont adopté ce 23 janvier le compromis élaboré fin novembre avec les députés sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Avec le vote de la motion de censure, le texte était considéré comme rejeté à l’Assemblée nationale. Conséquence de ce désaccord entre les deux chambres, une nouvelle lecture va avoir lieu.
Guillaume Jacquot

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Un vote purement « formel », procédural, mais aussi « étrange », de l’avis de plusieurs sénateurs. Le Sénat a adopté sans surprise ce 23 janvier les conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), par 228 voix contre 98. Cette CMP s’était tenue le 27 novembre, et le texte qui en était sorti avait provoqué la chute du gouvernement de Michel Barnier.

« Ne pas risquer une inconstitutionnalité »

L’engagement de la responsabilité du Premier ministre sur ce projet de loi avait eu pour conséquence le dépôt puis l’adoption par une majorité de députés d’une motion de censure. Le PLFSS a donc été rejeté par la même occasion. Le vote favorable des sénateurs ce jeudi marque donc un désaccord entre les deux chambres.

Une nouvelle lecture va donc démarrer, en reprenant comme base de travail le texte adopté par le Sénat en première lecture. « Pourquoi examiner aujourd’hui les conclusions d’une CMP qui a abouti à la censure ? Il s’agit simplement de ne pas risquer une inconstitutionnalité du texte, pour non-respect de la procédure », a expliqué en ouverture des débats Elisabeth Doineau (Union centriste), rapporteure générale de la commission des affaires sociales.

« Nous sommes ici dans un exercice que l’on pourrait qualifier de singulier, voire même d’un peu baroque », a également considéré la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin.

Exercice « surnaturel » selon la sénatrice communiste Cathy Apourceau-Poly

Les groupes de gauche ont critiqué tour à tour la méthode, et ont choisi de voter contre ce texte. « L’exercice auquel nous nous livrons est particulièrement affligeant et symptomatique de la situation politique que nous sommes en train de vivre », a déclaré la sénatrice communiste Cathy Apourceau-Poly, qualifiant l’épisode de « surnaturel ». Nombre de parlementaires de gauche souhaitaient en effet repartir d’une copie blanche après la censure, mais le gouvernement a privilégié la reprise du texte suspendu, dans l’espoir d’aboutir au plus vite à une loi de financement.

Échaudés par les « coups de rabot » dans les dernières missions budgétaires du projet de loi de finances, les sénateurs socialistes ont appelé le gouvernement à procéder différemment pour la Sécurité sociale. « La répétition de ce scénario sur le budget de la Sécurité sociale ne saurait nous satisfaire. Nous ne pourrons pas accepter des coupes budgétaires sur l’hôpital, sur l’autonomie des personnes âgées ou handicapées, ni sur l’enfance », a averti la socialiste Annie Le Houérou.

Les travaux en nouvelle lecture devraient démarrer dès le 29 janvier à l’Assemblée nationale, nous a-t-on indiqué au ministère du Travail, de la Santé, des Solidarités. L’examen en séance pourrait avoir lieu la première semaine de février. Quant au Sénat, le texte devrait être examen en commission des affaires sociales le 12 février, avant de revenir dans l’hémicycle les 17 et 18 février, selon une source sénatoriale

Alerte sur la dégradation des comptes de la Sécurité sociale

Cette nouvelle lecture a par ailleurs été l’occasion pour la majorité sénatoriale, comme pour le gouvernement, d’alerter sur l’aggravation du dérapage de la situation financière de la Sécurité sociale. « Nous devons maintenant reprendre nos travaux, afin de trouver un terrain d’entente avec nos collègues députés, dans l’intérêt du pays, et permettant de remettre les finances sociales sur une trajectoire soutenable », a encouragé Elisabeth Doineau.

« Le déficit de la Sécurité sociale devrait désormais plutôt s’approcher des 25 milliards d’euros », a également averti Amélie de Montchalin, soit 7 de plus que celui enregistré en 2024. « Nous sommes dans cette situation où chaque jour qui passe est un déficit qui se dégrade. C’est un effort plus fort encore que nous devrons consentir. »

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