Budget : la gauche du Sénat quitte l’hémicycle et dénonce « un coup de force antidémocratique » du gouvernement et de la majorité

Face aux nombreuses secondes délibérations demandées par le gouvernement, en accord avec la majorité sénatoriale LR-centriste, pour revenir sur une série de votes du Sénat sur le budget, les groupes socialistes, écologiste et communiste ont quitté la séance pour dénoncer un « procédé scandaleux ».
François Vignal

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La fin de l’examen de la partie recettes du budget, au Sénat, devait se dérouler sans surprise. Après les explications de votes des groupes, les sénateurs devaient adopter la première partie. Mais rien ne s’est passé comme prévu. Car le gouvernement et le rapporteur général du budget, le sénateur LR Jean-François Husson, ont demandé 27 secondes délibérations pour revenir sur plusieurs votes du Sénat, qui alourdissent au total la prévision de déficit de 5 à 5,5 %.

Mais au passage, la majorité sénatoriale a accepté de se faire hara-kiri, en revenant sur la hausse de la taxe sur le gaz, qu’elle avait pourtant elle-même adoptée pour compenser la suppression de la hausse de la taxe sur l’électricité (lire notre article pour plus de détails).

« Le gouvernement est décidément plus à l’aise dans son dialogue avec l’extrême droite »

Face à cette situation plutôt baroque, les groupes de gauche (PS, écologiste et communiste) ont voulu marquer le coup. Ils ont quitté l’hémicycle pour protester contre cette pratique qui revient à revoter, ce qui est permis par le règlement. Dans un communiqué commun, ils dénoncent un « coup de force antidémocratique », estimant que « le gouvernement est décidément plus à l’aise dans son dialogue avec l’extrême droite ».

Faisant part de la « colère » des sénateurs PS, le chef de file du groupe socialiste, Thierry Cozic, a dénoncé la tournure des débats (voir la première vidéo) :

 Le gouvernement réécrit un texte à sa guise, après avoir été mis en minorité dans une chambre parlementaire qui lui est pourtant acquise. 

Thierry Cozic, sénateur PS de la Sarthe.

« Le problème est la méthode, consistant à mépriser le Sénat », ajoute le sénateur PS, « vous dénaturez le texte issu des travaux du Sénat ». Qualifiant le gouvernement de « mauvais perdant » et de « faire passer en force le budget au Sénat », il ajoute encore : « Puisque nos travaux sont ignorés de la sorte, le groupe PS décide de quitter la séance ».

« Le gouvernement efface d’un trait de plume vos votes et positions. Vous devriez être les garants du bicamérisme, mais de telles prises de position le fragilisent », a lancé Thierry Cozic à l’adresse de la majorité sénatoriale.

« Le gouvernement et la majorité viennent d’inventer un nouveau dispositif : le 49.3 sénatorial »

Pour le groupe écologiste, le sénateur Grégory Blanc a dénoncé « un coup de force ». « On est dans un moment grave de crise démocratique », a ajouté pour le groupe communiste le sénateur Pascal Savoldelli, qui pointe des sénateurs de droite qui « se contredisent et se soumettent ». Dénonçant des « manœuvres », il ajoute : « Derrière l’impression de dialogue, il n’y a pas de changement de méthode, c’est un 49.3 déguisé qui met fin à une posture mensongère ».

Au micro de Public Sénat, Thierry Cozic a dénoncé un « procédé absolument inacceptable […] et scandaleux ». « Le gouvernement et la majorité viennent d’inventer un nouveau dispositif : le 49.3 sénatorial », raille à son tour le socialiste. « Le gouvernement nous demande au dernier moment de nous asseoir sur nos votes », dénonce à notre micro Grégory Blanc. Quant à Pascal Savoldelli, il se dit « un peu stupéfait ». « Nous sortons, mais on nous a sortis. Quand on retire des amendements adoptés, il y a un problème de légitimité. Et le débat se situe ailleurs. […] Il y a un débat en coulisse, avec le RN », dénonce le sénateur communiste. Regardez :

« Ce n’est en rien un déni de démocratie », assure le ministre Laurent Saint Martin

Le ministre des Comptes publics, Laurent Saint-Martin, a tenté de se justifier au micro du Sénat. « En aucun cas une seconde délibération ne remet en question la qualité de ce qui a été débattu. C’est tout simplement quelque chose qui se fait régulièrement, et qui se fait cette année dans une situation un peu particulière : l’aggravation des comptes publics », souligne le ministre, qui l’assure : « Ce n’est en rien un déni de démocratie ».

Laurent Saint Martin glisse au passage que revenir sur une partie des votes du Sénat par une seconde délibération, soit au grand jour, reste une meilleure méthode « que la commission mixte paritaire qui le ferait à huis clos ».

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