Les sénateurs ont adopté, samedi 6 décembre, les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », en baisse de près d’un milliard d’euros, une première depuis 2017. Les crédits de la mission s’élèvent à 29,5 milliards d’euros, soit une baisse de 2,7 %. Les trois-quarts de cette somme doivent être absorbés par la prime d’activité et l’Allocation pour adultes handicapés (AAH) , tandis que l’« année blanche », instaurée dans l’article 44 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, aboutit à la stabilisation des dépenses de nombreux programmes liés aux politiques sociales.
Au fil de la discussion, les oppositions de gauche ont tenté de relever le niveau de dépenses de nombreux mécanismes de protection sociale, en vain. « Compte tenu de la contrainte qui pèse sur nos finances publiques, la commission n’a émis aucun avis favorable sur les amendements qui proposent d’augmenter les crédits de la mission », avait averti en début de discussion le sénateur LR Arnaud Bazin, rapporteur spécial pour la commission des finances. A quelques rares exceptions près, les sénateurs ont rejeté la quasi-totalité des amendements déposés pour modifier la répartition des crédits au sein de la mission qui englobe, en plus de l’AAH et de la prime d’activité, le soutien aux banques alimentaires, la protection juridique des mineurs ainsi qu’une partie des crédits destinés à l’égalité entre les femmes et les hommes.
« Alors que la pauvreté est au plus haut depuis 30 ans, le gouvernement choisit de faire payer la crise aux plus fragiles », a déploré la sénatrice communiste Silvana Silvani. « L’effet de ciseaux entre des besoins croissants avec un taux de pauvreté en hausse depuis 30 ans, et des moyens de l’Etat en baisse, va aggraver les situations de fragilité », a épinglé sa collègue écologiste Raymonde Poncet-Monge. « Le travail protège de moins en moins de la pauvreté et, sous votre gouvernement, la baisse du chômage n’est plus corrélée au recul de la pauvreté », a-t-elle fustigé.
« A travers ce budget, nous démontrons qu’il est possible de concilier l’exigence de solidarité et la maîtrise de la dépense publique. Renoncer à l’une reviendrait à fragiliser l’autre et avec elle l’avenir même de notre modèle social », a défendu la sénatrice des Hauts-de-Seine, Marie-Do Aeschlimann (LR).
Les sénateurs suppriment un article excluant AAH des revenus professionnels
La gauche peut néanmoins se réjouir d’avoir obtenu la suppression de l’article 79 du projet de loi de finances qui prévoyait d’exclure les montants perçus au titre de l’AAH des revenus professionnels. Cette mesure aurait eu pour effet de priver de la prime d’activité 87 % des travailleurs handicapés, dont 95 % des travailleurs en Établissement et service d’accompagnement par le travail (ESAT). Ce dispositif aurait, selon la commission des finances, représenté une perte moyenne de 170 euros par mois pour les travailleurs concernés pour une économie de 90 millions d’euros en 2026 pour le budget de l’Etat.
La suppression de l’article 79 a fait l’objet d’un large consensus dans l’hémicycle puisque huit amendements de suppression ont été déposés, dont un à l’initiative du rapporteur spécial de la commission des finances. « Nous avons tous été interpellés voire choqués », a déclaré Arnaud Bazin. Ce dernier pointe une mesure « incohérente avec ce que l’on veut pour les travailleurs handicapés », rappelant le soutien du Sénat à une insertion par le travail. Face à un vote couru d’avance, le ministre du Travail Jean-Pierre Farandou, s’est contenté de souligner la « dérogation historique » applicable à l’AAH sans défendre davantage la proposition du gouvernement.