CETA : Patrick Kanner évoque « un risque de déni démocratique » si le texte n’est pas transmis à l’Assemblée

Le rejet du traité de libre-échange entre l’UE et le Canada par le Sénat ne signifie par l’arrêt du CETA. Le texte pourrait revenir à l’Assemblée nationale fin mai. Patrick Kanner, le président des sénateurs socialistes, demande à l’exécutif de laisser l’examen parlementaire aller à son terme, ce qui risque d’aboutir à un sérieux revers pour la majorité présidentielle.
Romain David

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Patrick Kanner, le chef de file des sénateurs socialistes, appelle le gouvernement à « ne pas bloquer la procédure » législative sur la ratification du CETA par le Parlement. L’élu du Nord, invité ce vendredi 22 mars de l’émission « Parlement hebdo » sur Public Sénat et LCP, avertit contre « un risque de déni démocratique majeur », au lendemain du rejet par le Sénat – grâce à une alliance de circonstance entre les LR et la gauche -, de ce traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada. Dans la foulée du vote, les députés communistes ont fait savoir qu’ils souhaitaient inscrire le projet de loi dans leur niche parlementaire, le 30 mai prochain, mais pour ce faire, le gouvernement doit transmettre le texte du Sénat à l’Assemblée nationale, où il y a de forte chance qu’il subisse le même sort qu’au Palais du Luxembourg.

Pour Patrick Kanner, le rejet du CETA est « un coup de tonnerre bien légitime », contre l’exécutif. Depuis 2017, cet accord est entré en vigueur à 90 %, mais de manière provisoire. Une résolution du Conseil de l’Union européenne prévoit que chaque Etat membre le ratifie. Faute de quoi, il pourrait tomber. « Aujourd’hui, il y a un seul Etat qui ne l’a pas ratifié, c’est Chypre, mais comme cela n’a pas été officiellement notifié à la Commission européenne, le CETA continue de fonctionner », explique Patrick Kanner. « Je vous le concède, c’est très compliqué ».

« Le gouvernement se retrouve gros-jean comme devant »

Désormais, la France pourrait saper les liens économiques tissés entre l’UE et le Canada en renvoyant ce traité dans les cordes. En 2019, l’Assemblée nationale l’avait approuvé à une courte majorité, ce qui a certainement poussé l’exécutif à ne pas tenter sa chance devant une Chambre haute plutôt hostile. Le 15 avril 2021, les sénateurs avaient adopté une résolution demandant au gouvernement de présenter un projet de loi sur le CETA au Sénat. C’est finalement à l’initiative des élus communistes du Palais du Luxembourg, qui l’ont inscrit dans leur niche parlementaire, que ce débat a pu avoir lieu.

« Il fallait étudier ce traité qui est très important. Il y a les élections européennes, la crise économique… Je le mesure parfaitement, mais il y a eu un débat de fond », assure Patrick Kanner. « Aujourd’hui le gouvernement se retrouve gros-jean comme devant, il a perdu une manche parce qu’il a attendu bien trop longtemps avant de présenter ce débat au Parlement. »

Crise ouverte entre les LR et les centristes

« Ce traité est manifestement bon pour une partie du monde agricole : producteurs de vin, produits laitiers… », concède Patrick Kanner. « Mais très mauvais pour les producteurs de viandes bovines. C’est un peu la bouteille à moitié vide ou à moitié pleine. Les sénateurs ont choisi de la voir à moitié vide », explique l’élu, alors que les termes de cet accord commercial ont été négociés sous la présidence de François Hollande, dont il a été l’un des ministres. « Je ne me sens pas du tout en difficulté. Le CETA a été négocié à une époque, mais le monde a changé depuis. Le dérèglement climatique s’est approfondi. Dans ce traité, il y a des sujets sur l’importation de produits carbonés qui, à l’époque, n’ont pas été considérés », justifie le socialiste.

Les débats au Sénat ont vu vaciller la majorité sénatoriale de droite et du centre. Les LR, majoritairement opposés au CETA, se sont attiré les foudres d’Hervé Marseille, le président du groupe Union centriste, dont les élus ont choisi de quitter l’hémicycle avant le vote. « Manifestement, il y a une crise qui laissera des traces entre les centristes et les LR. Je sens bien cette crispation qui ne date pas d’hier », pointe Patrick Kanner. Le sénateur relève « l’évolution des centristes » et leur rapprochement vers la majorité présidentielle, avec laquelle ils font ticket commun pour les élections européennes. « Est-ce que cela aboutira à une fracture au Sénat ? C’est à Gérard Larcher de gérer sa majorité », conclut-il.

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