Fin de vie : « Je ne partage pas le choix du gouvernement de séparer le palliatif et l’aide à mourir », précise Alain Claeys, auteur d’un texte sur le sujet en 2016

Auditionné par la commission des affaires sociales, l’ancien député socialiste Alain Claeys s’est montré favorable à la proposition de loi relative à l’aide à mourir, adoptée le 27 mai dernier à l’Assemblée nationale. Il regrette cependant la séparation de l’aide à mourir et du palliatif dans le texte.
Marius Texier

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« De tout temps, j’ai considéré que la sédation profonde et continue jusqu’au décès constituait une aide à mourir », lance Alain Claeys devant les sénateurs de la commission des affaires sociales. Avec l’ancien député Jean Leonetti, auditionné le 2 juin dernier par la commission, il est le coauteur de la loi créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie adoptée en 2016. Au sein du texte, les deux auteurs ont renforcé les directives anticipées du malade qui font désormais office de valeur contraignante pour le médecin. La loi permet également au patient de demander une sédation profonde et continue jusqu’au décès sous réserve d’une discussion en procédure collégiale des médecins.

« Il y a une réticence aujourd’hui à appliquer cette sédation profonde et continue jusqu’au décès »

Selon Alain Claeys, cette sédation profonde constitue déjà une aide à mourir contrairement à Jean Leonetti qui y voit une manière d’abréger les souffrances. « C’est un élément de désaccord que nous avons », reconnaît l’ancien maire de Poitiers. D’après lui, la loi de 2016 est « mal appliquée » dans certains services palliatifs de France, ce qui montre que cette sédation profonde est bien plus qu’une manière d’abréger les souffrances : « Il y a une réticence aujourd’hui à appliquer cette sédation profonde et continue jusqu’au décès », observe-t-il. « Ce qu’il faut aujourd’hui c’est être capable de changer de modèle pour intégrer les soins palliatifs, on est encore trop souvent sur un modèle curatif ».

De ce point de vue là, l’ancien député regrette le choix du gouvernement d’avoir séparé le palliatif et l’aide à mourir de la proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale et qui doit être inscrite à l’ordre du jour au Sénat à l’automne prochain. « La distinction entre ceux qui vont mourir et ceux qui veulent mourir me choque profondément », lance Alain Claeys. « La mort est là et il s’agit de savoir quel est le chemin le moins mauvais pour la personne ».

« On ne va pas passer de ils vont, à ils veulent mourir »

Lors de son audition, Jean Leonetti redoutait que le nouveau texte « laisse la porte ouverte au suicide assisté ». Alain Claeys rétorque quant à lui : « On ne peut pas comparer cela aux campagnes que l’on fait pour lutter contre le suicide », juge-t-il. « Quand il est dit dans le texte « irréversible », cela veut dire que les gens vont mourir. On ne va pas passer de vont… à veulent mourir ».

Si les manières d’appréhender la fin de vie divergent, les deux anciens députés se rapprochent tout de même sur la nécessité de développer les soins palliatifs. Pour Jean Leonetti, il y a urgence d’en faire une « véritable discipline ».

Alain Claeys, pour qui la solidarité et l’autonomie guident les législateurs depuis le début, abonde dans le même sens : « En France, nous n’avons pas encore une culture des soins palliatifs », regrette-t-il. « Nous aurons gagné la bataille de la solidarité le jour où les soins palliatifs seront totalement intégrés dans les services des hôpitaux de France. C’est à cela que nous devons arriver ».

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