Ce matin, Anne-Charlène Bezzina, constitutionnaliste, était l’invitée de la matinale de Public Sénat. Alors qu’Emmanuel Macron a annoncé sa volonté qu’une loi spéciale soit déposée dans les prochains jours au Parlement, quelles seront les modalités de son examen devant les deux assemblées parlementaires ? Les élus pourront-ils déposer des amendements sur le texte ? Un gouvernement démissionnaire peut-il défendre un tel texte ? Explications.
IVG : la commission des lois du Sénat rejette la clause de conscience et l’amendement visant à supprimer le mot « garantie »
Par Romain David
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À quelques heures de l’ouverture des débats au Sénat, faut-il y voir un présage de bon augure pour la constitutionnalisation de l’IVG ? La commission des lois, qui examinait ce mercredi matin les amendements déposés par les sénateurs, a choisi de rejeter ceux portés par la droite, visant à supprimer le mot « garantie » du texte et à introduire une clause de conscience.
Les sénateurs avaient jusqu’à mardi midi pour proposer des modifications au projet de loi constitutionnelle. Trois amendements ont été déposés. Le premier, porté par le LR Alain Millon, ne touche pas au projet de loi constitutionnelle en tant que tel mais vient le compléter, en inscrivant dans la loi le « respect de la clause de conscience des médecins, ou professionnels de santé, appelés à pratiquer l’intervention ».
Le deuxième amendement, déposé par le sénateur LR de la Manche Philippe Bas, veut faire disparaître le mot « garantie » du texte. « La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse », indique le projet de loi. Cette formulation ne convient pas à la droite sénatoriale, qui estime qu’elle ouvre la voie à la création d’un droit opposable, ce qui permettrait aux femmes n’ayant pu avoir recours à une IVG de se tourner vers la justice.
Enfin, et sans rapport avec le texte, un amendement du sénateur Reconquête (non inscrit) Stéphane Ravier entend profiter de ce véhicule législatif faire rentrer dans la Constitution « l’exception agricole et alimentaire de la France ».
« Je pense qu’on va fleurter avec le conforme »
« Le motif de rejet de ces amendements est double. Il y a de nombreuses pressions qui sont faites sur nos collègues. Aujourd’hui, l’opinion est tellement favorable à cette constitutionnalisation que beaucoup réalisent qu’il ne sert plus à rien de batailler contre. Désormais, une majorité de sénateurs veut voter conforme et passer à autre chose », confie une sénatrice LR à Public Sénat. « Je pense qu’on va fleurter avec le conforme », abonde une élue centriste ce mercredi. « Il y a des mouvements multiples et variés. C’est un combat d’arrière-garde. Là les pressions vont être vraiment très importantes, de la part des familles, des entourages, pour voter la constitutionnalisation », pense la même élue.
Les débats sur la constitutionnalisation de l’IVG s’ouvrent à 16h30 au Palais du Luxembourg.
Le risque d’une modification du projet de loi
Chaque amendement en séance doit avoir été examiné par la commission saisie du texte. Quelle que soit la position de cette dernière – adoption ou rejet -, les amendements sont discutés dans l’hémicycle en séance publique.
La gauche accuse la droite de chercher à empêcher une adoption conforme du projet de loi constitutionnelle et de vouloir provoquer « un retour à la cause départ ». Pour mémoire : avant d’être soumis au Parlement réuni en Congrès, toute réforme constitutionnelle doit avoir été approuvée par les deux chambres, et dans les mêmes termes. Le texte qu’examine le Sénat ce mercredi a été adopté par l’Assemblée nationale le 30 janvier. Si les sénateurs décident de le modifier, il devra être renvoyé devant les députés pour une seconde lecture.
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