Paris: Weekly session of questions to the government at the Senate

Meurtre de Philippine : le Sénat veut augmenter la durée de rétention administrative de certains étrangers condamnés

C’est une demande de Bruno Retailleau, dans le cadre d’une nouvelle loi immigration. Le Sénat propose de porter le délai maximal de rétention administrative à 180 voire 210 jours, pour les étrangers auteurs d’une « infraction sexuelle ou violente grave ». Une mesure qui répond à l’émoi suscité par le meurtre de Philippine. Elle sera examinée dans le cadre d’une proposition de loi plus large, portant sur l’usage des fichiers pour les auteurs d’infractions sexuelles, violentes ou terroristes.
Rose Amélie Becel

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Avant même l’examen d’une nouvelle loi immigration, le souhait du ministre de l’Intérieur d’allonger la durée de rétention administrative pour certains étrangers en situation irrégulière pourrait être exaucé par le Sénat. Ce mardi 5 novembre, une proposition de loi visant à « renforcer les moyens de surveillance des individus condamnés pour des infractions sexuelles, violentes ou terroristes » sera examinée dans l’hémicycle.

Le texte, porté par la sénatrice Les Républicains Marie Mercier, s’attaque avant tout à la question des fichiers judiciaires, sur lesquels sont inscrits les individus condamnés ou mis en examen pour des infractions sexuelles, violentes ou terroristes. Mais un amendement de la présidente de la commission des lois, et rapporteure du texte, Muriel Jourda, donne désormais au texte une autre dimension.

Allonger le délai de rétention dans les CRA à 180 voire 210 jours

Aujourd’hui, les personnes en situation irrégulière sur le territoire français peuvent être retenues dans des centres de rétention administrative (CRA), en vue de leur expulsion, dans un délai de 90 jours maximum. Ce délai peut déjà être étendu à 180 voire 210 jours pour les retenus condamnés pour des faits terroristes.

L’amendement de la commission des lois propose de prolonger de la même durée le délai de rétention en CRA pour les personnes en situation irrégulière « condamnées à une interdiction du territoire français en raison de la commission d’une infraction sexuelle ou violente grave ».

« L’actualité témoigne, dramatiquement, de l’importance d’une lutte résolue contre la récidive », estime Muriel Jourda dans son rapport. Par cette disposition, la sénatrice fait ainsi écho au meurtre mi-septembre de la jeune Philippine, dont le principal suspect avait séjourné en CRA après une condamnation pour viol. C’est aussi en réaction à ce drame que Bruno Retailleau a émis le souhait de prolonger le délai de rétention pour « les crimes les plus graves », lors d’un entretien accordé au Figaro Magazine début octobre.

Empêcher les personnes fichées d’exercer dans certains secteurs

Les autres mesures du texte de Marie Mercier visent davantage à étendre l’usage des fichiers pour les auteurs d’infractions sexuelles et violentes (le Fijaisv) et pour les auteurs d’infractions terroristes (le Fijait). La sénatrice entend d’abord autoriser davantage de personnes à y avoir accès.

Aujourd’hui, les noms des inscrits dans ces fichiers peuvent être consultés par les autorités judiciaires et la police dans le cadre d’enquêtes, mais aussi par les administrations de l’État pour sécuriser des décisions de recrutement. Les élus locaux peuvent, par exemple, avant d’engager un agent sur une mission en contact avec des mineurs, demander à la préfecture si celui-ci est inscrit au Fijaisv.

S’appuyant sur ce dispositif existant, la proposition de loi entend aussi autoriser les opérateurs de transports publics à consulter le Fijaisv avant le recrutement de personnels « en contact avec des mineurs ou des majeurs vulnérables ». En commission, Muriel Jourda a fait adopter un amendement durcissant la disposition, pour mettre en place « une véritable incapacité légale » d’exercer dans le secteur du transport public de mineurs ou de personnes vulnérables, pour les inscrits au Fijaisv ou au Fijait.

Éviter que la procédure de changement de nom ne soit « détournée par des individus malveillants »

Le texte propose également de durcir les procédures de changement de nom pour les personnes inscrites au Fijaisv ou au Fijait. Depuis 2022, la loi permet à toute personne majeure d’accéder une fois dans sa vie à une procédure simplifiée auprès de sa mairie pour changer de nom de famille. Une procédure « détournée de son objet par certains individus malveillants », affirme Marie Mercier. Dans l’exposé des motifs de son texte, la sénatrice évoque ainsi le cas de Francis Evrard, violeur multirécidiviste de mineurs, qui a changé de nom de famille peu après l’entrée de la loi en vigueur.

Le texte de la sénatrice permettrait ainsi au procureur d’être systématiquement informé des demandes de changement de nom des personnes inscrites au Fijaisv ou au Fijait, il pourrait alors s’opposer à cette demande si elle n’a pas de « motif légitime ». En commission, cette disposition a également été complétée. Pour tout changement de nom via une procédure simplifiée, le demandeur devra fournir un extrait de son casier judiciaire, ainsi qu’un document démontrant son inscription, ou non, au Fijaisv et au Fijait. La procédure simplifiée introduite par la loi de 2022, qui nécessite pour le moment de remplir un simple formulaire, serait ainsi rendue plus difficile.

Dans la même thématique

Meurtre de Philippine : le Sénat veut augmenter la durée de rétention administrative de certains étrangers condamnés
5min

Parlementaire

Budget 2025 : « Les vaincus se sont alliés aux loosers pour gouverner », tacle Fabien Gay

Lors du débat budgétaire à l’Assemblée nationale les parlementaires du Nouveau Front populaire ont réussi à faire voter de nombreux amendements, notamment des hausses d’impôt, contre l’avis du gouvernement. En face, les élus du bloc central ont été épinglés pour leur faible taux de présence. Pour le sénateur communiste Fabien Gay, invité ce vendredi de l’émission « Parlement hebdo », cette situation trahit la vulnérabilité de la coalition gouvernementale.

Le

Meurtre de Philippine : le Sénat veut augmenter la durée de rétention administrative de certains étrangers condamnés
3min

Parlementaire

Budget de la Sécu : le texte transmis au Sénat conservera les amendements « qui ont reçu un avis favorable du gouvernement »

Les députés n’ont pas pu aller au bout de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Néanmoins, le gouvernement s’engage à conserver certains des amendements votés en séance dans la version du texte sur laquelle doit désormais plancher le Sénat. Au micro de Public Sénat, la ministre chargée des Relations avec le Parlement a également apporté des précisions sur le calendrier d’examen du budget général de l’Etat.

Le

Meurtre de Philippine : le Sénat veut augmenter la durée de rétention administrative de certains étrangers condamnés
4min

Parlementaire

Les tentatives de manipulations de l’information en France sont en hausse en 2024, alerte Viginum

Auditionnés par la commission de la Défense et des Affaires étrangères du Sénat, Stéphane Bouillon, secrétaire général du SGDSN, (Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale), les patrons de l’Anssi et de la Viginum ont fait le bilan de leur action l’année dernière et listé les défis qui s’annoncent en 2025 avec une enveloppe budgétaire en baisse.

Le

Meurtre de Philippine : le Sénat veut augmenter la durée de rétention administrative de certains étrangers condamnés
7min

Parlementaire

Sécurité : le Sénat vote le renforcement de la surveillance des auteurs d’infractions sexuelles et terroristes

Ce 5 novembre, le Sénat a voté une proposition de loi élargissant l’usage des fichiers dans lesquels sont inscrits les auteurs d’infractions sexuelles, violentes ou terroristes. En commission des lois, un amendement avait été ajouté au texte pour allonger la durée de rétention administrative des étrangers auteurs d’une infraction sexuelle ou violente grave. À la demande du gouvernement, celui-ci a été retiré.

Le