FRA : Siege du groupe RATP

Ouverture à la concurrence de la RATP : la contreproposition de loi des élus communistes au Sénat

Alors qu’un texte visant à repousser l’ouverture à la concurrence du réseau de bus de la RATP à la fin 2026 est en débat au Sénat, des sénateurs communistes déposent une proposition de loi qui va plus loin, en repoussant cette ouverture à la concurrence au 31 décembre 2039. Les sénateurs s’insurgent d’une mise en concurrence qui mène finalement à la privatisation du réseau de transports franciliens.
Camille Romano

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Plus qu’une proposition de loi, c’est une contre-proposition de loi que les sénateurs communistes présentent ce lundi 18 décembre. Réunis symboliquement devant le siège de la RATP, ils ont détaillé leur texte, établi en réaction à celui de leur collègue Vincent Capo-Canellas, qui vise à encadrer la mise en concurrence du réseau de bus de la RATP.

Cette mise en concurrence, mise en place petit à petit depuis plusieurs années, en application de la loi ORTF du 8 décembre 2009, devait intervenir initialement le 1er janvier 2025. Le texte de Vincent Capo-Canellas repousse le délai, et fait passer au 1er janvier 2027. Mais les sénateurs communistes, Pascal Savoldelli au premier chef, dénoncent une « loi électoraliste », « écrite à trois mains avec Valérie Pécresse, présidente de la région Île-de-France et Jean Castex, PDG de la RATP ». Selon les élus communistes, cette loi, écrite « en quelques jours », ne vise qu’à « acheter la paix sociale et permettre de passer le cap des Jeux Olympiques », « seule préoccupation de Valérie Pécresse ». Ils s’étonnent ainsi de la rapidité d’élaboration de la loi, comme de l’enclenchement par le gouvernement de la « procédure accélérée » sur ce texte, une manœuvre qui réduit la navette parlementaire à une seule lecture par chambre.

« Mettre en concurrence service public et secteur privé est faussé »

Le texte des communistes vise, lui, à retarder la mise en concurrence « au plus tôt le 31 décembre 2039 », ce qui selon eux permet de rester en conformité avec le droit européen. Il vise également à la mise en place d’une régie régionale des transports, en cédant les « activités et les participations en dehors de l’Île-de-France » de la RATP, afin de ne pas « contrarier le maintien de son monopole public ». C’est la notion même de mise en concurrence que les communistes rejettent, comme l’explique Pascal Savoldelli : « Mettre en concurrence service public et secteur privé est faussé car l’intérêt du service privé est de faire du profit. Pour ce faire, les repreneurs privés vont jouer sur le personnel et les conditions de travail », prévoit le sénateur francilien.

Soutenus par des représentants de la CGT-RATP et RATP-Bus, ainsi que des conseillers régionaux Fabien Guillaud-Bataille et Céline Malaisé, les élus communistes proposent une alternative à cette mise en concurrence qui est, selon eux, « une ouverture à la privatisation », qui aura pour résultats « de casser le statut des agents de la RATP, une réduction des acquis sociaux, un service de plus en plus dégradé », comme l’explique Pierre Barros, sénateur communiste du Val d’Oise. Il a pu constater les effets de la mise en concurrence en grande couronne : « Le métier se dégrade depuis des années, les services n’existent plus, les bus se perdent… » « Nous voulons un niveau de service qui correspond aux besoins des usagers », martèle-t-il.

Une bataille « de longue haleine »

Sa collègue sénatrice de Seine-et-Marne, Marianne Margaté abonde dans son sens, en donnant l’exemple d’écoles privées de dessertes en transports en commun, obligeant les élèves à emprunter près de 3 moyens de transport différents… « C’est la vie sociale et culturelle qui est remise en cause », déplore-t-elle, en appelant à « tirer le bilan de la mise en concurrence en grande couronne ». Un bilan qu’elle juge donc négatif.

Pour Bertrand Hammache, secrétaire général de la CGT-RATP, le projet d’ouverture à la concurrence est une « absurdité réelle et continue », avec pour finalité de voir les salariés du groupe être la « variable d’ajustement » lors du passage au secteur privé. « La mise en concurrence n’est pas la solution, mais plutôt le problème, comme si on confiait le poulailler au renard. », juge le représentant syndical. Son collègue Cemil Kaygisiz, secrétaire général de la CGT RATP-Bus regrette « la dégradation continuelle du service et des conditions de travail » que sous-tend la mise en concurrence, pointant notamment la baisse du nombre de conducteurs de bus, qui sont passés de 16 900 en 2021 à 14 469 en 2023. Le syndicaliste n’écarte pas des mouvements de grève pour protester contre le projet.

Malgré leur mobilisation, les sénateurs communistes ont conscience qu’ils s’engagent dans une « bataille de longue haleine », comme le constate Pascal Savoldelli. Il leur faudra « trouver l’espace pour défendre leur texte », que ce soit dans leur niche ou à la faveur d’une reprise de la proposition par des collègues, d’ici à 2026.

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