Lermytte

Paroles de nouveaux sénateurs : « C’était le plongeon dans le grand bain », se remémore Marie-Claude Lermytte

Elue pour la première fois sénatrice en septembre dernier, Marie-Claude Lermytte représente le Nord, et plus particulièrement la Flandre, au Palais du Luxembourg. Assistante sociale pendant trente-trois ans et très engagée dans la vie locale, elle raconte à Public Sénat le début de son mandat au Sénat, les événements qui l’ont marquée et les sujets qu’elle souhaite porter. Découvrez un entretien de notre série d’été sur les nouveaux sénateurs.
Mathilde Nutarelli

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Quel est votre parcours avant d’arriver au Sénat ?

J’ai été assistante sociale pendant trente-trois ans, au département du Nord. Sur le plan local, je suis conseillère municipale de ma commune, Brouckerque, depuis 2001, j’y ai été élue maire en 2014. J’ai aussi été vice-présidente à ma communauté de communes en charge de la petite enfance et je suis élue à la région depuis 2000. A ce titre, je voudrais mettre en place des choses envers nos jeunes. Il y a un travail de pédagogie à faire envers eux. Nos jeunes, c’est demain.

Depuis toute ado, j’ai été engagée dans des associations : sportives, de parents d’élèves, mais aussi d’organisation d’événements au niveau local.

Pourquoi avez-vous décidé de vous présenter aux élections sénatoriales ?

C’est un enrôlement par mon prédécesseur, Jean-Pierre Decool [Jean-Pierre Decool a été sénateur Les Indépendants du Nord de 2017 à 2023, ndlr]. Ayant annoncé la fin de sa vie publique, il a souhaité que je puisse marcher sur ses traces et représenter la Flandre. Et puis il n’y avait pas de sénatrice femme de ce territoire. Au vu de mon implication dans le département, il m’a proposé de prendre sa suite.

Comment s’est passée votre arrivée votre Sénat ?

C’était le plongeon dans le grand bain. D’autant que je suis arrivée au moment du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Pour une première expérience de travail au sein du Sénat, il n’y avait pas le temps de réfléchir. Jusqu’au mois de décembre, j’avais décidé de faire le maximum de choses pour tout apprendre et tout voir. Je suis d’un tempérament à ne pas me reposer sur mes lauriers.

J’ai embauché les mêmes collaborateurs que Jean-Pierre Decool. C’était un atout pour moi d’avoir des collaborateurs avec de l’expérience. Je veux souligner la qualité du travail de nos collaborateurs et la bienveillance de tout le personnel du Sénat, à tous les niveaux, de l’huissier au personnel d’entretien. Il y a un respect et une grande bienveillance.

Le groupe dans lequel je siège, les Indépendants – République et Territoires, est un groupe de taille raisonnable, ce qui permet à chacun, aux différentes sensibilités, de s’exprimer, de confronter les avis. On est quelques-uns à ne pas être encartés, et on est respectueux de cela. Il y a une sorte de bienveillance dans le groupe et la présence de quelques vieux routards nous apporte beaucoup.

Mon entrée au Sénat me donne encore moins envie de m’encarter ! Je n’aime devoir faire des choses contre nature, j’aime garder mon indépendance dans mes choix, depuis toujours.

Quels sont les sujets sur lesquels vous avez travaillé jusque-là ?

De par ma formation et ma profession, les sujets sont assez variés. Je siège à la commission des affaires sociales, je fais partie du groupe d’étude sur le cancer, le handicap, … A la commission des affaires sociales, beaucoup de sujets m’interpellent.

Je me suis engagée sur le texte sur les assistants familiaux et la possible double activité. J’ai beaucoup appris lors de cet examen : via le prisme de ma profession, j’ai vu les enjeux quotidiens, parfois des détails, qui ne relevaient pas du domaine de la loi. Cela a été une petite leçon pour moi, il fallait que je prenne le sujet de plus haut.

Quels sont les autres textes qui vous ont marqué pendant cette première année ?

Le texte sur la constitutionnalisation de l’IVG. C’était un sujet qui nous prenait en tenaille. Je me suis posé plusieurs questions. Le faire entrer dans la Constitution, est-ce que c’était un piège ou pas ? Est-ce que cela ouvre la porte à d’autres sujets ? On ne pouvait pas être contre, car on risquait de croire que nous étions contre l’IVG, ce qui n’est pas le cas. La question aurait pu déraper, on marchait sur un fil. Mais c’est fait et c’est bien. Le Congrès était une expérience inattendue et très impressionnante, comme on en vit peu.

Plus largement, quel regard portez-vous sur vos premiers mois au Sénat ?

J’entends beaucoup de gens dire que le Sénat est plus calme, mais je n’ai pas l’impression de vivre quelque chose de très calme depuis que je suis arrivée. Il y a beaucoup de travail au Sénat et en circonscription. J’y suis souvent, et le travail ne s’arrête pas à la sortie du train. J’aime venir travailler au Sénat, mais j’aime beaucoup pouvoir revenir en circonscription, cela permet de garder les pieds sur terre. Je dis toujours à mes proches : « Si je décroche rappelez-moi à l’ordre ! ».

La situation politique actuelle est inédite. Quel rôle voyez-vous pour le Parlement, et en particulier le Sénat, dans la période ?

Le Sénat va garder sa place de sage, va continuer à garantir la Constitution, de veiller à ce que tout fonctionne malgré tout. On a un président qui est dans cette lignée-là. Cette période nous donnera peut-être davantage de travail sur le volet de la garantie du bon fonctionnement des institutions.

Je me sens parfois un peu décalée avec les autres, parce que je garde l’esprit terre à terre des habitants. Je m’inquiète de ce que vont penser nos concitoyens, de ce qu’on apporte à notre jeunesse, de ce qu’ils peuvent comprendre autour de ce qu’il se passe. J’ai été effrayée de la position de beaucoup de jeunes et de certains agriculteurs, pendant ces législatives. J’en ai vu beaucoup qui votaient pour des extrêmes, parce qu’il y a une perte de confiance envers nos politiques. Le rôle des institutions, ce sera de refaire de la pédagogie pour tout le monde, car même nos élus locaux perdent confiance. Et puis il y a eu beaucoup d’alliances contre nature, et c’est cela que regarde le citoyen. Ils pensent que les hommes politiques sont capables de tout pour tout.

Sur quels sujets souhaitez-vous travailler à la rentrée ?

Entre les sujets qui nous tiennent à cœur et ceux dont on peut discuter aujourd’hui, on se pose beaucoup de questions. La loi sur la fin de vie, ou encore le projet de loi agricole, on les garde sous le coude et j’espère qu’on pourra travailler dessus à la rentrée. Aujourd’hui, j’ai beaucoup d’interrogations. J’imagine qu’on aura une année compliquée. Et si on passe une année à se contredire, où est l’intérêt pour nos concitoyens à qui on a demandé de s’exprimer ?

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