La proposition de loi du sénateur LR Laurent Duplomb « visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur » est sous le feu des projecteurs depuis plusieurs jours. Ce texte permet, entre autres, de lever plusieurs interdictions visant des pesticides, comme l’acétamipride, substance qui nuit aux abeilles et autres pollinisateurs. Il est examiné à l’Assemblée ce lundi et il est l’occasion d’une subtilité de procédure parlementaire. En effet, le rapporteur du texte, le LR Julien Dive, a déposé une motion de rejet préalable. Une pratique peu courante, car c’est plutôt l’opposition qui utilise cet outil, en général. L’idée des députés du socle commun, ici, est d’empêcher le débat du texte en séance et en particulier les plus de 3000 amendements, dont plus de 2000 émanent en particulier des Ecologistes et des Insoumis.
Qu’est-ce que la motion de rejet préalable ?
La motion de rejet préalable est une procédure propre à l’Assemblée nationale. Elle permet de rejeter un texte avant même son examen, reconnaissant que « le texte proposé est contraire à une ou plusieurs dispositions constitutionnelles ou de faire décider qu’il n’y a pas lieu à délibérer ». Elle est définie à l’article 91 du règlement de l’Assemblée nationale. Une fois la motion adoptée, le texte est considéré comme rejeté, il n’est pas examiné par les députés.
Au Sénat, deux procédures similaires existent : l’exception d’irrecevabilité, qui permet de rejeter un texte contenant des dispositions contraires à la Constitution, et la question préalable, qui permet tout simplement de ne pas débattre d’un texte.
Trois solutions en cas d’adoption de la motion
En cas d’adoption de la motion, trois solutions s’offrent alors au gouvernement. D’abord, le retrait du texte. Ensuite, la convocation d’une commission mixte paritaire. Cet organe, composé de sept députés et sept sénateurs, a lieu lorsque le texte a été examiné par les deux chambres et qu’il reste des dispositions sur lesquelles se mettre d’accord. C’est ce que souhaitent les députés du socle commun sur la proposition de loi Duplomb. Le Sénat est favorable à ce texte, qui émane de l’un de leurs membres. Le 27 janvier dernier, il avait été adopté à 233 voix pour et 109 contre par les sénateurs.
C’est également cette solution qui avait été choisie par Gérald Darmanin, alors ministre de l’Intérieur, lors de la dernière adoption de d’une motion de rejet préalable, à l’Assemblée nationale, le 11 décembre 2023, sur le projet de loi immigration. Le texte ayant déjà été adopté au Sénat, la commission mixte paritaire s’était réunie le lendemain et avait débouché sur un accord. Le texte avait ensuite été soumis au Conseil constitutionnel par Emmanuel Macron, Yaël Braun-Pivet et plus de soixante députés et sénateurs, et l’avait partiellement censuré.
La troisième solution est de renvoyer le texte au Sénat pour une deuxième lecture et ainsi relancer la navette parlementaire.
Yaël Braun-Pivet souhaite que le texte soit examiné par l’Assemblée nationale
Mais ce scénario n’est pas certain : ce matin, selon une information du Figaro, la présidente de l’Assemblée nationale a convoqué une conférence des présidents pour échanger sur le sujet. Elle souhaite que l’Assemblée puisse débattre du texte, et que cette motion ne soit donc pas adoptée. Pour cela, il faudrait que la gauche retire une partie de ses amendements. Le sort de la proposition de loi sera fixé dans l’après-midi.