Retraites agricoles : une proposition de loi largement adoptée par le Sénat
Le 19 mars, la proposition de loi visant à garantir un mode de calcul juste et équitable des pensions de retraite de base des travailleurs non-salariés des professions agricoles déposée par Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales du Sénat, a été adoptée. Dans l’objectif « d’apporter une réponse concrète à la détresse du monde agricole », le texte envisage notamment un calcul des pensions de retraites par points sur la base des 25 meilleures années, à compter de 2026.
« La colère du monde agricole n’est pas éteinte. ». Voilà comment Philippe Mouiller, auteur de la proposition de loi entame le débat. Le texte proposé s’inscrit dans une crise agricole toujours en cours. Deux syndicats agricoles majoritaires, la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs ont été reçus aujourd’hui par Gabriel Attal, et la question de la retraite agricole reste un sujet. Selon la DREES, en 2021, la pension mensuelle moyenne de droit direct des non-salariés affiliés à la Mutualité sociale agricole (MSA) était de 840 euros tandis que le montant mensuel moyen de l’ensemble des retraités s’élevait à 1531 euros.
Un texte qui fait suite à la loi du 13 février 2023
Cette proposition de loi s’inscrit dans la continuité de la loi du 13 février 2023 relative au calcul de la retraite des non-salariés agricoles en fonction des 25 années d’assurance les plus avantageuses. Les modalités de mise en œuvre de cette loi ont été annoncées dans un rapport rendu par le gouvernement le 30 janvier dernier, alors qu’il devait être remis dans les 3 mois suivants la loi.
Ce retard a été relevé de nombreuses fois : « Un tel manque de considération à l’égard du Parlement est inacceptable. » selon Philippe Mouiller. Le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau accueille les critiques : « Je les prends. », mais souligne ensuite que « Le gouvernement avait alerté à l’époque sur le fait que le délai de 3 mois nous paraissait court, compte tenu de la complexité du sujet. »
Mais c’est surtout sur le contenu que les propositions faites par le gouvernement ont été critiquées par les sénateurs : « Une véritable usine à gaz des technocratiques » d’après Philippe Mouiller, les scénarios prévus par le gouvernement sont « d’une extrême complexité technique mêlant points et annuités pour le calcul des pensions des assurés. », souligne Pascale Gruny, rapporteure de la commission des affaires sociales.
Un texte qui va à l’encontre du scénario proposé par le gouvernement
Ce texte prévoit en effet un calcul des pensions de retraite sur la base des 25 meilleures années selon un système par points. Ce régime repose sur l’accumulation de points acquis tout au long de la vie, puis convertis en prestations au moment du départ à la retraite. Ce mode de calcul permettrait, selon l’auteur du texte, de faire en sorte qu’aucun agriculteur ne soit perdant : « Les seuls assurés qui n’y gagneraient pas, n’y perdraient pas non plus. Il s’agit de ceux dont la pension est aujourd’hui portée aux minima de pension du régime agricole et qui demain seront toujours en dessous de ce niveau. Quant aux autres, la réforme leur apportera un complément de pensions non négligeables pouvant aller jusqu’à 190 euros par mois. ». Par ailleurs, selon la rapporteure du texte Pascale Gruny, le coût de la réforme atteindrait « à son point culminant, entre 285 et 322 millions d’euros. »
A l’inverse, le scénario envisagé par le gouvernement prévoit une convergence du mode de calcul des pensions de retraite agricoles vers celui applicable aux régimes alignés. Le ministre de l’Agriculture justifie ce choix en affirmant que « Cette convergence est ardemment souhaitée par certaines organisations professionnelles et me semble justifiée dans un contexte où une immense majorité des agriculteurs exercent de moins en moins ce métier pendant toute leur carrière. ». Néanmoins, selon Pascale Gruny, « Le scénario envisagé par le gouvernement ferait 30% de perdants pour seulement 20% de gagnants. ».
Des propositions corollaires : le revenu agricole, les prix planchers, la hausse des cotisations pour les agriculteurs
La question de la retraite agricole soulève plusieurs autres sujets, que les sénateurs ont pris le temps d’aborder. C’est notamment le cas du revenu agricole, de la hausse des cotisations ainsi que des prix planchers, proposition d’Emmanuel Macron.
Finalement, le texte a été largement adopté par les sénateurs à 305 pour et 0 contre. Le reste des 343 sénateurs qui se sont exprimés ont choisi de s’abstenir. La proposition de loi doit à présent être transmise à l’Assemblée nationale.
Par deux propositions de loi, la droite sénatoriale propose d’allonger la durée maximale de rétention administrative pour les étrangers en situation irrégulière, ainsi que de conditionner le versement de certaines prestations sociales à deux ans de résidence sur le territoire. Une mesure déjà censurée à plusieurs reprises par le Conseil constitutionnel.
Deux sénateurs et deux députés du Tarn déposent une proposition de loi, pour passer outre la décision du tribunal administratif qui a suspendu le chantier de l’A69. Un texte essentiel pour les parlementaires, mais qui laisse plusieurs juristes perplexes.
Invités de Parlement Hebdo, le sénateur communiste Ian Brossat et la députée EPR Constance Le Grip ont livré leurs différences de points de vue sur l’augmentation du budget de la défense. Les parlementaires ont également rappelé leurs divergences sur la proposition de résolution adoptée à l’Assemblée nationale proposant d’utiliser les avoirs russes gelés.
Le Sénat a terminé l’examen de la proposition de loi visant à assouplir le « zéro artificialisation nette ». Après avoir supprimé l’objectif de réduire de 50 % l’artificialisation des sols d’ici 2031, la majorité sénatoriale a créé de nouvelles exceptions au dispositif. Une mesure désapprouvée par les écologistes, mais aussi par le gouvernement.