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Sport professionnel : Vincent Labrune et les présidents des ligues critiquent vivement la proposition de loi sénatoriale

Les présidents des ligues professionnelles de sport ont annoncé leur désaccord commun sur certains dispositifs de la proposition de loi « Organisation, gestion et financement du sport professionnel ». Interrogés, les auteurs du texte souhaitent « redonner le pouvoir » aux fédérations sportives, notamment dans le football.
Marius Texier

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Nouveau match en perspective. D’un côté, l’équipe de Vincent Labrune, président de la ligue professionnelle de football (LFP) accompagné des présidents de nombreuses ligues professionnelles de sport. De l’autre, l’équipe sénatoriale comprenant Laurent Lafon, sénateur UDI et président de la commission culture, de l’éducation, de la communication et du sport ainsi que Michel Savin, sénateur Les Républicains, rapporteur du texte.

La raison de l’opposition ? La proposition de loi (PPL) déposée par les deux sénateurs sur l’organisation, la gestion et le financement du sport professionnel. Dans un courrier, les présidents des ligues ont exprimé leur « profond désaccord » et leur totale incompréhension » avec la PPL. « L’architecture de la proposition de loi emporte en effet un risque de fragilisation des ligues et de déstabilisation du modèle sportif français », ont-ils fustigé. Selon eux, le texte est présenté au « seul prisme des travaux menés par la mission sénatoriale sur le football ».

Le président Laurent Lafon temporise : « Nous nous sommes consacrés à tous les sports mais l’enjeu le plus problématique reste le football ». Le rapporteur Michel Savin rassure : « Ils vont être dans les discussions avec les auditions qui vont commencer prochainement. Il est vrai que les travaux initiaux étaient pour le football mais ce n’est pas une loi spécifique pour un sport. Ce qu’il se passe aujourd’hui dans le football peut se retrouver dans d’autres sports ».

Redonner du pouvoir aux fédérations

« Le Complément d’enquête le montre parfaitement. On voit qu’il y a un dysfonctionnement énorme au sein de la ligue de football », s’inquiète Laurent Lafon. Diffusé jeudi 27 mars, l’émission Complément d’enquête sur France 2, consacrée au président du PSG, Nasser al-Khelaïfi, a mis en lumière la confusion dans la gouvernance de la LFP, présidée par Vincent Labrune. « On a une ligue et une société commerciale qui elle, détient les droits TV, mais on ne sait pas qui décide. De plus, il y a un conflit d’intérêt évident », ajoute le président de la commission.

Dans les documents fournis par Complément d’enquête, on peut voir le président du PSG et également président de la chaîne sportive beIN Sports, participer aux négociations avec DAZN, chaîne sportive anglaise qui a acheté les droits TV de la Ligue 1 et de la Ligue 2. beIN Sports a également participé à l’opération à hauteur de 100 millions d’euros pour la diffusion d’un match par week-end. Dans cette affaire, Nasser al-Khelaïfi est soupçonné de conflit d’intérêts.

La proposition de loi des sénateurs insiste sur le rôle de « subdélégation de service public » des ligues professionnelles. « L’article 2 est important, assure Michel Savin, puisqu’il permet aux fédérations de retirer leur subdélégation aux ligues si celles-ci ne respectent pas leurs prérogatives. Nous donnons le pouvoir à la fédération de reprendre la main, qu’elle ait les moyens de contrôler, notamment lors d’un conflit d’intérêts manifeste ». En cas de manquement, le texte instaure le droit à la fédération de retirer sa subdélégation à la ligue.

Dans un entretien accordé au journal Les Echos mercredi 26 mars, Vincent Labrune a fustigé cette nouvelle disposition : « L’article 2 donne potentiellement un droit de vie ou de mort aux fédérations sur toutes les ligues professionnelles ».

« Ce n’est pas une question de vie ou de mort, lui rétorque Michel Savin, la question c’est que la fédération puisse avoir son mot à dire ».

« Paradoxal pour un président… »

Vincent Labrune souhaite tout de même « creuser » les discussions autour d’une nouvelle gouvernance sportive comprenant une fédération et une société commerciale. « Nous avons observé que c’est la ligue qui a décidé de transmettre les droits TV à la société commerciale », s’interroge Laurent Lafon. « La seule instance juridique désormais c’est la société commerciale. Cela pose question de l’utilité d’une ligue ».

Il s’étonne du positionnement de Vincent Labrune : « C’est assez paradoxal pour un président de ligue d’être en faveur d’une gouvernance qui ne comprenne plus la ligue ».

« Des clubs risquent de mettre la clé sous la porte »

Autre élément de discorde : une plus juste répartition des revenus, liés aux droits TV, entre les clubs. « L’article 7, qui accorderait le droit aux fédérations de décider de la répartition des revenus des clubs, doit être supprimé. Cela reviendrait à revenir 40 ans en arrière. Cette prérogative doit revenir aux clubs, qui gèrent leur stratégie financière et leurs priorités. D’autant plus que ce sont les clubs qui sont propriétaires des droits TV depuis 2004 », a assené Vincent Labrune dans les Echos.

« La redistribution des droits TV montre une très forte disparité entre les clubs, prévient Michel Savin, nous prônons une distribution qui va de un à trois ».

Pour Laurent Lafon, il y avait urgence à mettre en place ce dispositif « plus équitable » : « Nous avons mis en place l’article 7 car il y a des clubs qui risquent de mettre la clé sous la porte. Je m’étonne que Vincent Labrune ne se préoccupe que très peu de ce sujet ». Au sein de la société commerciale, les sénateurs recommandent une place plus importante pour les clubs.

Un partout, balle au centre ?

Et si la rencontre se finissait sur un match nul ? Il y a au moins un dispositif sur lequel les deux équipes se rejoignent : la lutte contre le piratage et le visionnage illicite. Une convergence certes, mais dans des proportions différentes.

Pour Vincent Labrune, « la lutte contre le piratage est l’urgence absolue ». Il se félicite que le texte des sénateurs reprenne ses propositions. « Alors non, ce ne sont pas ses propositions que nous avons reprises », assure Laurent Lafon. « Je suis ravi que nous puissions nous retrouver sur ce sujet même si je ne suis pas d’accord sur le fait que le piratage soit le principal mal de la Ligue. Ce qui est important à saisir, ce sont les causes de ce piratage à savoir les abonnements multiples et à des prix excessifs. Il faut également prendre en compte la perte de confiance dans les dirigeants qui crée un climat de méfiance pour les amateurs de football. On ne pourra pas régler les problèmes du piratage sans régler les problèmes de la Ligue », conclu-t-il.

« Le piratage n’explique pas à lui tout seul le mal du foot », explique Michel Savin. « L’éthique, le financement et la gouvernance, tout ça est lié ».

Match retour le 14 mai lors de l’inscription de la proposition de loi à l’ordre du jour du Sénat.

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