Créées en 2016 à titre expérimental, les haltes soins addictions (HSA), anciennement salles de consommation à moindre risque pourraient bientôt disparaître. Ces deux structures, situées à Paris et à Strasbourg, permettent aux personnes consommatrices de drogues d’utiliser leurs produits sous supervision médicale, dans un cadre sécurisé. « Si rien n’est voté d’ici fin 2025, elles fermeront. Or, toutes les évaluations sont positives. Il serait absurde de laisser disparaître un dispositif qui fonctionne », alerte Anne Souyris, sénatrice écologiste de Paris. Si rien ne se passe, « ils vont être obligés de regarder ce qu’il se passe dans la rue en fac » insiste-t-elle.
Des résultats « incontestables » selon les évaluations
Depuis leur ouverture, les HSA ont accueilli des milliers d’usagers en situation de grande précarité. Selon les rapports de l’IGAS, de l’IGA et de l’Inserm, ces structures ont permis de réduire les overdoses, les contaminations au VIH et à l’hépatite C, ainsi que les nuisances dans l’espace public. « Ces haltes ne banalisent pas la consommation, elles la rendent moins mortelle. Ce sont des lieux de contact et de soin », insiste la sénatrice de Paris. Les études montrent également une forte baisse des seringues abandonnées : autour de la halte parisienne, on est passé de 150 à moins de 10 par jour, et une meilleure orientation des usagers vers les soins a été constatée.
Un consensus politique rare
La proposition de loi portée par Anne Souyris s’appuie sur un large soutien transpartisan, du Parti communiste, des écologistes et de certains Républicains et centristes. « C’est un sujet de santé publique, pas de politique partisane. Les résultats sont clairs, ces lieux profitent autant aux usagers qu’aux riverains. » Pour la sénatrice, seule une loi permettra de sécuriser et d’étendre ces dispositifs à d’autres villes comme Nancy, Marseille ou Tourcoing prêtes à s’engager, mais freinées par le cadre actuel.
La France insoumise a également déposé une proposition de loi similaire, visant à ouvrir une salle de consommation à Marseille.
Des lieux intégrés au parcours de soins
À Paris, la halte soins addictions de la Gare du Nord accueille près de 200 consommations par jour. À Strasbourg, celle intégrée aux Hôpitaux universitaires dispose de 20 places d’hébergement. Deux modèles complémentaires, selon Anne Souyris : « L’expérience strasbourgeoise montre qu’on ne sort pas de l’addiction sans stabilité. Ces haltes sont souvent la première marche du soin. » Elle rappelle que le changement d’appellation, voulu par l’ancien ministère de la Santé, Olivier Véran n’était pas anodin : « Ce ne sont pas des salles à part, mais des lieux de santé à part entière. »
« Un sursis ce n’est pas une solution »
Le gouvernement envisage, via le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), de prolonger de deux ans l’expérimentation grâce à un amendement. Mais cette prolongation reste incertaine, faute de majorité à l’Assemblée nationale. « Un sursis, ce n’est pas une solution. Nous devons pérenniser ces structures et leur permettre d’exister dans d’autres territoires. » réagit la sénatrice. »
Pour Anne Souyris, la France accuse un retard par rapport à ses voisins européens, qui comptent plus de 150 espaces de consommation supervisée. « Il ne s’agit pas de tolérer la drogue, mais de protéger la vie. Ces haltes soins addictions sont des outils de santé publique efficaces. Ne pas les maintenir serait un retour en arrière. »