Suppression des ZFE le texte examine a partir du 8 avril

ZFE stop ou encore ? : chaque camp politique pointe des manquements dans le dispositif

Ce mardi est discuté à l’Assemblée nationale, dans le cadre des discussions sur le projet de loi de simplification de la vie économique, un amendement voté fin mars en commission spéciale, qui vise à interdire les Zones à Faibles Émissions (ZFE). Le gouvernement semble prêt à vouloir arrondir les angles.
Marius Texier

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Assistons-nous aux derniers instants des ZFE ? C’est en tout cas l’objectif de l’amendement, déposé fin mars par le député Rassemblement national, Pierre Meurin. Votée en commission spéciale lors des discussions sur le projet de loi de simplification de la vie économique, l’idée de suppression des ZFE va être débattue à l’Assemblée.

Depuis la loi d’orientation des mobilités (LOM) de 2019 et complétée par la loi portant sur la lutte contre le dérèglement climatique de 2021, les collectivités dont les agglomérations dépassent les seuils réglementaires de qualité de l’air doivent mettre en place des ZFE. L’objectif ? Réduire les émissions de particules fines, responsables de maladies respiratoires. Selon Santé Publique France, près de 40 000 décès sont imputables chaque année aux émissions de particules fines.

Depuis le 1er janvier 2025, les villes de plus de 150 000 habitants sont dans l’obligation d’instaurer des ZFE. En tout, 25 ZFE sont actives en France. Afin d’éviter de voir une initiative gouvernementale supprimée, la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a déposé un amendement gouvernemental pour rendre obligatoire l’instauration de ZFE dans les agglomérations qui dépassent le seuil d’émission réglementaire pendant trois des cinq dernières années. Autrement dit, cela revient à rendre obligatoire la mesure seulement pour Paris et Lyon.

Un précédent sénatorial

Déjà en 2023, une consultation en ligne menée par la Commission de l’Aménagement du Territoire et du Développement durable du Sénat montrait que 86 % des particuliers et 79 % des professionnels étaient opposés au déploiement des ZFE. L’ancien sénateur et désormais ministre des Transports, Philippe Tabarot déposait alors une proposition de loi pour étendre le calendrier de déploiement des ZFE pour les agglomérations de plus de 150 000 habitants à 2030.

Le sénateur Vincent Louault a quant à lui déposé récemment une proposition de loi visant à supprimer l’obligation de création des ZFE dans les agglomérations. Elle doit être examinée prochainement par la Commission de l’aménagement du territoire et du développement durable au Sénat. Mais le sénateur rejette l’idée d’une suppression : « L’enjeu c’est de redonner la main aux maires. Il nous faut une mesure qui soit pédagogique pour nos citoyens et qui ne les monte pas les uns contre les autres ».

« Il y a effectivement un problème de justice sociale »

Interrogée ce mardi lors des questions d’actualité au gouvernement à l’Assemblée nationale, la ministre Agnès Pannier-Runacher a répondu aux accusations d’injustices sociales des ZFE : « Nous travaillons pour n’exclure personne », lance la ministre. « Tout le monde a le droit de circuler, mais aussi de respirer. Il y a un double objectif, celui de la santé des Français et de la justice sociale. C’est tout l’enjeu de cet amendement qui vise à cibler les ZFE sur les agglomérations qui dépassent les seuils et laisser la main aux élus sur les autres agglomérations ».

A droite comme à gauche, on s’accorde sur un manque de justice sociale des ZFE. Invitée le 28 mars à l’émission Parlement Hebdo, la sénatrice écologiste Mélanie Vogel a reconnu un « problème de justice sociale » tout en saluant l’objectif initial de la mesure : « Les ZFE ont été mises en place parce que la France a été condamnée pour non-respect de la directive qualité de l’air […] Les ZFE ont répondu à ça ».

Si l’élue partage « l’objectif de santé publique », elle regrette le « manque d’intelligence sur la redistribution, la justice sociale, les investissements dans les transports en commun et les autres alternatives ».

« Il y a effectivement un problème de justice sociale, si on ne fait aucun investissement dans les alternatives. Les personnes les plus vulnérables, qui vivent en périphérie et qui ont souvent les voitures les plus vieilles […], se retrouvent pénalisées ».

C’est le constat qu’effectuait dès 2023, le ministre des Transports, Philippe Tabarot lors de l’élaboration de sa proposition de loi. Il pointait à l’époque une nécessaire « synchronisation ». « Il faut faire en sorte que les ZFE soient mises en place lorsque l’on aura créé un choc de l’offre de transports en commun et correctement organisé les aides à l’acquisition de véhicules propres. »

La droite mobilisée

A droite et à l’extrême droite, le combat contre les ZFE fait figure de priorité. Mardi dernier, Laurent Wauquiez a demandé au Premier ministre François Bayrou d’accepter la suppression des ZFE.

35 députés de droite, du MoDem et du groupe Liot ont déposé une autre proposition de loi qui sera examinée dans les prochaines semaines à l’Assemblée. Ils réclament une suspension du dispositif avec un moratoire de cinq ans.

Dans un entretien accordé au Parisien le 5 avril dernier, le Premier ministre a assuré que le gouvernement travaillait à une réflexion sur les ZFE : « Nous sommes en train de chercher de bonne foi un nouvel équilibre pour que les avantages de ce texte soient conservés, et les inconvénients réels corrigés ».

Des aides européennes à rembourser

Si la volte-face du gouvernement sur les ZFE semble peu probable, il peut aussi s’expliquer par les subventions reçues par l’Union européenne. Selon une note de la Direction générale du Trésor, la France pourrait être contrainte de rembourser la somme de 3,3 milliards d’euros d’aides européennes si le dispositif se voit interdit. C’est la somme qu’a reçue la France pour la seule année 2025. Au total, c’est plus de 40 milliards d’euros de subventions que toucherait la France pour sa transition.

Une bombe sociale ?

Mais le gouvernement pourrait aussi se trouver plutôt conciliant sur le sujet des ZFE, s’il garde en mémoire les sujets de crispation récents au sein de la population française. Pour rappel, il y a six ans, c’est la hausse des taxes sur le carburant qui avait initié le mouvement des Gilets jaunes. La polémique autour de la limitation à 80 km/h avait également alimenté la colère.

Depuis le 14 mars, une pétition est en ligne sur le site de l’Assemblée nationale. Elle a recueilli plus de 28 000 signatures. Des manifestations ont également eu lieu dimanche dernier pour protester contre les ZFE. Ce qui est sûr c’est que lorsque l’on touche à l’automobile en France, les débats s’enflamment.

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