Edouard Philippe a ouvert la voie jeudi à un assouplissement par l'Assemblée nationale de la limitation à 80 km/h sur les routes secondaires,...
80 km/h: Philippe ouvre la voie à un assouplissement par l’Assemblée nationale
Edouard Philippe a ouvert la voie jeudi à un assouplissement par l'Assemblée nationale de la limitation à 80 km/h sur les routes secondaires,...
Par Marc PRÉEL et Alexandre HIÉLARD
Temps de lecture :
5 min
Publié le
Mis à jour le
Edouard Philippe a ouvert la voie jeudi à un assouplissement par l'Assemblée nationale de la limitation à 80 km/h sur les routes secondaires, une mesure impopulaire dont il a été l'initiateur et considérée comme l'un des détonateurs de la crise des "gilets jaunes".
La règle de principe demeurerait au niveau national, mais les présidents de conseils départementaux auraient le pouvoir de relever la vitesse maximale sur certains tronçons, quitte à en assumer les conséquences en matière de sécurité routière.
C'est le compromis que dessine un amendement porté par le groupe LREM, en vue de l'examen du projet de loi d'orientation sur les mobilités dans les prochains jours à l'Assemblée. Et que le gouvernement est prêt à soutenir, a dit Edouard Philippe.
Les députés ont donné dans la nuit de jeudi à vendredi leur aval en commission pour laisser aux présidents de conseils départementaux la capacité de déroger aux 80 km/h sur les routes secondaires, sur proposition du groupe LREM.
"Si les présidents de conseils départementaux souhaitent prendre leurs responsabilités, je n'y vois aucun inconvénient", a déclaré le Premier ministre jeudi sur franceinfo. En fixant toutefois une condition: que ce pouvoir des présidents de département soit "systématiquement assorti de mesures" garantissant "le plus haut niveau de sécurité routière possible".
Edouard Philippe, à Paris, le 7 mai 2019
POOL/AFP/Archives
Les 80 km/h, considérés comme efficaces par la plupart des experts de la sécurité routière, sont dénoncés comme le symbole des villes déconnectées de la vie quotidienne des campagnes. Selon les sondages réalisés ces derniers mois, près de huit Français sur dix sont favorables à l'abandon ou du moins à l'assouplissement de la mesure.
Dès le début du grand débat national, mi-janvier, Emmanuel Macron avait ouvert la porte à des aménagements pour aboutir à "quelque chose qui soit mieux accepté et plus intelligent".
- "Manoeuvre politicienne" -
Le 8 du panneau de limitation de vitesse à 80 km/h peint en blanc, près de Sète, le 29 mars 2019
AFP/Archives
Fort des bons résultats de la Sécurité routière en 2018 (189 morts de moins qu'en 2017), M. Philippe défend lui toujours une mesure dont il se dit "fier" et qu'il "assume", a-t-il réaffirmé jeudi.
Lors de l'examen du projet de loi mobilités, le Sénat avait déjà voté fin mars la liberté pour les présidents de conseil départemental, mais aussi aux préfets, de déroger aux 80 km/h.
Auteur de cet amendement, le sénateur LR de la Haute-Saône Michel Raison dénonce dans un communiqué la "fausse ouverture" d'Edouard Philippe "qui omet sciemment de préciser que l'amendement proposé par les députés LREM exclut du dispositif les routes nationales".
En laissant la seule responsabilité aux présidents de conseil départemental, la majorité mise aussi sur le fait que peu d'entre eux oseront franchir le pas, trop soucieux de ne pas assumer les accidents mortels.
"Laisser la responsabilité au département, c'est un peu pervers et malhonnête", a déclaré à l'AFP le président PS du conseil départemental du Tarn Christophe Ramond, dénonçant "une manoeuvre politicienne".
"Je n'ai pas besoin d'injonctions parisiennes, ni pour définir la vitesse applicable sur ces routes, ni pour recevoir des leçons de sécurité routière", a réagi par communiqué François Sauvadet, président du conseil départemental de la Côte-d'Or, affirmant que "90% du réseau (de son département) pourront repasser à 90 km/h".
Chantal Perrichon, présidente de la Ligue contre la violence routière, à Paris, le 16 juin 2014
AFP/Archives
Pour le député LREM Jean-Charles Colas-Roy, membre de la commission développement durable qui examine le projet de loi mobilités, il faudra "veiller que les présidents de département puissent avoir accès à toutes les données liées à la sécurité routière".
"Je prends le pari qu’au premier mort, on descendra tous à 80 km/h", a jugé de son côté le chef de file des députés MoDem, Patrick Mignola.
L'association 40 millions d'automobilistes, grande adversaire des 80 km/h, a salué un "recul" d'Edouard Philippe, "et une victoire pour nous et la sécurité des routes".
Les partisans de la limitation, eux, ont affiché leur inquiétude. Pour Chantal Perrichon, présidente de la Ligue contre la violence routière, "nous Chantal Perrichonallons payer le prix du sang de la pseudo responsabilité des élus qui préfèrent leur mandat à la sécurité des citoyens".
Selon la responsable associative, Emmanuel Macron a "lâché" son Premier ministre "depuis des mois" sur la question. Le chef de l'Etat "se laisse le temps de voir les effets de sa réforme de l'ISF mais ne va pas au bout des deux ans d'expérimentation des 80km/h. On aimerait qu'il attache autant d'importance à la vie des gens qu'à l'argent", a-t-elle fustigé.
Dès l'annonce de la mesure début 2018, M. Philippe s'était engagé à en tirer un bilan mi-2020 et à l'annuler si elle se révèlait inefficace.
Issu d’une idée de la majorité sénatoriale l’an dernier, le Dilico est un « système d’épargne forcée » qui permet de faire contribuer les collectivités à l’effort d’économies. Dénoncé avec force par la gauche et une partie du centre et de la droite, le dispositif a été revu, après des débats parfois tendus, pour ramener la ponction de 2 milliards à 890 millions d’euros.
Les sénateurs de gauche comme de droite se sont unis pour jeter un sort au FIT, fusion de plusieurs fonds de soutiens aux collectivités, voulu par le gouvernement. Tous se sont levés pour dénoncer une mesure qui risquerait, selon eux, de mettre à mal les communes rurales.
Après avoir auditionné les responsables d’une enquête administrative sur les failles de la sécurité, le président de la commission de la Culture du Sénat Laurent Lafon (centriste) est revenu sur le plateau de Public Sénat sur les failles dans la sécurité que le rapport a relevé.
Lors des questions d’actualité au gouvernement, le ministre de l'Intérieur a été interrogé sur l’anniversaire de la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat. L’occasion pour mettre sur la table des solutions face aux dangers qui menacent le principe de laïcité.