À l’Association des maires de France, une guerre de succession

À l’Association des maires de France, une guerre de succession

Deux listes s’affrontent pour la présidence de l’Association des maires de France. Adoubé par François Baroin, le maire (LR) de Cannes David Lisnard affrontera le centriste Philippe Laurent, au risque d’une guerre fratricide.
Public Sénat

Par Fabien Recker

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Qui succédera à François Baroin à la tête de l’AMF ? La question, qui doit être tranchée lors du prochain congrès des maires en novembre, suscite un certain malaise dans les rangs de l’association. Pas partant pour un nouveau mandat, François Baroin a désigné, fin août, son successeur : David Lisnard, maire (LR) de Cannes, associé sur un « ticket » au socialiste André Laignel, actuel vice-président de l’AMF et maire d’Issoudun depuis 1977.

Un passage de témoin qui fait grincer des dents. « Une confiscation » juge Hervé Marseille, patron des sénateurs centristes. « On ne peut pas, en quittant l’AMF, agir comme s’il s’agissait de sa propriété privée ».

Coup de force

Il y avait pourtant un autre candidat déclaré, du moins en interne : Philippe Laurent, secrétaire général et membre de l’association depuis 25 ans, pensait son heure venue. « J’avais signifié à François Baroin que je souhaitais être candidat, s’il ne se représentait pas », explique le maire (UDI) de Sceaux, sûr de sa « légitimité » et d’une « certaine connaissance de la maison ».

Quand il apprend la décision de François Baroin de désigner David Lisnard pour prendre sa suite, il tombe des nues. « J’étais très surpris. J’ai appris ça le 25 août lors d’une réunion de la partie droite et centre du bureau. Nous étions une douzaine. Il nous a dit qu’il ne se représentait pas, qu’il y avait un accord conclu avec David Lisnard et André Laignel, et qu’il soutenait cet accord », raconte Philippe Laurent.

Face à ce que de nombreux élus vivent comme un coup de force, Philippe Laurent maintient sa candidature. Résultat : il y a désormais deux listes concurrentes dans la course à la présidence, une petite révolution. « Ça va contre le principe fondateur, la concorde, c’est-à-dire la liste unitaire », explique une source proche du bureau de l’AMF. « Il y a un malaise chez les maires. On aurait dû laver notre linge sale en famille et arriver avec une liste unitaire ».

Silence à gauche

Philippe Laurent défend au contraire sa démarche de maintenir sa liste. « Il y avait une espèce d’accord permanent entre la droite et la gauche pour avoir un bureau équilibré. On voit bien que ce n’est plus adapté à l’air du temps. Il faut que le bureau reflète la diversité des communes, plutôt qu’un équilibre entre des partis qui ne structurent plus autant qu’avant, l’offre politique. L’AMF doit renouveler ses pratiques » conclut-il.

A gauche, on ne se bouscule pas pour défendre la liste de David Lisnard, malgré l’accord avec le socialiste André Laignel. Les maires socialistes soutiendront-ils une candidature emmenée par un LR ? Contactés, aucun édile PS d’une grande ville ne souhaite s’exprimer sur le sujet. « Ça ne m’étonne pas », glisse Caroline Cayeux, maire divers droite de Beauvais. « Il y a un malaise à gauche ».

Philippe Laurent, Macron compatible ?

L’élue soutient Philippe Laurent, dont la liste inclut quelques maires socialistes. « Nous avons tous été choqués que huit jours avant le dépôt des listes, nous soit imposée la candidature de David Lisnard. Philippe Laurent, spécialiste des finances locales et de la fonction publique territoriale, est légitime. Il saura représenter tous les maires ».

Enjeu de la bataille pour la présidence, les relations de l’AMF avec le gouvernement – souvent houleuses sous le mandat de François Baroin, au moment de la crise des Gilets Jaunes ou pendant la crise sanitaire. Philippe Laurent, soutenu par les maires de centre droit, inscrira-t-il l’AMF dans une ligne plus « Macron compatible » ? C’est ce qu’André Laignel laisse entendre. « (Avec) sa faible superficie […], on peut craindre que cette liste opposante soit sous influence de l’Élysée », a-t-il déclaré mercredi au Figaro.

Scrutin fin novembre

Une analyse que rejette la centriste Françoise Gatel, présidente de la Délégation aux collectivités territoriales au Sénat. « Philippe Laurent comme David Lisnard sont des gens suffisamment intelligents pour ne pas instrumentaliser l’AMF politiquement. Les maires qui vont voter ne l’accepteront pas. Sur 35 000 maires, combien ne sont pas dans une logique politicienne ? »

Les listes des deux candidats seront rendues publiques après leur examen en commission jeudi, avant que le Congrès ne se réunisse à Paris du 16 au 18 novembre.

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