« Le sens des responsabilités (…) c’est de ne pas porter le mistigri de la division » avertit Franck Louvrier. Dans son introduction des universités d’été des LR, le maître de cérémonie et maire de La Baule (Loire-Atlantique) donne le ton. Car à huit mois de la présidentielle, la droite court le risque d’une rentrée en ordre dispersé.
Ces derniers jours, deux nouveaux candidats se sont déclarés à une éventuelle primaire de la droite et du centre : Michel Barnier, ancien négociateur en chef de l’UE pour le Brexit, et le député des Alpes-Maritimes Éric Ciotti. Deux se sont désistés : ni Laurent Wauquiez, le président de la région Rhône-Alpes, ni le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau ne se présenteront finalement à une primaire en vue de 2022.
« Personne ne plie le match »
En l’absence de ces deux poids-lourds, la primaire a-t-elle encore un sens ? « La primaire est morte née » lâche d’emblée Franck Louvrier. « Il faut tirer les leçons du passé : avons-nous déjà gagné après une primaire ? Emmanuel Macron a-t-il été porté par une primaire ? » Le maire de La Baule en est convaincu, « un candidat naturel va se dégager d’ici la fin de l’année. La tectonique des plaques va continuer de bouger, c’est un processus normal ».
Pourtant, la question du départage à droite reste entière. « Aucun des candidats ne plie le match » prévient un cadre, favorable à une primaire. A un tour, à deux tours ? Avec quel corps électoral, et à quelle date ? « Même Jean Leonetti (le maire d’Antibes, chargé par le parti d’organiser la primaire, ndlr) ne le sait pas » soupire-t-il.
Barnier, le troisième homme ?
« On a la chance d’avoir des candidats crédibles, de valeur » relativise Franck Louvrier. « Chez En Marche ils n’ont pas le choix, au PS ils cherchent. Quand on se compare, on se rassure ». Quatre candidats sont désormais en lice pour une éventuelle primaire. Seuls deux d’entre eux ont fait le déplacement aux universités d’été.
Dernier candidat déclaré, Michel Barnier arrive le premier sous le soleil de La Baule. Salué par les militants, l’ancien commissaire européen joue la carte de la loyauté. « Ma famille politique va définir des règles, je ne les connais pas encore. Je respecterai les règles ». Une foire d’empoigne à droite ? « Pas à cause de moi » assure-t-il.
Parmi les rares parlementaires présents, la sénatrice de Maine-et-Loire Catherine Deroche lui déclare son soutien. « Il a la stature internationale, et il a toujours été fidèle à sa famille politique, ça compte » rappelle la présidente des affaires sociales du Sénat. « Les médias ont peut-être un peu trop vite installé le match Bertrand-Pécresse » prévient, optimiste, l’entourage de M. Barnier.
Xavier Bertrand joue cavalier seul
Moins sollicité par les militants et les journalistes, Philippe Juvin défend lui aussi l’idée d’une primaire. « Il n’y a pas d’alternative » prévient le médecin urgentiste et maire de La Garenne-Colombe (Hauts-de-Seine), qui fait figure de petit poucet dans la compétition à droite. « Dans le passé, la droite voyait un candidat naturel se dégager. Or, nous n’avons pas de candidat naturel » estime Philippe Juvin. « Il faut donc un processus de sélection. Je continue de tendre la main à Xavier Bertrand. Je lui dis : viens avec nous ».
La pression devrait s’accroître sur Xavier Bertrand, grand absent à La Baule mais bien présent dans les esprits. Le président de la région Haut-de-France maintient coûte que coûte qu’il sera candidat en 2022, indépendamment d’une éventuelle primaire. Une attitude jugée sévèrement par les militants. « Irresponsable » lâche un adhérent. « Il active la machine à perdre » estime un autre.
« Xavier Bertrand prend un risque énorme » analyse un poids-lourd du parti. « Celui d’apparaître comme un diviseur. S’il refuse de jouer le jeu quand tous les autres accepteront, il perd 5 points dans les sondages ».
Pécresse et Ciotti appellent à l’unité
Pendant que Philippe Juvin et Michel Barnier testent leur costume de candidat dans les travées de La Baule, Valérie Pécresse prend la parole sur écran géant. En duplex depuis Brive, où se tenait le même jour la rentrée politique de son mouvement Libres !, la présidente de la région Ile-de-France déroule un discours aux airs de programme.
Sécurité, immigration, éducation, Valérie Pécresse égrène ses thèmes de campagne, avant de proclamer à son tour qu’elle « jouera collectif ». « J’accepterai la règle du jeu qui sera fixée. Mais si je suis candidate, c’est pour gagner, je ne lâcherai rien ! ».
Comme Valérie Pécresse, Éric Ciotti avait initialement décliné l’invitation du maire de La Baule. Il a finalement décidé d’envoyer un message dans une vidéo préenregistrée. « Ça prouve bien qu’ils ont envie d’être ici » s’amuse Franck Louvrier.
« Je ne sais pas s’il y aura une primaire »
Depuis l’arrière-pays niçois où il réunissait ses soutiens, Éric Ciotti appelle également à l’union : « Cette primaire, je ne la vois pas comme un élément de division, mais comme un élément de rassemblement. Il faudra se réunir derrière celle ou celui qui sera le meilleur pour porter le projet d’alternance ».
« Je ne sais pas s’il y aura une primaire » plaisante Bruno Retailleau à la tribune. Avant de remobiliser ses troupes : « Nous pouvons choisir de gagner cette élection présidentielle, car jamais les Français n’ont autant été à l’unisson avec nos valeurs. Mais il y a des conditions : la clarté, la force de notre projet, l’unité ». L’unité, qui était sur toutes les lèvres à La Baule.