Le Bureau du Sénat décidera jeudi de transmettre ou non à la justice les cas d'Alexandre Benalla et Vincent Crase, mais devra surtout trancher...
Par Véronique MARTINACHE
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Le Bureau du Sénat décidera jeudi de transmettre ou non à la justice les cas d'Alexandre Benalla et Vincent Crase, mais devra surtout trancher ceux de trois responsables de l'Elysée, question plus délicate qui divise la majorité sénatoriale de droite.
Sont nommément mis en cause le secrétaire général de l'Élysée Alexis Kohler, le directeur de cabinet Patrick Strzoda, et le chef du groupe de sécurité de la présidence, le général Lionel Lavergne.
"On ne dira que le droit, rien que le droit, tout le droit", insiste le président LR du Sénat, Gérard Larcher, sans rien laisser filtrer de plus.
"Le Sénat et la démocratie jouent gros", a prévenu pour sa part le chef de file des sénateurs LR, Bruno Retailleau, évoquant auprès de l'AFP "des pressions", sans toutefois nommer l'Elysée.
Vincent Crase, ex chargé de la sécurité le 21 janvier 2019
AFP/Archives
Transmettre à la justice les cas des trois responsables de l'Elysée est un dossier hautement sensible sur le plan politique, alors que la réforme institutionnelle voulue par Emmanuel Macron, et dont l'examen pourrait revenir en débat au parlement cet été, prévoit notamment une réduction du nombre de sénateurs.
La commission sénatoriale sur l'affaire Benalla, du nom de l'ex-chargé de mission de l'Elysée, a rendu le 20 février un rapport d'enquête accablant, montrant des "dysfonctionnements majeurs" au sommet de l'État.
Il était accompagné d'une lettre adressée à M. Larcher, co-signée du président LR de la commission des Lois Philippe Bas et des corapporteurs Muriel Jourda (LR) et Jean-Pierre Sueur (PS) qui distinguait trois niveaux de saisine éventuelle du Parquet.
En ce qui concerne les deux principaux protagonistes de l'affaire, Alexandre Benalla et son acolyte Vincent Crase, ils ont demandé au Bureau du Sénat "de saisir le ministère public" de leurs déclarations sous serment, "susceptibles de donner lieu à des poursuites pour faux témoignage".
Point plus polémique, ils ont demandé une saisine de la justice pour vérifier "un certain nombre d'omissions, d'incohérences et de contradictions" relevées lors des auditions des plus hauts collaborateurs du chef de l'État.
"Celles-ci laissent à penser que plusieurs d'entre eux (à savoir MM. Strzoda, Kohler et Lavergne, NDLR) ont retenu une part significative de la vérité", ont-ils souligné.
- "Débat juridique" -
Enfin, ils ont souhaité laisser à l'appréciation du Parquet, au vu du rapport, "s'il y a lieu de procéder à des investigations concernant d'autres personnes et d'autres faits".
Les conclusions de la commission avaient été contestées par la majorité présidentielle, criant au non-respect de la séparation des pouvoirs.
Le Premier ministre Edouard Philippe avait dénoncé les "recommandations ou formulations" "incompréhensibles et souvent injustes" concernant "des fonctionnaires qui travaillent auprès du président de la République".
Le Bureau du Sénat, l'équivalent du conseil d'administration de la haute assemblée, se réunira à 8H30 pour statuer sur les requêtes de la commission qu'a été chargée "d'instruire" la vice-présidente centriste Valérie Létard.
Le Bureau, qui compte 26 membres (10 LR, 6 PS, 5 centristes, 2 RDSE à majorité radicale, 1 LREM, 1 CRCE à majorité communiste et 1 Indépendant), se prononcera à main levée "très sereinement", a assuré M. Larcher.
Mais l'issue du vote apparaît incertaine. Hervé Marseille, le président du groupe centriste, allié des Républicains dans la majorité sénatoriale, a exprimé sans ambiguïté son désaccord "quant à d'éventuelles poursuites contre les trois plus hauts collaborateurs du président de la République".
"La situation de MM. Benalla et Crase me paraît claire, il y a parjure", déclarait vendredi sur Public Sénat le centriste Vincent Capo-Canellas, membre du Bureau. Mais pour ce qui est de MM. Strzoda, Kohler et Lavergne, "là, il y a un vrai débat, il y a un débat juridique".
Une analyse partagée par un sénateur LR, pour qui le "parjure" n'est pas démontré concernant les collaborateurs de l'Elysée.
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