Affaire Éric Dupond-Moretti : le garde des Sceaux interpellé dès la reprise de la séance au Sénat

Affaire Éric Dupond-Moretti : le garde des Sceaux interpellé dès la reprise de la séance au Sénat

Le renvoi devant la Cour de Justice de la République du garde des Sceaux pour « prise illégale d’intérêts » a provoqué un rappel au règlement de la part du sénateur PS Jean-Pierre Sueur. Le ministre, qui participait à un débat sur les états généraux de la justice, a évoqué la présomption d’innocence.
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Le groupe socialiste du Sénat n’entend pas relâcher la pression sur le garde des Sceaux. Au lendemain du renvoi devant la Cour de Justice de la République d’Éric Dupond-Moretti, la session parlementaire au Sénat s’est ouverte par un rappel au règlement. Profitant de la présence du ministre pendant un débat sur les états généraux de la Justice, le sénateur Jean-Pierre Sueur (PS) a listé plusieurs points problématiques qui rendraient difficiles son maintien au gouvernement.

L’ancien président de la commission des lois a rappelé le principe tacite, édicté par Emmanuel Macron lors de sa campagne en mars 2017. Un ministre doit quitter le gouvernement s’il est mis en examen. « D’ailleurs, un précédent garde des Sceaux a été amené à quitter le gouvernement », a rappelé le sénateur du Loiret, en référence à la démission de François Bayou en juin 2017, en pleine affaire des assistants parlementaires du MoDem au Parlement européen.

Jean-Pierre Sueur a surtout reproché aux avocats d’Éric Dupond-Moretti de tenir des propos « mettant lourdement en cause les plus hautes autorités de la magistrature », dont le procureur général près la Cour de cassation. Mais surtout, le garde est Sceaux pourrait « contribuer à la désignation du prochain procureur général près de la Cour de cassation, qui serait son accusateur », s’est étonné le sénateur. L’Union syndicale des magistrats et le Syndicat de la magistrature se sont déjà émus de ce potentiel conflit d’intérêts. L’actuel procureur général près la Cour de cassation François Molins doit prendre sa retraite en 2023.

« On peut se demander comment ledit garde des Sceaux peut être garant de l’indépendance de la justice », s’est exclamé le parlementaire, en direction du ministre mis en examen pour « prise illégale d’intérêts » en juillet 2021. L’ancien ténor du barreau est accusé d’avoir profité de sa fonction pour régler des comptes avec des magistrats auxquels il s’était opposé quand il était avocat. Des accusations que conteste l’intéressé, qui a assuré n’avoir fait que « suivre les recommandations de son administration ».

Éric Dupond-Moretti invite Jean-Pierre Sueur à lire le rapport Guigou sur la présomption d’innocence

Ce matin, en marge d’un déplacement, Éric Dupond-Moretti a déclaré que sa démission n’était « pas à l’ordre du jour », fort du soutien de l’exécutif. « La Première ministre a réaffirmé hier toute la confiance qu’elle me portait », a-t-il précisé face aux journalistes. La position est intenable, à écouter Jean-Pierre Sueur. Le sénateur, au nom de son groupe, a lancé un appel au président du Sénat, Gérard Larcher, pour qu’Elisabeth Borne vienne s’expliquer sur sa position devant le Sénat. Le socialiste aimerait notamment que la cheffe du gouvernement s’exprime sur la façon dont « l’indépendance de la justice » peut être garantie dans ces conditions.

« Particulièrement heureux de revenir » devant les sénateurs, Éric Dupond-Moretti a d’abord feint d’ignorer l’interpellation du sénateur. Ce n’est qu’après sa prise de parole sur les conclusions des états généraux de la justice que le garde des Sceaux a souhaité répondre, « sans aucune polémique ». « Mes avocats expriment ce qu’ils estiment nécessaire à ma défense », a-t-il simplement indiqué, avant de rappeler l’existence des travaux de l’ancienne garde des Sceaux Élisabeth Guigou (PS) sur la présomption d’innocence, remis en octobre 2021. « L’impératif naturellement m’est interdit quand je m’adresse à vous, mais je vous invite à le lire », a conclu Éric Dupond-Moretti.

» Lire aussi : Éric Dupond-Moretti renvoyé devant la Cour de Justice de la République : comment fonctionne cette juridiction d’exception ?

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