« Je ne réponds à rien. Que chacun se démerde. Il y a des porte-parole pour ça..» évacue d’entrée un sénateur sarkozyste. Ambiance des mauvais jours, ce mardi, à la réunion hebdomadaire des Républicains. La polémique qui devait faire « pschitt » se poursuit et ne semble pas se dégonfler. Depuis les révélations du Canard Enchaîné sur les emplois supposés fictifs de Pénélope Fillon, un épisode rythme chaque jour ce feuilleton politico-médiatico-judiciaire. A tel point que pour Bruno Retailleau, président des sénateur LR parle « de prise d’otage » du début de campagne de François Fillon. Derniers rebondissements en date, selon RTL Pénélope Fillon aurait été rémunérée en tant que collaboratrice parlementaire jusqu’en novembre 2013 et non jusqu’à la fin 2012 comme l’indiquait l’hebdomadaire satirique. Et alors que des enquêteurs se sont fait remettre des documents, ce matin, au bureau de François Fillon à l’Assemblée nationale, le Parisien révèle que son épouse n’aurait jamais eu de badge d’entrée, ni d’adresse mail au Palais Bourbon.
Pas de « plan B » pour le moment
Derrière les sourires crispés, et les refus d’interviews polis, un mot d’ordre émerge au groupe LR du Sénat. « Il n y a pas de plan B. François Fillon est notre candidat. Il est complètement serein ». Le mot est passé également chez députés LR où le groupe « soutient unanimement » et « fait bloc » autour du candidat LR d’après Christian Jacob. En coulisses, les parlementaires ont pourtant de quoi s’inquiéter. Les messages qui remontent des circonscriptions ne sont pas bons. « C’est le bordel » résume laconiquement un élu de province. Plus prolixe, le sénateur de Moselle, François Grosdidier s’inquiète des conséquences du climat ambiant sur l’électorat centriste. « Nos supporters restent derrière Fillon. C’est déjà ça. Par contre, cette affaire risque de rebuter une frange plus flottante de nos électeurs qui risquent déformais de se détourner vers Macron ». « Bien sûr que l’opinion est troublée, bien sûr qu’il fallait que nous échangions entre nous (…) pour se donner des arguments, pour répondre au travail de démolition qui est fait. Mais ce n’est pas un travail de re-motivation, c’est un travail d’argumentation qui est nécessaire » ajoute-il.
Les conséquences de la primaire de droite
Avant même les révélations du Canard Enchaîné, la campagne de François Fillon faisait du sur place. Ses propositions sur la santé ou sur la réduction du nombre de fonctionnaires suscitaient les critiques jusque dans son propre camp. Pour Hugues Portelli, sénateur du Val-d’Oise, la difficulté est « de passer d’une campagne des primaires à une campagne présidentielle ». « Et visiblement ça ne se fait pas tout seul. Ce n’est pas simplement un problème politique, c’est un problème d’organisation » tranche-t-il. Le sénateur LR Alain Houpert, proche de Nicolas Sarkozy, considère également que la campagne de la primaire de droite pèse sur la situation actuelle. Selon lui le candidat LR paye d’avoir dévoilé son programme trop tôt. « La question à se poser c’est : est-ce que les primaires sont une bonne chose pour la démocratie ? Parce que les candidats des primaires font un programme, le développe (…) Emmanuel Macron fait un diagnostic, le même que François Fillon (…) mais (Emmanuel Macron) vient de retarder son programme parce que lui s’aperçoit que dire les choses, dire les vérités, c’est péjoratif et les gens n’aiment pas ça ».
Qui sont les sources du Canard ?
L’autre question qui taraude les parlementaires LR concerne les origines des fuites au Canard Enchainé. Tant et si bien, que sur RFI, le député LR Eric Woerth estime que « la presse, de temps en temps, doit pouvoir accepter d’ouvrir ses propres sources pour dire du début jusqu‘à la fin comment les choses se sont passées ». Au groupe LR du Sénat, selon nos propres sources, c’est Gérard Longuet, très proche de François Fillon, qui a émis le souhait d’une identification rapide des coupables. Face caméra, il ajoute : « on est un petit peu dubitatifs, sur les origines. Parce que sans des appuis…. Il y a des documents qui sont publics. C’est le cas des attachés parlementaires. Et il y a des documents qui sont privés et qui ne peuvent être connus que des administrations fiscales ».
Chercher « la taupe » à quelques heures de la sortie d’un nouveau numéro du Canard Enchainé. Un sénateur fébrile s’interroge. « Vous croyez qu’ils vont sortir autre chose ? ». L’identité des clients de la société « 2F Conseil » de François Fillon suscite la polémique, depuis un article de l’hebdomadaire satirique, il y a quelques semaines. Bruno Retailleau a déminé le terrain, ce matin : « il n'y a pas une société russe, il n'y a pas un groupe russe, il n'y a pas l'Etat russe, les choses sont claires » a-t-il martelé.
Reportage ci-dessus de Jérôme Rabier