« Agir », un nouveau parti qui ne séduit pas au Sénat

« Agir », un nouveau parti qui ne séduit pas au Sénat

Un nouveau parti de droite a été officiellement lancé ce week-end : « Agir, la droite constructive ». Chez les sénateurs LR, la démarche suscite des interrogations mais pas de ralliement.
Simon Barbarit

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

« Ce nouveau parti me paraît un peu désossé. En politique, pour exister, pour faire passer ses idées, il faut être clair. Or, ce n’est pas le cas des constructifs. On l’a encore vu ce week-end avec le départ de Thierry Solère chez La République en marche ». Le sénateur LR de l’Hérault, Jean-Pierre Grand, soutien d’Alain Juppé lors de la primaire de droite, n’est pas tenté pas l’aventure « Agir, la droite constructive » lancée officiellement ce week-end par 19 élus.

Émanation politique des deux groupes parlementaires, Les Constructifs à l’Assemblée nationale, et Les Indépendants - République et Territoires au Sénat (composé de 11 sénateurs), ce nouveau parti entend rester « libre » tout en soutenant « les réformes engagées dans de nombreux domaines par l'actuel gouvernement ». Surtout  « Agir » refuse « de voir la droite s'enfermer dans une ligne identitaire, autoritaire eurosceptique et ultra-conservatrice. Cette stratégie exacerbe les tensions de la société française et conduit à l'échec» expliquent-ils, en référence à la très probable accession de Laurent Wauquiez à la tête de LR.

19 fondateurs moins un ?

À peine lancé, à peine affaibli. En effet, le départ surprise de l’un de ces fondateurs, Thierry Solère, vers LREM, a largement parasité le lancement de la nouvelle formation. Et même si Thierry Solère n’a cessé de répéter tout le dimanche l’amitié qu’il entretenait avec Franck Riester, le président du groupe Constructif à l’Assemblée nationale, la démarche des 19 élus interpelle. Les centristes de l’UDI regroupent déjà une constellation de micropartis alors quel espace politique pour le ni LREM, ni LR ?

D’autant, qu’il faut déjà mettre un des fondateurs entre parenthèses. Le sénateur, apparenté au groupe LR, Robert del Picchia demande à réfléchir. « Ce n’est pas encore définitif. De toute façon le parti n’est pas encore créé (les statuts devront être débattus le 5 décembre prochain, avant d’être définitivement déposés NDLR). J’ai signé parce que je trouve la démarche intéressante, mais je ne suis pas encore certain d’en être. Il faut que je discute avec certaines personnes et voir comment ça se passe » lâche-t-il énigmatique.

« Je ne vois pas comment on pourra accepter l’idée d’une double appartenance »

Pourra-t-on être à la fois membre des Républicains et membre d’Agir ? « Oui », répond Franck Riester. Non, répond-on du côté de LR. Le psychodrame qui a entouré l’exclusion de Gérald Darmanin, Sébastien Lecornu, Franck Riester ou encore Thierry Solère est encore dans les têtes. « Je ne vois pas comment on pourra accepter l’idée d’une double appartenance. C’est mon point de vue d’ancien secrétaire général adjoint de l’UMP. On l’a bien dit à Riester et tous les autres, ils se sont exclus eux-mêmes » commente le sénateur du Nord, Marc-Philippe Daubresse.

Néanmoins, pour le moment, ce n’est pas le cas de tous les Constructifs à l’image de la sénatrice Colette Mélot. « Moi, je n’ai pas été exclue des Républicains, en tout cas on ne me l’a pas fait savoir. J’ai même reçu le formulaire pour voter à l’élection du Président » confie-t-elle

Pour ce qui est d’une éventuelle exclusion du groupe LR du Sénat, cas qui concerne Robert Del Picchia et la sénatrice Fabienne Keller, la question n’est pas tranchée. « La majorité de droite et du centre constituée autour de Gérard Larcher (président du Sénat) est très large. Il faut demander à Bruno Retailleau (patron des sénateurs LR), mais l’idée c’est de rassembler de multiples tendances. Nous allons d’ailleurs décider avant la fin de l’année, si nous changeons le nom de notre groupe » rappelle Marc-Philippe Daubresse.

Sur le plateau de Sénat360, la sénatrice LR, Fabienne Keller, cofondatrice « d’Agir », indique que le président du Sénat, Gérard Larcher et  Bruno Retailleau lui ont « donné des assurances comme quoi ce groupe serait ouvert aux différentes sensibilités »

Agir: Fabienne Keller: " Gérard Larcher m'a donné des assurances sur l'ouverture du groupe LR"
01:00

« Quand on est Constructif, on ne pèse ni dans la majorité présidentielle, ni dans l’opposition ».

Mais même chez les juppéistes du groupe, « Agir, la droite constructive » ne fait pas beaucoup d’émules. « J’ai été sollicité. J’ai expliqué que ça ne me paraissait pas cohérent. C’est une démarche qui disperse, qui balkanise, et donc qui affaiblie ceux qui s’inscrivent dans une droite humaniste » considère le sénateur François Grosdidier. Il résume l’équation de la manière suivante : « quand on est Constructif, on ne pèse ni dans la majorité présidentielle, ni dans l’opposition ».

Quant à l’argument d’une droite qui refuse de s’inscrire dans la ligne conservatrice de Laurent Wauquiez, le sénateur Jean-Pierre Grand le réfute. « Quand Laurent Wauquiez sera élu, il changera de discours. Quand vous êtes à la tête d’un grand parti, vous êtes obligés d’ouvrir, sinon c’est un échec assuré aux prochaines élections ».

 

 

Dans la même thématique

Rally For Palestinian Prisoners SWITZERLAND.
4min

Politique

Hungry for Palestine : le collectif en grève de la faim depuis 23 jours reçu au Sénat

Vingt-trois jours de jeûne, seize villes françaises traversées : le collectif Hungry for Palestine était au Sénat le 22 avril 2025. Tous les membres du mouvement, présents au palais du Luxembourg, sont en grève de la faim depuis le 31 mars pour dénoncer l'inaction des pouvoirs publics et le non-respect du droit international dans la bande de Gaza. Le mouvement est né de l'impulsion de soignants, tous de retour de mission à Gaza.

Le

Tondelier 2
8min

Politique

Malgré des critiques, Marine Tondelier en passe d’être réélue à la tête des Ecologistes

Les militants du parti Les Ecologistes élisent leur secrétaire national. Bien que critiquée, la sortante Marine Tondelier fait figure de favorite dans ce scrutin où les règles ont été changées. La direction s’est vue accusée par certains de vouloir verrouiller le congrès. Si les écolos ne veulent pas couper avec LFI, le sujet fait débat en vue de la présidentielle.

Le

SIPA_01208671_000002
5min

Politique

Prisons attaquées : vers une nouvelle loi pour permettre l’accès aux messageries cryptées par les services de renseignement

Après la série d’attaques visant plusieurs établissements pénitentiaires, coordonnées au sein un groupe de discussion sur Telegram, le préfet de police de Paris, Laurent Nunez regrette que la disposition de la loi sur le narcotrafic, permettant aux services de renseignement d’avoir accès aux messageries cryptées, ait été rejetée les députés. La mesure pourrait réapparaître dans une nouvelle proposition de loi du Sénat.

Le

Municipales 2026 : pourquoi le prochain mandat des maires pourrait durer sept ans, au lieu de six
4min

Politique

Municipales 2026 : pourquoi le prochain mandat des maires pourrait durer sept ans, au lieu de six

La question d’un report des élections municipales de 2032 est à l’étude au ministère de l’Intérieur, en raison de la proximité d’un trop grand nombre de scrutins, notamment la présidentielle. Si le calendrier devait être révisé, et avec lui la durée du mandat des maires élus l’an prochain, cela nécessiterait une loi. Ce serait loin d’être une première sous la Ve République.

Le