Inédite inversion des votes cet après-midi à l’Assemblée nationale autour de la proposition de loi du sénateur LR Laurent Duplomb qui vise à réintroduire certains pesticides. Les députés favorables au texte ont voté une motion de rejet préalable, défendue par le rapporteur LR Julien Dive, alors que les opposants à la proposition de loi ont tenté de maintenir son examen dans l’hémicycle.
Le bloc central et le RN entendaient faire adopter la motion pour que le texte poursuive directement sa navette parlementaire devant une commission mixte paritaire (CMP), réunissant à huis clos sept députés et sept sénateurs. Une manière de sauter l’obstacle des quelque 3 500 amendements déposés, dont 1 500 des écologistes et 800 des insoumis.
Une nécessité face à un « blocage en bonne et due forme » contre un texte « essentiel » pour les agriculteurs, selon Julien Dive. « La marque d’une fébrilité du camp gouvernemental » pour la cheffe des députés écologistes Cyrielle Chatelain, qui estime auprès de l’AFP que le bloc central ne « veut pas assumer son vote sur certaines mesures ».
Parmi lesquelles la réintroduction, à titre dérogatoire, de l’acétamipride, pesticide de la famille des néonicotinoïdes interdit en France depuis 2018. Ses effets chez l’humain font l’objet d’inquiétudes, même si ces risques restent incertains, par manque d’études d’ampleur. (lire notre article)
Une autre solution a été mise sur la table en milieu d’après-midi par la présidente de l’Assemblée Yaël Braun-Pivet : le recours à un « temps législatif programmé », disposition prévue par le règlement de l’Assemblée permettant de fixer un nombre d’heures maximal de débats, réparti entre les groupes en fonction de leur poids, n’a pas été retenu.
Le texte va poursuivre son chemin vers la CMP sur la base de la version des sénateurs, favorisant ces derniers dans les négociations. Mais même en cas d’accord dans cette instance, il faudra un dernier vote dans chaque chambre, et l’équilibre du texte sera particulièrement scruté à l’Assemblée.
Car la version adoptée au Sénat, à l’initiative du sénateur LR Laurent Duplomb, regorge de sujets clivants. Par exemple le degré d’influence du gouvernement dans le travail de l’agence sanitaire Anses sur les autorisations de pesticides, ou encore des dérogations environnementales pour certains projets de prélèvements et stockage d’eau.
En commission les députés avaient ajouté des garde-fous sur les pesticides, voire supprimé des dispositions sur l’Anses ou le stockage de l’eau.
« Nous voterons la motion de rejet […] ça ne vaut pas quitus pour le texte » in fine, a prévenu lundi le patron des députés MoDem Marc Fesneau, demandant « des bougés en CMP ».