Aide-soignante, avocat ou cheminot: quand les députés parlent de leur propre retraite
Certains s'appuient volontiers sur leur métier d'origine, d'autres s'y refusent: l'examen de la réforme des retraites renvoie chaque député à...

Aide-soignante, avocat ou cheminot: quand les députés parlent de leur propre retraite

Certains s'appuient volontiers sur leur métier d'origine, d'autres s'y refusent: l'examen de la réforme des retraites renvoie chaque député à...
Public Sénat

Par Anne Pascale REBOUL

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Certains s'appuient volontiers sur leur métier d'origine, d'autres s'y refusent: l'examen de la réforme des retraites renvoie chaque député à son propre parcours professionnel.

- Caroline Fiat, l'aide-soignante

En fin de carrière, "vu que j'aurai l'âge d'être en Ehpad (maison de retraite), est-ce qu'en compensation je pourrai dormir sur place le soir ?", a ironisé l'insoumise en commission.

Après avoir été ambulancière, téléprospectrice et encore assistante de direction, Caroline Fiat a passé le concours d'aide-soignante, son rêve. Elle a exercé en Meurthe-et-Moselle durant 10 ans. Mais "je n'avais plus le temps de parler avec les patients", déplore auprès de l'AFP la députée de 43 ans.

Horaires décalés, travail souvent "humainement difficile" et physiquement lourd, charge accrue au fil des années: elle s'affiche solidaire "des personnels hospitaliers qui n'y arrivent plus" et sont mobilisés depuis 11 mois. Caroline Fiat s'inquiète que, dans sa réforme des retraites, le gouvernement s'intéresse "aux critères de pénibilité plutôt qu'à la pénibilité elle-même".

- André Chassaigne, le professeur

Le chef de file des députés communistes, 69 ans, qui a fait l'Ecole normale d'instituteurs à 16 ans, est devenu professeur de lettres et d'histoire-géo puis principal de collège pendant 21 ans à Saint-Amant-Roche-Savine (Puy-de-Dôme). Sa femme était aussi prof. Ils ont une fille institutrice, une autre documentaliste.

C'est dire s'il connaît le milieu: "Il faut une revalorisation des salaires, notamment pour les professeurs des écoles. Le métier, exercé jusqu'à 64-65-66 ans, est de plus en plus difficile, par rapport aux enfants d'abord, alors qu'il y a un appauvrissement des familles en particulier en milieu rural. Les parents sont devenus plus exigeants aussi. Il y a une demande de considération des enseignants".

- Stéphane Viry, l'avocat

Le député socialiste Stéphane Viry, à l'Assemblée nationale à Paris, le 23 juillet 2019
Le député socialiste Stéphane Viry, à l'Assemblée nationale à Paris, le 23 juillet 2019
AFP/Archives

Toujours associé d'un cabinet à Epinal mais portant moins la robe, le député LR de 50 ans dissocie activité professionnelle et mandat. Il a à coeur de défendre tous les régimes autonomes, pas seulement celui des avocats: experts comptables, architectes, corps médical, pharmaciens... "Ces régimes ne sont pas anachroniques. Dès lors qu'ils sont excédentaires et bien gérés, pourquoi les casser ?"

"Les assujettis ne réclament pas le système universel" voulu par Emmanuel Macron. Plusieurs milliers d'avocats, infirmiers ou encore stewards ont défilé début février à Paris, demandant qu'on les laisse "tranquilles". Les barreaux connaissent une grève dure depuis plus d'un mois.

- Dominique Potier, l'agriculteur

Issu d'une famille de paysans sur plusieurs générations, il s'est installé aux côtés de ses parents à 24 ans puis a fondé un Gaec (groupement d'exploitation en commun). Le député PS de Meurthe-et-Moselle, 55 ans, a passé la main mais défend volontiers les agriculteurs, qui "cochent presque toutes les cases" de pénibilité: "chaud, froid, charges, horaires amplifiés, sans parler des produits chimiques".

Attention à l'âge de départ, donc. Dominique Potier juge "trop tardive" la promesse d'une pension à 85% du Smic à partir de 2025. Il faut aussi "faire justice aux agriculteurs déjà retraités".

- Benoît Simian, le cheminot

Entré à 24 ans à la SNCF, l'élu LREM est passé au fret puis aux ressources humaines comme cadre, à Bordeaux. "J'ai signé il y a 10 ans au statut", explique cet ancien délégué du personnel qui a "milité à la CGT-cheminots" autrefois.

En congé sans solde, il se remémore ses débuts de carrière aux 3x8, week-ends et fêtes compris, à un poste de gestion des crises: suicides sur les voies, problèmes de matériel... "Le point retraite doit peser davantage quand il y a de la pénibilité", à la SNCF comme dans les hôpitaux ou sur les chantiers, défend Benoît Simian, 36 ans. Le régime spécial des cheminots doit disparaître mais "la transition sera longue", rassure-t-il.

- Laure de La Raudière, multi-statuts

La députée Agir Laure De la Raudiere, le 28 juin 2017 à l'Assemblée nationale à Paris
La députée Agir Laure De la Raudiere, le 28 juin 2017 à l'Assemblée nationale à Paris
AFP/Archives

Ingénieure en télécommunications, la députée Agir a été fonctionnaire pendant ses études à Normale Sup, salariée d'une start up et encore cheffe d'entreprise. "Impossible de calculer ma retraite", assure la quinquagénaire, qui a reçu un relevé de carrière incomplet.

Il est temps de réformer, selon elle: "Le système universel par points sera beaucoup plus simple et lisible, il permettra une grande mobilité".

"Le système actuel est injuste, j'ai toujours entendu ça", cite l'élue d'Eure-et-Loire. Elle préconise une anticipation de "l'évolution des métiers" pour réussir la réforme.

Partager cet article

Dans la même thématique

Capture
5min

Politique

Un accord de libre-échange entre la Chine et l'Union européenne serait "extrêmement dangereux" pour cette eurodéputée

Scandale Shein, restrictions sur les terres rares, déferlement d'exportations sur le Continent : ces dernières semaines ont fourni aux européens de nombreux motifs d'inquiétude dans leur relation avec Pékin. Alors que Donald Trump a scellé un accord d'un an avec le président Xi Jin Ping, l'UE semble sur le banc de touche. Un sursaut est-il possible ? Ou bien sommes-nous condamnés à rester à la remorque de la Chine ? Débat dans "Ici l'Europe" avec les eurodéputés Sandro Gozi (Renew, France) et Estelle Ceulemans (S&D, Belgique).

Le

Photo Cazeneuve
11min

Politique

Attentats du 13 novembre 2015, le récit de Bernard Cazeneuve : « Très vite, on a conscience que nous sommes confrontés à une attaque de grande ampleur »

ENTRETIEN - Dix ans après les attentats de Paris et de Seine-Saint-Denis, qui ont coûté la vie à 130 personnes, l'ancien ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, revient auprès de Public Sénat sur cette nuit de terreur, et la gestion de crise aux côtés du Président de la République et du Premier ministre.

Le

Aide-soignante, avocat ou cheminot: quand les députés parlent de leur propre retraite
3min

Politique

« Il n’y a aucune délinquance dans les écoles de musique », affirme le chef d’orchestre Jean-Claude Casadesus

Il est sans conteste le maestro français le plus célèbre de sa génération. A 92 ans, Jean-Claude Casadesus continue de remplir les plus belles salles du monde sans jamais renier son attachement à la région du Nord. Lui qui a créé puis dirigé l’orchestre national de Lille, s’est engagé toute sa vie pour rendre la musique classique accessible à tous. Invitée de Rebecca Fitoussi dans Un monde, Un regard, Il revient sur son immense carrière marquée par la passion et le partage.

Le

Paris: Senate pension debat
6min

Politique

Retraites : la gauche du Sénat désunie sur la suspension de la réforme

A partir du 19 novembre, le Sénat examinera en séance publique le projet de loi de financement de la Sécurité sociale et sa mesure phare : la suspension de la réforme des retraites. Une concession du gouvernement faite au PS qui n’a aucune chance d’être adoptée à la haute assemblée à majorité de droite. Les socialistes ne devraient également ne pas être suivis par les communistes et écologistes sur le vote de cette mesure.

Le