Aides sociales : « Macron torpille sa propre communication »

Aides sociales : « Macron torpille sa propre communication »

La vidéo diffusée par l’Elysée avant le discours d’Emmanuel Macron sur le social (voir ci-dessous) est un « procédé racoleur (…) pour attirer l’attention », qui vise à dire « ma vraie pensée est de droite », selon Philippe Moreau-Chevrolet, président de MCBG conseil. Le Président a ensuite présenté sa promesse du reste à charge zéro, lors d’un discours […]
Public Sénat

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

La vidéo diffusée par l’Elysée avant le discours d’Emmanuel Macron sur le social (voir ci-dessous) est un « procédé racoleur (…) pour attirer l’attention », qui vise à dire « ma vraie pensée est de droite », selon Philippe Moreau-Chevrolet, président de MCBG conseil.

Le Président a ensuite présenté sa promesse du reste à charge zéro, lors d’un discours devant le congrès de la Mutualité française. Une position qui renvoie pour Philippe Moreau-Chevrolet à celle « de Bush, dans les années 90, c'est-à-dire les conservateurs avec un cœur ». Mais le risque est d’envoyer « deux messages contradictoires ». Selon le communicant, « on arrive un peu avec cette déclaration aux limites du système En Marche ». Entretien.

La conseillère com’ de l’Elysée a diffusé mardi soir une vidéo avec un vrai/faux off où on voit Emmanuel Macron préparer son discours sur la politique sociale et déclarant qu’« on met un pognon dingue dans les minima sociaux ».  Comment voir cet élément de communication, diffusé la veille d’un discours où on l’attend sur le social ?
C’est repris partout, comme ça faisait longtemps qu’il n’était plus sur la scène française mais davantage sur la scène internationale. C’est à la fois une entrée en campagne pour les européennes et les municipales. Il fait du Sarkozy, on utilise des termes forts, un format qui cherche l’authenticité. Ça a l’air pris sur le vif. Mais il y a du montage, un regard caméra. Il sait qu’il est filmé. C’est du faux off. Ça ne peut pas être bien fait. Comme c’est diffusé par la communication de l’Elysée, tout de suite, on voit que c’est de la com’. En revanche, c’est fait pour choquer. C’est un procédé racoleur. Mais c’est efficace car toute l’attention va se concentrer sur Emmanuel Macron. Il parle beaucoup, donc il faut trouver des procédés pour attirer l’attention. On crée cette forme de teaser pour que les gens se souviennent qu’il y a une intervention du Président.

Le risque n’est-il pas de parasiter ensuite le discours que cette vidéo annonce ?
Le gros problème, c’est que les deux messages sont contradictoires. Il dit qu’il y a « trop de pognon ». Et après, il annonce des mesures supposées sociales. Il torpille sa propre communication. Il est pris dans sa contradiction, avec un engagement de campagne fort, et une volonté de continuer à séduire l’électorat de droite, car il est en campagne. Il est dans un exercice difficile. Il essaie de ménager la chèvre et le chou. Et on peut penser qu’il envoie aussi un message à sa majorité : ma ligne est celle-ci, ce que je pense, au fond, c’est ça. Il dit en somme « moi, ma vraie pensée est de droite, une pensée libérale ». C’est un acte d’autorité, au moment où il est mis en cause sur sa politique internationale.

Finalement, il est en quelque sorte dans la disruption sur sa propre communication…
Oui, il est en contradiction. On arrive un peu avec cette déclaration aux limites du système En Marche, aux limites du grand écart entre des cadres qui viennent du PS, qu’il a vraiment siphonné, et une logique politique de droite, qui s’impose dans le débat national. Et on voit que le seul pôle qui tient, c’est plus la droite.

Dans son discours, il présente le reste à charge zéro comme une « conquête sociale essentielle » pour les plus pauvres, tout en annonçant des « économies à faire sur la part inutile » des dépenses sociales. Le social version Macron peut-il parler à sa gauche ?
Ce sont des concessions faites à sa gauche. Mais par la vidéo, il rassure l’électeur de droite. Il dit mon cœur est à droite mais je fais quelques concessions. C’est un peu la position de Bush dans les années 90, c'est-à-dire les conservateurs avec un cœur. On l’a compris, il n’y a pas de tournant social.

Au risque de créer des tensions dans sa majorité…
Oui, ça crée des tensions dans sa majorité. Les députés retournent dans leur circonscription et il faudra gérer avec les déçus du macronisme. Il y a cette confrontation avec la réalité du pouvoir. Il ne peut plus fuir la réalité du paysage politique. Le « et de droite et de gauche », le « en même temps », En Marche, tout ça était un formidable marketing politique. Mais la réalité du débat politique français, c’est  qu’il y a un clivage droite-gauche. Il existe toujours, il revient. Maintenant, comme il a basé toute sa conception sur le dépassement des clivages, il va se confronter à la réalité. Auprès des électeurs de droite, il a donné tellement de gages que ça ne peut pas lui nuire. On verra si ça le fait remonter dans l’électorat populaire.

Partager cet article

Dans la même thématique

13-UNIS : la course en hommage aux 10 ans des attentats de novembre 2015
5min

Politique

Commémoration du 13 novembre : 10 ans après les attentats, la menace terroriste « s’accroît »

Alors que la France rend hommage aux victimes des attentats de Paris de 2015, le ministre de l’Intérieur a appelé les préfets à « renforcer les mesures de vigilance ». Le procureur national antiterroriste (Pnat) Olivier Christen, indique même que la menace terroriste, jihadiste, d’ultradroite ou émanant d’Etats étrangers « s’accroît ».

Le

France Paris Shooting
4min

Politique

Attentats du 13 novembre 2015 : dix ans après, comment les lois antiterroristes ont évolué ?

Dix ans après le traumatisme des attentats du 13 novembre 2015, le cadre juridique permettant la prévention et la répression d’actes terroristes a largement évolué. Après les attaques du Bataclan, des terrasses parisiennes et du Stade de France ayant fait 131 morts et plus de 400 blessés, la France avait basculé dans l’état d’urgence, un régime juridique d’exception qui a influencé les évolutions législatives.

Le

Aides sociales : « Macron torpille sa propre communication »
4min

Politique

Immigration : Laurent Nunez a « bon espoir que le plan 3 000 places de centres de rétention administrative aboutisse en 2029 »

A l’approche de l’examen du budget, le ministre de l’Intérieur, Laurent Nunez était auditionné par commission des lois du Sénat a présenté des crédits en hausse pour la mission sécurité et immigration de son ministère. Il en a profité pour confirmer que l’objectif 3 000 places en des centres de rétention administrative, initialement prévu pour 2027, ne sera pas tenu, comme l’avait révélé un rapport du Sénat.

Le

5min

Politique

Budget : des sénateurs souhaitent assouplir le droit des successions pour favoriser les dons aux associations

Les sénateurs Bernard Jomier et Grégory Blanc (Place Publique) ont déposé un amendement au projet de loi de finances 2026, visant à élargir la liberté des légataires dans la transmission de leur patrimoine, pour favoriser les donations aux causes d’intérêt général. De quoi permettre un débat « le plus large possible » selon les élus, dans une séquence budgétaire intense.

Le