Alcool : les « prémix » à base de vin dans le viseur des sénateurs
Dans le cadre du budget de la Sécu, les sénateurs PS veulent taxer les prémix à base de vin, à destination des adolescents. Le sénateur Bernard Jomier juge ces produits « Inacceptables ». A l’inverse, certains sénateurs veulent ralentir la hausse des taxes sur les rhums en Outre-Mer.

Alcool : les « prémix » à base de vin dans le viseur des sénateurs

Dans le cadre du budget de la Sécu, les sénateurs PS veulent taxer les prémix à base de vin, à destination des adolescents. Le sénateur Bernard Jomier juge ces produits « Inacceptables ». A l’inverse, certains sénateurs veulent ralentir la hausse des taxes sur les rhums en Outre-Mer.
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Ce sont de purs produits marketing. Les prémix, ces boissons qui mélangent alcool et sucre, ont pour cible les jeunes. Dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale 2019, dont l’examen a débuté en fin de journée lundi 12 novembre au Sénat, les sénateurs du groupe PS veulent s’attaquer à ces boissons.

Depuis 2004, une taxe existe déjà sur les prémix du type « Smirnof Ice ». Conséquence : leurs ventes avaient fortement décru. Mais la taxe ne touche pas les mélanges à base de vin. Les alcooliers ont donc profité de ce trou législatif. Un amendement PS, présenté par Bernard Jomier, entend le combler.

« Stratégie des alcooliers pour viser les adolescents »

« En faisant la transition entre le sucre, que les enfants aiment, et l’alcool, il y a une stratégie des alcooliers pour viser les adolescents, la tranche d’âge 12-15 ans, ce qui est totalement inacceptable » dénonce le sénateur de Paris, apparenté PS et médecin de profession. Il ajoute :

« Les produits ont des noms très évocateurs, comme le "Rosé Sucette" ». Ça montre bien qu’on s’adresse aux enfants. C’est scandaleux ».

Si ce rosé goût mandarine ne suffit pas, pour les amateurs, il existe aussi une version « Rouge Sucette » au goût de cola…

L’amendement vise à porter la taxe sur ces boissons à 11 euros par décilitre d’alcool. Ces produits, basés sur « des vins importés » précise le sénateur, sont vendus autour de 3 euros. Ils passeraient à environ 10 euros.

Dans un amendement similaire, la sénatrice centriste Jocelyne Guidez souligne que le propriétaire de la marque en question a notamment pu préciser que ces bouteilles « seront un tremplin permettant aux néophytes d’accéder aux vins plus classiques. Notamment pour un public plutôt jeune et féminin ».

Amendement rejeté à l’Assemblée

A l’Assemblée, le député LREM Éric Alauzet avait tenté de taxer ces prémix à base de vin. Mais la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a rejeté son amendement. Tout en assurant sa volonté de lutter contre le binge drinking chez les jeunes, elle a souligné que l’amendement était mal ciblé, le cidre étant notamment « inclus dans le champ d’application ». Agnès Buzyn renvoie au plan de lutte contre les drogues et conduites addictives, bientôt présenté par la MILDECA (Mission de lutte contre les drogues et les conduites addictives).

Bernard Jomier assure avoir pris en compte les remarques de la ministre dans son amendement. De son côté, le président LR de la commission des affaires sociales, Alain Milon, pourrait donner un avis favorable à l’amendement des sénateurs PS. Si sa commission ne s’était pas encore penchée dessus lundi midi, il affirme à publicsenat.fr qu’il sera « d’accord. A priori, je le voterai ». « Le sucre et les alcools, chez les jeunes, c’est niet » prévient Alain Milon.

Des cahiers pour éduquer les enfants au vin

Les mineurs sont une cible de choix pour les producteurs. Ce sont de futurs consommateurs, dans un contexte de baisse des ventes. Vin et société, le relais du lobby viticole, mène ainsi des actions à destination des jeunes, que dénonce aussi Bernard Jomier. « Sous découverte de l’œnologie, ils organisent des sorties avec les écoles » pointe le sénateur du groupe PS.

Sur le site de l’organisme professionnel, on trouve plusieurs publications pour le jeune public. « Le petit vigneron jurassien », cahier pour les 3/6 ans, est présenté comme « un support pouvant tout à fait convenir à une activité en classe ». Parmi les jeux à colorier et labyrinthes « du chemin de la vigne », on demande à l’enfant de trouver la bonne étiquette qui correspond à la bouteille. Autre petit jeu à faire en famille : « Quels parfums de fruit peux-tu retrouver en sentant un vin rouge du Jura ? » Entre la « poire », la « pomme » ou la « framboise », on est plus proche du test d’œnologie que du cahier découverte…

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Une taxe pour les bonbons et boissons au goût Mojito

Autre amendement déposé par Bernard Jomier : une taxe pour lutter contre « les produits à référence alcoolique, c'est-à-dire ceux qui utilisent les alcools comme argument de vente. Par exemple, il y a des boissons sans alcool, comme « Virgin Mojito », ou aussi des bonbons, qui font écho à l’alcool. On ne peut pas accepter un conditionnement à l’alcool dès le très jeune âge. On fixe la taxe à 5%, affectée pour moitié à l’Agence nationale de santé publique pour la prévention et pour moitié à la Sécu » explique le sénateur de Paris. Sur Twitter, on trouve des amateurs de ces bonbons :

La taxe arrangée sur le Rhum

On ne le savait peut-être pas, mais la route du rhum passe par le Sénat. Et sur l’alcool, les vents contraires se côtoient. Plusieurs amendements ont été déposés pour ralentir l’alignement progressif de la fiscalité sur les rhums en Outre-Mer. Ceux-ci profitent d’une taxe très faible. Les députés ont prévu de l’aligner en 5 ans au niveau de celle en vigueur en métropole. Certains sénateurs des départements concernés veulent carrément supprimer la mesure. A défaut, ils fixent le délai d’alignement à 10 ans.

Pas touche au vin

En revanche, aucun amendement n’est déposé pour taxer davantage le vin dans son ensemble. Les droits d'accise sont pourtant extrêmement faibles en France sur ce produit. Dans une lettre ouverte à Agnès Buzyn, des médecins spécialistes, rappelant que l’alcool fait 49.000 morts en France par an, avaient demandé que l’alcool, et le vin en particulier, puisse financer davantage le fonds de lutte contre les addictions (voir notre article « Le vin, appellation d’origine très protégée par Emmanuel Macron et le gouvernement »). En vain. Emmanuel Macron s’oppose à toute taxe ou mesures qui mettraient à mal la filière viticole.

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