« Lorsque la loi ne protège plus nos compatriotes, alors il faut (la) changer », a déclaré le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, se félicitant de l’adoption en première lecture à l’Assemblée nationale d’un « texte important » visant à allonger la durée de rétention administrative des étrangers jugés dangereux. Après son adoption par les élus du Palais Bourbon, ce texte d’origine sénatoriale revient, ce 9 juillet au Sénat en deuxième lecture.
Après des débats houleux, les députés ont adopté le texte à 303 voix contre 168 grâce au soutien du socle commun, du Rassemblement national et du groupe centriste Liot. Les élus ont également rendu hommage à Olivier Marleix, rapporteur du texte, qui a mis fin à ses jours lundi.
Conformément au souhait de son auteure, la sénatrice LR Jacqueline Eustache-Brinio, la proposition de loi devrait être adoptée sans modification. La sénatrice du Val d’Oise avait déposé ce texte après le meurtre de Philippine, étudiante retrouvée morte à Paris en 2024. Le meurtrier présumé était un Marocain faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire (OQTF), qui venait de sortir d’un centre de rétention après plusieurs années en prison.
Allonger la durée de rétention de 90 à 210 jours
« A quelques jours près, l’administration détenait le laissez-passer consulaire » qui aurait permis de l’ « éloigner », assure Bruno Retailleau qui fait de l’allongement de la durée de rétention administrative un moyen de favoriser l’exécution des mesures d’éloignement. En 2018, une loi avait déjà allongé la durée maximale de rétention la faisant passer de 45 à 90 jours.
Concrètement, le texte fait passer la durée de rétention administrative maximale de 90 jours à 180 voire 210 jours. Les personnes concernées sont les étrangers en situation irrégulière condamnés à une peine d’interdiction de territoire français, à des crimes ou délits graves ou dont le comportement constitue une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public. La gauche a notamment critiqué cette notion de « menace particulièrement grave pour l’ordre public » la jugeant floue et contraire au respect de l’Etat de droit. Un argument rejeté par Bruno Retailleau arguant que le droit européen permet une durée de détention pouvant aller jusqu’à 18 mois. Lors de son adoption en première lecture au Sénat, la gauche avait fustigé un « texte CNews ».
Un article permettant la prise d’empreintes digitales ajouté par les députés
Le texte adopté par les députés prévoit également la possibilité de prendre les empreintes digitales d’un étranger en détention sans son consentement dès lors qu’il s’agit de l’unique moyen de vérifier son identité. L’article ouvre la possibilité à une prise d’empreintes digitales sans le consentement de l’individu. Cette mesure avait déjà été proposée – dans une autre formulation – par LR lors des débats sur la loi immigration à l’hiver 2023. Le Conseil constitutionnel avait alors censuré cette disposition estimant qu’elle n’offrait pas les garanties nécessaires de respect des libertés fondamentales.